Centrafrique : 350 soldats français débarqués au Cameroun en attente d’instructions
Au Cameroun, à Douala, quelque 350 soldats français, une centaine de véhicules et des hélicoptères sont « en attente d’instructions » pour intervenir en Centrafrique. Sur place, à Bangui, le Premier ministre centrafricain Nicolas Tiangaye a affirmé, lundi, « compter » sur la France pour rétablir la sécurité dans son pays, appelant le Conseil de sécurité à placer cette intervention sous le « chapitre 7 » de la charte de l’ONU. Selon nos informations, le vote de cette résolution devrait intervenir ce jeudi.
Mis à jour à 11h30
"En tout, on a débarqué 350 personnes et une centaine de véhicules. Il y a des hélicoptères, tous types de véhicules jusqu’au VAB (Véhicule de l’avant blindé)", a déclaré Pierre de Briançon, le capitaine du vaisseau le Dixmude, qui a transportés ces troupes françaises.
Il sont "en attente d’instructions et d’ordre de l’autorité politique pour éventuellement intervenir en RCA (République centrafricaine)", a précisé l’officier français. "Le détachement [débarqué] est capable d’intervenir seul. Mais, s’il intervient en Centrafrique, il sera dans un dispositif plus large. Il y a des moyens là-bas qui viendront des éléments prépositionnés (Libreville, Tchad), de métropole et de nous".
Le commandant Pierre de Briançon a toutefois souligné : "Nous avons quitté Toulon le 16 novembre avec à bord un détachement de l’armée de terre dans le cadre d’une mission classique dans le Golfe de Guinée et nous avons reçu l’ordre de débarquer ce détachement à Douala" en cours de route.
Un peu plus de 200 militaires français sont arrivés pendant le week-end en renfort à Bangui, ce qui porte à "plus de 600" hommes les effectifs français dans la capitale centrafricaine avant le lancement attendu d’une opération pour rétablir l’ordre en Centrafrique.
>> Lire aussi : Centrafrique : Séléka, dégage !
Nicolas Tiangaye à Paris
"La situation sécuritaire et humanitaire est toujours préoccupante (…) C’est la raison pour laquelle nous comptons sur l’engagement de la communauté internationale, particulièrement avec l’intervention de la France et des pays africains de la Misca (Force africaine en cours de déploiement en Centrafrique) pour arriver à sécuriser davantage l’ensemble du territoire", a déclaré pour sa part Nicolas Tiangaye, le Premier ministre centrafricain, qui se rend mardi à Paris pour représenter son pays au sommet, prévu vendredi et samedi, sur la sécurité en Afrique.
Pour cette intervention, à laquelle le conseil de sécurité de l’ONU s’apprête à donner son feu vert, Nicolas Tiangaye – interlocuteur de la communauté internationale dans la crise – a souhaité que les forces françaises et africaines obtiennent un mandat "sous chapitre 7" de la charte de l’ONU.
Selon nos informations, le vote de cette résolution devrait intervenir jeudi matin à New York.
"Il faut que ces forces soient dotées de moyens coercitifs pour rétablir la paix et la sécurité" dans le pays, livré à une insécurité généralisée et menacé d’une guerre civile depuis le renversement en mars du président François Bozizé par la coalition rebelle Séléka – depuis dissoute – dirigée par Michel Djotodia, a insisté le Premier ministre.
"Il est évident" que les effectifs prévus actuellement pour la force – 3 600 soldats africains, un millier de militaires français – "seront insuffisants mais je pense qu’il faut procéder de façon progressive (…). C’est une première étape qu’il faut déjà saluer", a-t-il relevé.
Bossangoa et Bouca, "deux villes menacées"
Sur le risque d’une guerre civile à caractère religieux opposant chrétiens et musulmans, Nicolas Tiangaye s’est montré très réservé, appelant à "éviter toute généralisation". "Il y a deux villes qui sont menacées : Bossangoa et Bouca", dans le nord-ouest du pays où des violences intercommunautaires entre chrétiens musulmans ont fait au moins une centaine de morts et 40 000 déplacés depuis septembre, a-t-il rappelé. "Le gouvernement est en train de tout mettre en œuvre pour juguler cette crise à connotation confessionnelle. Je crois qu’il faut éviter toute généralisation", a-t-il assuré, affirmant gérer de "manière consensuelle" la crise avec Michel Djotidia, premier président musulman de l’histoire d’un pays très majoritairement chrétien.
Au sommet de Paris, dont la crise en Centrafrique sera l’un des principaux sujets, Nicolas Tiangaye entend insister sur "deux points" : d’abord "l’aspect sécuritaire et humanitaire qui sont intimement liés" dans la crise actuelle qui affecte la quasi-totalité de la population du pays.
"Le deuxième message portera sur l’aide financière, parce que notre économie est, comme on le dit, asphyxiée. Il va falloir une aide de la communauté internationale pour nous accompagner" pour redresser le pays avant des élections générales prévues en principe d’ici 2015, a-t-il ajouté.
Sur le plus long terme, pour sortir du cycle sans fin de rébellions, conflits, coup d’État qui émaillent l’histoire troublée du pays depuis son indépendance en 1960, Nicolas Tiangaye – qui a un long passé de militant des droits de l’homme à Bangui – pense qu’une profonde évolution des pratiques politiques est indispensable. "Il faut qu’il y ait une bonne gouvernance (…) Une bonne gouvernance, cela signifie qu’il y ait une répartition équitable des richesses du pays et qu’il ne faille pas qu’un groupe confisque le pouvoir au profit de son ethnie, de sa région", a-t-il expliqué. Et de renchérir : "Il nous faut aussi une armée républicaine, professionnelle et équilibrée". "Lorsque nous aurons rempli ces conditions, il y aura très peu d’arguments pour permettre aux gens de prendre les armes", a-t-il conclu.
(Avec AFP)
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