Centrafrique : opération de l’armée française dans le nord de Bangui
Dans le nord de Bangui, l’armée française menait mardi une opération dans un bastion de miliciens chrétiens.
À Boy-Rabe, quartier nord de Bangui et bastion des milices chrétiennes, les soldats français de l’opération Sangaris ont lancé à l’aube une opération militaire "anti-balaka" (anti-machettes, en langue sango), a rapporté une source proche des militaires français.
En milieu de matinée l’opération était toujours en cours, et, sur la route menant à l’aéroport, plusieurs véhicules blindés étaient déployés à l’entrée du quartier, survolé en permanence par un hélicoptère.
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Ce quartier du nord de la capitale centrafricaine un fief de l’ancien président François Bozizé, ren-versé en mars 2013 par l’ex-rébellion de la Séléka. Boy-Rabe, situé en limite de la brousse qui en-toure Bangui, sert de refuge à de nombreux miliciens "anti-balaka", en lutte contre l’ex-Séléka.
À la faveur d’une vaste offensive coordonnée le 5 décembre sur plusieurs quartiers périphériques de Bangui, ces miliciens ont pris part à nombreuses attaques contre des civils musulmans qu’ils assimi-lent aux combattants de l’ex-rébellion Séléka, coalition à dominante musulmane au pouvoir depuis mars.
Ces derniers mois, le quartier a été pillé à plusieurs reprises par des hommes de la Séléka, qui y ont commis d’innombrables exactions. Excédée par ces violences, la population, chrétienne, y est lar-gement acquise aux "anti-balaka", dont l’armement est généralement très sommaire : vieux fusils, machettes et armes blanches…
Appel au calme de Nicolas Tiangaye
L’armée française semble donc entamer là une nouvelle étape de sa vaste opération de désarmement des milices et groupes armés, débutée le 9 décembre à Bangui. Jusqu’à présent, les 1 600 militaires du dispositif français Sangaris avaient visé essentiellement les combattants de l’ex-Séléka, seuls à déambuler en armes dans les rues de la capitale.
Neutralisés et consignés dans leurs casernes, beaucoup de miliciens étaient furieux de ce désarme-ment à sens unique selon eux, qui réduisait leur pouvoir à néant et les laissait incapable de défendre la communauté musulmane face à la soif de vengeance des habitants –très majoritairement chré-tiens– de Bangui.
De nombreux Banguissois reprochaient également aux militaires français de rester sur les grands axes et de ne pas pénétrer en profondeur dans les quartiers, dédales de ruelles en terre aux innombrables maisonnettes, où se poursuivent toujours des violences –pillages et lynchages– entre chré-tiens et musulmans.
Sur le plan politique, le Premier ministre Nicolas Tiangaye, issu de l’ancienne opposition à François Bozizé, a lancé un nouvel "appel au calme pour que la paix revienne".
"Il faut préserver l’unité nationale et la concorde. C’est le socle du pays. Un seul pays, un seul peuple", a-t-il déclaré. "L’unité est notre seule richesse. Les conflits intercommunautaires ou inter-religieux remettent en cause cette unité. J’en appelle au patriotisme pour qu’on fasse preuve de par-don et de tolérance", a-t-il lancé.
Dissensions
Depuis dimanche, la discorde a éclaté au grand jour au sein du gouvernement, dominé par les pro-Séléka, mais qui compte d’anciens membre de l’opposition démocratique et des partisans du prési-dent déchu Bozizé. Le limogeage de trois ministres et du directeur du Trésor, décidé unilatéralement par le président (et ex-chef de la Séléka) Michel Djotodia, a suscité une polémique à la tête de l’exécutif et un débat constitutionnel, sans doute décalé face à la violence du quotidien des Banguissois, mais qui reste à trancher.
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D’un côté, les représentants de l’ancienne opposition estiment qu’il faut annuler ce décret présidentiel qui n’a pas été approuvé par le Premier ministre. Les partisans de Djotodia assurent quant à eux que le Premier ministre n’a pas forcément à contresigner les décisions présidentielles.
La France a elle pris le parti du Premier ministre Tiangaye, estimant que les limogeages étaient "en contradiction avec la Charte constitutionnelle de la transition et les accords de Libreville (signés en janvier 2013)", et "de nature à aggraver encore" la situation déjà catastrophique dans le pays.
Crise humanitaire
Sur le terrain la situation humanitaire est préoccupante. Près de 2 000 réfugiés centrafricains fuyant les violences sont arrivés lundi dans le nord de la République démocratique du Congo (RDC), bra-vant la fermeture de la frontière côté centrafricain, selon le Haut-commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR).
"Malgré la fermeture de la frontière de la Centrafrique, 1 815 réfugiés sont arrivés aujourd’hui à Zongo", une ville congolaise qui fait face à la capitale centrafricaine, de l’autre côté du fleuve Ou-bangui.
Au total, près de 47 000 réfugiés de Centrafrique ont fui en RDC, selon le HCR. Selon l’ONU, la Centrafrique compte près de 159 000 déplacés dans tout le pays et connait une grave crise humani-taire.
À Bossangoa, l’un des épicentres des violences dans le Nord-Ouest, des dizaines milliers de per-sonnes sont toujours réfugiées dans et autour de la cathédrale. Des humanitaires, notamment des membres des agences onusiennes, établissent des listes de bénéficiaires pour les distributions de vivres et de matériels de première nécessité.
À quelques centaines de mètres de là, des milliers de déplacés musulmans sont installés sur le site d’un établissement scolaire, l’école "Liberté".
(Avec AFP)
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