Égypte : une soixantaine de manifestants arrêtés au Caire

Une soixantaine de manifestants opposés au pouvoir militaire ont été arrêtés mardi au Caire. Dans la foulée, dix membres du comité de révision de la Constitution ont suspendu leur participation aux travaux de cette assemblée pour protester contre ces arrestations.

Des policiers dispersent une manifestation au Caire le 26 novembre 2013. © AFP

Des policiers dispersent une manifestation au Caire le 26 novembre 2013. © AFP

Publié le 27 novembre 2013 Lecture : 3 minutes.

Quelque soixante manifestants ont été arrêtés, mardi 26 novembre, au Caire, parce qu’ils n’avaient pas obtenu l’autorisation préalable de se rassembler. Depuis dimanche, une loi impose aux organisateurs d’une manifestation d’en informer les autorités trois jours avant sa tenue. Le ministère de l’Intérieur peut de son côté interdire tout rassemblement s’il juge que cela représente une "menace pour la sécurité".

"Les policiers ont utilisé leurs canons à eau et ont ensuite frappé et arrêté des gens", a rapporté Alaa Abdel Fattah, un militant reconnu, mais "cela n’arrêtera pas les manifestations". La nouvelle loi "doit être abrogée", a pour sa part déclaré Ahmed Maher, fondateur du mouvement du 6-avril, fer de lance de la révolte de 2011 qui a chassé du pouvoir le président Hosni Moubarak. "Le ministère de l’Intérieur veut en finir avec les manifestations", a-t-il déploré, rappelant que "même sous Moubarak, des manifestations avaient lieu".

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Le ministère de l’Intérieur a affirmé dans un communiqué avoir informé Ahmed Maher qu’il devait demander une permission avant le rassemblement. Le nouveau texte, qui intervient sur fond de répression des partisans du président islamiste Mohamed Morsi, prévoit en outre, en cas de violences de la part de manifestants, une "utilisation graduée de la force". Amnesty International a estimé qu’il s’agissait d’un "grave retour en arrière" donnant "carte blanche aux forces de sécurité pour utiliser une force excessive, notamment létale, contre les manifestants".

Canons à eau et lacrymogènes

Mardi, la police a fait usage de canons à eau pour disperser les protestataires qui réclamaient que soient jugés les responsables de la mort de manifestants lors de heurts sanglants, fin 2011, entre forces de l’ordre et opposants au pouvoir militaire alors en place. Une autre manifestation, qui dénonçait le maintien dans la future Constitution d’un article autorisant les procès de civils devant des tribunaux militaires, a également été dispersé à coup de canons à eau. Plusieurs arrestations ont aussi eu lieu.

Parmi les manifestants arrêtés figurent plusieurs militants célèbres en Égypte, dont Mona Seif, qui avait fondé la campagne "No to military trials" ("Non aux procès militaires"), et Ahmed Harara, qui a perdu ses deux yeux à cause de tirs des forces de l’ordre dans des manifestations en 2011.

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En réaction à l’arrestation des manifestants cairotes, dix membres du comité chargé de réviser la Constitution égyptienne ont suspendu leur participation, poussant le reste du comité à ajourner ses travaux jusque mercredi. "Il s’agissait d’une manifestation pacifique (…) et nous sommes ici pour travailler à une Constitution qui garantisse la liberté au peuple égyptien", a déclaré le réalisateur Khaled Youssef, un membre du Comité des cinquante, à la télévision d’État.

Un projet de Constitution qui fait débat

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"Le Comité des cinquante risque l’explosion, alors qu’il est la pierre angulaire de la transition", a-t-il déploré alors que les cinquante se sont engagés à remettre, le 3 décembre, une version finale de la Constitution révisée au président par intérim Adly Mansour. La feuille de route de la transition prévoit ensuite un référendum sur la loi fondamentale, puis la tenue d’élections législatives et présidentielle d’ici l’été 2014.

Ce projet de Constitution révisée fait débat au sein même du Comité. Il prévoit en effet de maintenir un article permettant aux tribunaux militaires de juger des civils accusés d’avoir "nui" aux forces armées – une définition souvent interprétée au sens le plus large en Égypte. Trois journalistes ont récemment écopé de peines de prison ordonnées par des tribunaux militaires en vertu de cet article.

Dans la soirée, un troisième rassemblement a été dispersé dans le centre du Caire par les forces de l’ordre, qui ont lancé des gaz lacrymogènes. Les manifestants scandaient des slogans hostiles à l’armée et à son chef, le général Abdel Fattah al Sissi, ainsi qu’au ministre de l’Intérieur, Mohamed Ibrahim.

(Avec AFP)

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