Cameroun : affluence morose pour législatives sans enjeux
Peu de Camerounais se sont rendus aux urnes, lundi 30 septembre, pour élire leurs députés et élus locaux. Sans surprise, le scrutin devrait donner une écrasante majorité à l’Assemblée nationale au parti du président Paul Biya, au pouvoir depuis 30 ans.
Quelque 5,4 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour élire 180 députés et des milliers de conseillers municipaux des 360 communes du pays, au scrutin de liste à un tour. Vingt-neuf partis présentent des candidats aux législatives et 35 sont en compétition pour les municipales, mais c’est le Rassemblement du peuple camerounais (RDPC), parti majoritaire de Paul Biya, qui reste grand favori des élections.
Après deux décennies marquées par la contestation de quasiment toutes les élections, la campagne n’a pas attiré les foules. "Ce peu d’engouement est révélateur du peu de confiance que les Camerounais ont vis-à-vis du régulateur électoral, Elecam" (Elections Cameroon), chargé d’organiser les scrutins, estime le politologue Mathias Nguini Owona. De son côté, le RDPC attribue en partie la responsabilité de cette situation aux querelles intestines qui ont miné le parti pour les investitures. "Nous sommes sortis de la période des investitures avec des frustrations" qui ont refroidi l’enthousiasme des électeurs, juge un dirigeant du parti, Hervé Emmanuel Nkom.
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Les bureaux de vote ont, comme prévu, fermés aux alentours de 18h00 (17h00 GMT), les dépouillements commençant à se faire à la lumière des bougies, a constaté un journaliste de l’AFP présent à Yaoundé. La journée a toutefois été marquée par "quelques petites défaillances en ce qui concerne notamment la compatibilité entre les noms et les numéros qui sont marqués sur les listes électorales", selon un observateur d’Avocats sans frontières (ASF). "Il est presque certain qu’il va y avoir des incidences sur les décomptes finaux", note-t-il. Et de relever : "un certain nombre de libertés qui sont prises avec les exigences de bonnes pratiques. Nous avons par exemple constaté que l’isolement n’était pas total".
"100 ans de pouvoir, président !"
"J’espère seulement que tout va se passer dans la clarté, dans la justice et qu’il n’y aura pas de tromperie", a commenté Marthe Mbazi, une électrice. Après avoir voté à l’école publique du quartier Bastos, Paul Biya, 80 ans, au pouvoir depuis 1982, s’est offert quant à lui un bain de foule dans la capitale. "Notre démocratie gagne en maturité (…) nous sommes en train de faire des progrès gigantesques, et après les municipales et les législatives, nous mettrons en place le Conseil constitutionnel. L’édifice démocratique du Cameroun sera ainsi achevé", a déclaré le président. Ses partisans l’ont acclamé au chant de "100 ans de pouvoir, président !"
Les enjeux du scrutin semblent de fait assez minces. D’un côté, la RDPC entend "consolider la majorité hégémonique dont il dispose depuis les élections de 2007", avec 152 sièges sur les 180 que compte l’Assemblée, explique le politologue Mathias Nguini Owona. De l’autre, les formations d’opposition – dont la principale, le Social Democratic Front (SDF, 16 députés sortants) – ont pour principal objectif de tenir leurs positions à l’Assemblée et dans les municipalités. "Il y aura de manière assez probable une confirmation de l’hyper-domination du RDPC parce que le jeu électoral reste fortement inégalitaire", estime M. Nguini Owona.
L’opposition accuse régulièrement le pouvoir de frauder aux élections, et le RDPC d’utiliser les moyens de l’État pour faire campagne alors que ses adversaires font face à des difficultés financières. Le gouvernement a annoncé un financement de la campagne à hauteur de 1,7 milliard de FCFA (2,5 millions d’euros), dont la moitié a été récemment débloquée et mise à la disposition des partis en lice.
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