CPI – Affaire Kenyatta : le bras de fer se poursuit à La Haye

Après avoir perdu la bataille au Conseil de sécurité, les États africains continuent de soutenir le président kényan Uhuru Kenyatta. Ils comptent lui obtenir des aménagements à son procès lors de l’Assemblée des États-parties de la Cour pénale internationale (CPI), qui se tient à La Haye du 20 au 28 novembre.

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Publié le 22 novembre 2013 Lecture : 3 minutes.

Après avoir menacé de se retirer de la Cour pénale internationale (CPI), après avoir tenté d’obtenir une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU, les États africains volent une nouvelle fois au secours du président kényan Uhuru Kenyatta et de son vice-président, William Ruto.

Les deux hommes sont soupçonnés d’avoir incité aux violences post-électorales de 2007-08, qui avaient fait plus de 1 000 morts. Ruto comparaît devant la CPI depuis le 10 septembre – son procès vient d’être renvoyé au 13 janvier pour un problème de témoins –  et le procès du président Kényan devrait, pour sa part, débuter le 5 février, après deux reports, notamment suite à l’attaque terroriste du centre commercial Westgate à Nairobi, fin septembre.

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Par l’intermédiaire du Rwanda, les États africains avaient déjà soumis une résolution au Conseil de sécurité pour obtenir une suspension d’un an des procès au motif qu’ils menaceraient la paix et la sécurité. Les Africains mettaient notamment en avant le travail de réconciliation effectué par les deux hommes (membres de des factions opposées en 2007-08, ils se sont alliés lors des dernières élections). Mais leur résolution n’a récolté que 7 votes, contre 9 requis. Les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne, trois pays qui disposent du droit de véto, se sont notamment abstenus, contrairement à la Chine et la Russie, qui ont voté pour.

La règle des deux-tiers

Le théâtre de ce bras de fer s’est donc déplacé à La Haye, où se tient l’Assemblée des États-parties (AEP), du 20 au 28 novembre. Cette Assemblée, où sont représentés chaque année les 122 signataires du Statut de Rome instituant la CPI, peut amender les règles de la Cour, si les deux-tiers de ses membres se mettent d’accord.

Le 21 novembre, un débat a eu lieu sur le thème de "l’inculpation des Chefs d’État et de gouvernement encore en fonction et ses conséquences sur la paix, la stabilité et la réconciliation". S’exprimant au nom de l’Union africaine (UA), le représentant de l’Ouganda s’est notamment offusqué de ce que la CPI poursuive exclusivement des Africains.

Certains États défendent notamment une immunité pour les présidents en exercice.

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Plusieurs amendements pourraient être examinés par l’AEP d’ici à la fin de la session. Certains États défendent notamment une immunité pour les présidents en exercice. Mais une telle réforme impliquerait une modification du Statut de Rome, dont l’article 27 stipule clairement que "la qualité officielle de chef de l’État ou de gouvernement […] n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale".

"Selon les règles de l’AEP, cet amendement a été soumis trop tard pour qu’il puisse être voté, indique Montserrat Carboni, représentante de la Fédération internationale des Droits de l’Homme à La Haye. Mais il n’y a de toute façon pas de majorité des deux tiers pour le voter".

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Modifications de règlements

Des modifications du "règlement de procédure de preuve" (qui doivent aussi être acceptées par les deux tiers de ses membres) pourraient en revanche être adoptées. Sont notamment proposés des aménagements permettant aux accusés en fonction de ne pas assister à l’ensemble des audiences ou encore de permettre une comparution par vidéo-conférence.

Avec 34 membres, les Africains représentent plus du quart des États-parties au statut de Rome, ce qui est insuffisant pour remporter seuls de tels votes. Les débats du 21 novembre ont toutefois montré que d’autres États pourraient se rallier à un compromis sur les règles de procédure.

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