Soudan du Sud : selon l’armée, les miliciens pro-Machar sont toujours aux portes de Bor

Selon l’armée sud-soudanaise des jeunes miliciens de l’ethnie Lou Nuer, que le gouvernement accuse l’ex-vice président Riek Machar de mobiliser, se trouveraient toujours, lundi, aux portes de Bor, capitale de l’État du Jonglei (Est).

Des corps de miliciens près de Bor, le 28 décembre. © AFP

Des corps de miliciens près de Bor, le 28 décembre. © AFP

Publié le 30 décembre 2013 Lecture : 4 minutes.

Mis à jour le 30/12/2013 à 09H27

"Hier, nous avons eu des affrontements à (…) quelque 25 miles (environ 40 km) au nord de Bor (…) La population de Bor craint une attaque à n’importe quel moment", a déclaré le porte-parole de l’armée, Philip Aguer, à l’AFP.

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"Les forces de Riek Machar poursuivent leur avancée sur Bor, mais nous sommes confiants dans notre capacité à les repousser pour protéger la ville", a-t-il ajouté, sans préciser le nombre de miliciens présents près de la capitale régionale.

25 000 miliciens

Dimanche, le porte-parole du gouvernement, Michael Makuei, avait affirmé que les jeunes armés, membres selon Djouba d’une milice appelée "L’Armée blanche" et redoutée dans la région pour sa brutalité, avaient abandonné leur avancée vers Bor et entamé leur retraite. Selon lui, "les chefs locaux Lou et Dau Nuer ont convaincu les jeunes et la plupart sont rentrés chez eux". "Donc à moins (d’une nouvelle mobilisation), il semble que la situation se calme maintenant". Ajoutant : "C’est bien parce que nous ne voulons pas perdre plus de vies".

Toutefois, quelques heures après ces déclarations, l’ONU avait fait état de la présence de groupes armés non identifiés à environ 50 kilomètres au nord-est de la ville de Bor, capitale de l’Etat du Jonglei (est), point focal de la lutte entre partisans de Machar et Djouba.

Depuis samedi Djouba accusait Riek Machar d’avoir mobilisé jusqu’à 25 000 jeunes miliciens de l’ethnie Lou Nuer, membres selon elle d’un groupe surnommé "l’Armée blanche", prêts "à attaquer à n’importe quel moment" dans l’Etat du Jonglei.

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Le porte-parole des rebelles, Moses Ruai Lat, n’avait pas démenti la présence de forces hostiles au gouvernement dans l’État. Il avait cependant affirmé qu’il ne s’agissait pas de Lou Nuer mobilisés par Riek Machar mais de soldats de l’armée qui avaient décidé de se retourner d’eux-mêmes contre le gouvernement.

Même s’il était difficile de déterminer le contrôle exercé par M. Machar sur ces hommes, la menace d’une nouvelle attaque semblait bel et bien peser sur le Jonglei.

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Joseph Contreras, le porte-parole de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud (Minuss), avait ainsi appelé "les parties ayant une influence sur ces groupes armés à les convaincre d’immédiatement arrêter leur avancée pour éviter un autre bain de sang".
Le seul nom de l’Armée blanche évoque depuis des années terreur et massacres au Soudan du Sud.

Dans les années 90, le groupe était actif aux côtés de Riek Machar, lors de la guerre civile qui a durant des décennies opposé Khartoum à Djouba avant l’accès à l’indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.

Fin 2011 et début 2012, c’est encore elle qui a affronté, dans le Jonglei, une autre tribu, les Murle, dans de sanglantes opérations de représailles autour de vols de bétails.

Pays au bord de la guerre civile

Ces menaces d’attaques étaient survenues alors que des pays d’Afrique de l’Est et de la Corne de l’Afrique ont donné jusqu’à mardi au gouvernement et aux rebelles pour entamer des pourparlers et stopper les combats dans leur pays au bord de la guerre civile.
Le président Salva Kiir et son rival Machar ont accepté le principe des discussions, mais sans fixer de date, et la médiation piétine.
Riek Machar, qui réclame purement et simplement le départ de Salva Kiir, ne veut s’engager à aucun cessez-le-feu tant que ne seront pas libérés tous ses alliés.

Or, selon le porte-parole du gouvernement, Michael Makuei, le gouvernement n’est prêt à libérer que huit des onze détenus, et uniquement quand l’ex-vice président aura accepté le cessez-le-feu et que les négociations auront commencé.

Depuis le 15 décembre le Soudan du Sud est déchiré par d’intenses combats alimentés par une rivalité entre MM. Kiir et Machar, limogé en juillet.

Le premier accuse le second de tentative de coup d’État. Riek Machar nie et reproche à M. Kiir de chercher à éliminer ses rivaux.

En quelques jours, les rebelles ont pris le contrôle de capitales régionales comme Bentiu, dans l’État pétrolier d’Unité (Nord), et Bor, reprise par l’armée mardi.

Dimension ethnique du conflit

Le récent conflit revêt aussi une dimension ethnique : la rivalité entre MM. Kiir et Machar utilise et exacerbe les différends ethniques entre les Dinka, tribu du premier, et les Nuer, celle du second.

Des informations émergent sur des violences entre communautés : meurtres, viols, massacre. Le bilan est déjà de milliers de morts et l’ONU a annoncé la découverte d’au moins un charnier. Plus de 120 000 personnes ont été déplacées.

>> À lire aussi : Soudan du Sud : mise en garde de Ban Ki-moon aux auteurs d’exactions

Au-delà des dirigeants régionaux, d’autres pays s’activent pour tenter d’enrayer la crise.

Les États-Unis, parrains de l’indépendance du Soudan du Sud et son principal soutien depuis, ont dépêché un envoyé et la Chine, qui possède des intérêts dans le secteur pétrolier sud-soudanais, a annoncé l’envoi d’un émissaire.

"Toutes les violences, attaques et violations des droits de l’homme doivent cesser immédiatement", a déclaré le porte-parole du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. "Les responsables (des exactions) devront répondre de leurs actes".

Débordée aux premiers jours des combats, l’ONU a décidé de doubler à 12 500 ses Casques bleus et d’envoyer des moyens aériens supplémentaires pour mieux protéger les civils. Les renforts ont commencé à arriver au compte-gouttes.

(Avec AFP)

 

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