Présidentielle nigérianne : le mystère Goodluck Jonathan
À plus d’un an de l’élection présidentielle de 2015, le scrutin est au coeur des querelles intestines qui déchirent depuis plusieurs mois le parti au pouvoir. Le président Goodluck Jonathan est, lui, de plus en plus contesté.
Le président nigérian Goodluck Jonathan, 56 ans, sera-t-il candidat à sa propre succession en 2015 ? Vainqueur de la présidentielle de 2011, ce chrétien originaire du Sud n’a pas encore annoncé s’il serait candidat. Mais s’il se représentait, il violerait une règle tacite de sa formation politique, le Parti démocratique populaire (PDP) stipulant qu’après un chrétien, c’est au tour d’un musulman du Nord de se présenter.
De plus, confronté à une crise politique sans précédent, le chef de l’État a, en un mois, perdu de nombreux soutiens politiques au premier rang duquel figure l’ancien président Olusegun Obasanjo (1999-2007). Le mois dernier, le fondateur du PDP a tiré la sonnette d’alarme et exhorté Goodluck Jonathan à ne pas se représenter à la prochaine présidentielle.
Dans une lettre ouverte de 18 pages, il a accusé le président d’être resté impuissant face à la corruption, au vol de pétrole organisé dans le premier producteur de brut d’Afrique et aux graves problèmes de sécurité. Il est allé jusqu’à l’accuser de former une milice privée pour faire assassiner ses rivaux politiques.
Cinq influents gouverneurs d’États ont également rallié le Congrès des progressistes (APC), principal parti d’opposition, le mois dernier, suivis la semaine dernière par 37 députés du PDP, faisant perdre au parti présidentiel sa majorité absolue au parlement.
Au Sénat, enfin, d’autres membres du PDP pourraient aussi basculer dans l’opposition, au moment où les partis commencent à s’organiser en vue du scrutin de 2015.
"Un président très affaibli"
Goodluck Jonathan "est un président très affaibli à l’heure actuelle", estime Clement Nwankwo, directeur du centre de réflexion et de recherche Policy and Legal Advocacy Centre, à Abuja. "Il est en position d’échec et il a beaucoup à faire s’il veut regagner le soutien de l’opinion publique", ajoute-t-il.
Le commentateur politique Dapo Thomas estime que le président doit choisir s’il veut servir son parti ou se concentrer sur ses propres ambitions politiques. "Il doit lâcher un des deux et permettre aux mécanismes du parti d’opérer librement", commente le professeur de l’université de l’État de Lagos.
Pour le politologue Clement Nwankwo, si ces défections ont donné plus de poids à l’opposition, elles ne sont pas pour autant une garantie de succès aux prochaines élections et le président peut encore jouer de son pouvoir pour attirer au PDP de nouveaux soutiens.
Pour l’analyste Thomas, plus le président tarde à aborder la question de sa candidature, plus les dommages seront importants pour le PDP. Goodluck Jonathan doit s’engager à ne pas se représenter et "il devrait le faire maintenant pour sauver le parti" dont le déclin va se poursuivre, avertit-il, estimant que "les défections vont continuer aussi longtemps que ce désenchantement persiste".
(Avec AFP)
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