Soudan du Sud : entre 400 et 500 morts dans des affrontements à Djouba

La situation dégénère au Soudan du Sud après l’annonce d’un coup d’État manqué contre le président Salva Kiir. En deux jours, entre 400 et 500 personnes auraient été tuées dans des combats entre factions rivales de l’armée à Djouba, où près de 15 000 habitants ont trouvé refuge dans des bases de l’ONU.

Une équipe médicale de l’ONU aide des civils à Juba le 17 décembre 2013. © AFP

Une équipe médicale de l’ONU aide des civils à Juba le 17 décembre 2013. © AFP

Publié le 18 décembre 2013 Lecture : 4 minutes.

Au lendemain de l’annonce d’une tentative de coup d’État contre le président Salva Kiir, le Soudan du Sud est-il en train de basculer dans des violences ethniques ? C’est en tout cas ce que craint l’organisation des Nations-Unies (ONU), dont un des responsables a annoncé mardi que des combats entre factions rivales de l’armée auraient fait entre 400 et 500 morts en deux jours à Djouba.

Selon le secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, le français Hervé Ladsous, entre 400 et 500 cadavres auraient été transportés dans des hôpitaux de la capitale sud-soudanaise à la suite des combats opposant des factions rivales de l’armée. D’après lui, 800 autres personnes ont été blessées dans ces affrontements entre les forces fidèles au président Kiir et celles d’un de ses opposants, l’ancien vice-président Riek Machar. Hervé Ladsous a précisé que ces informations se fondaient sur les données envoyées par les hôpitaux de Djouba mais que les Nations unies n’étaient pas encore en mesure de confirmer ces chiffres.

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Des tirs et des détonations, qui avaient repris dans la nuit de lundi à mardi malgré le couvre-feu, ont été entendus par intermittence jusqu’à environ 14h30 (11h30 GMT) mardi dans divers quartiers de la ville. Mardi soir, près de trois heures après le début du couvre-feu (18h00 locales, 15h00 GMT) on entendait encore des détonations sporadiques d’armes légères, semblant démentir les affirmations du ministre de l’Information, selon lesquelles les autorités avaient "le contrôle total" de la situation.

Riek Machar nie avoir tenté un coup d’État

Mardi, le gouvernement a également annoncél’arrestation de dix personnalités politiques "en rapport avec le coup d’État déjoué" dimanche. Selon le président Salva Kiir, son rival politique, l’ancien vice-président Riek Machar, limogé en juillet, aurait fomenté cette tentative de putsch avec des soldats lui étant loyaux. Sur les dix personnes arrêtées figurent huit anciens ministres du gouvernement limogé en juillet, dont plusieurs personnalités sud-soudanaises, à l’exception notoire de Riek Machar. Selon le gouvernement, celui-ci est "en fuite" et recherché, ainsi que quatre autres importantes figures politiques sud-soudanaises.

Dans un entretien au site indépendant Sudan Tribune publié mercredi, l’ancien vice-président a nié l’existence d’une tentative de coup d’État. "Il n’y a pas eu de coup d’État. Ce qui s’est passé à Djouba est un malentendu entre membres de la garde présidentielle, au sein de leur unité. Ce n’était pas une tentative de coup d’État. Je n’ai aucun lien ou connaissance d’une quelconque tentative de coup d’État", a affirmé Riek Machar, qui s’exprimait depuis un endroit inconnu.

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Toujours officiellement vice-président du parti au pouvoir, le Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM), Riek Machar a assuré qu’aucun responsable du parti n’était lié au prétendu coup d’État. "Ce que nous voulions était transformer démocratiquement le SPLM. Mais Salva Kiir voulait utiliser la prétendue tentative de coup d’Etat pour se débarrasser de nous pour contrôler le gouvernement et le SPLM", a-t-il expliqué. Selon lui, Salva Kiir a violé de manière répétée la Constitution "et n’est plus un président légal". "Nous ne voulons plus qu’il soit le président du Soudan du Sud", a-t-il poursuivi sans préciser ses intentions.

Dinka contre Nuer ?

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Selon Hervé Ladsous, près de 15 000 personnes se sont réfugiées sur les bases de l’ONU tout autour de Djouba depuis que les combats ont démarré dimanche soir. La Mission des Nations unies au Soudan du Sud (Minuss) avait auparavant évoqué le chiffre de 10 000 civils réfugiés dans les deux bases de l’ONU à Djouba. De son côté, Washington a annoncé l’évacuation de ses diplomates non essentiels.

Certains observateurs redoutent désormais que les affrontements se muent en tueries entre les communautés Dinka du président Kiir et Nuer de Riek Machar, qu’opposent de vieux ressentiments remontant à la guerre civile. Des sources humanitaires ont fait état de violences de militaires ciblant d’ores et déjà la communauté Nuer à Djouba. "Il est crucial que la violence actuelle ne prenne pas des dimensions ethniques", a averti mardi la Minuss, exhortant "citoyens et dirigeants à se garder de tout acte incendiaire ou violence contre des communautés en particulier".

Des observateurs ont émis mardi des doutes sur la réalité de la tentative de coup d’État alléguée par le président Kiir, y voyant un possible prétexte pour se débarrasser de Riek Machar, rival de longue date qui avait ouvertement fait part de son intention de se présenter contre le chef de l’État à la présidentielle de 2015.

En juillet, le président Kiir avait limogé Machar et l’ensemble du gouvernement, sur fond d’inimitié entre les deux hommes et de dissensions au sein du régime, issu de l’ex-rébellion sudiste. Celle-ci est au pouvoir depuis un accord de paix avec Khartoum en 2005, qui a mis fin à des décennies de guerre civile et débouché sur l’indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.

(Avec AFP)

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