Syrie : l’ONU veut faire la lumière sur les présumées attaques chimiques à Damas

L’opposition syrienne a affirmé, mercredi 21 août, que le régime avait tué 1 300 personnes dans une attaque chimique près de Damas. Jeudi matin, les forces loyales au président Bachar al-Assad maintenaient la pression en reprenant ses bombardements sur les faubourgs de la capitale ciblés la veille.

Des enfants qui auraient été victimes de l’attaque chimique près de Damas. © AFP

Des enfants qui auraient été victimes de l’attaque chimique près de Damas. © AFP

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Publié le 22 août 2013 Lecture : 4 minutes.

L’attaque est l’une des plus violentes du conflit syrien entamé il y a plus de deux ans. Mercredi, l’opposition syrienne a affirmé que l’armée de Bachar al-Assad avait utilisé des armes chimiques dans la banlieue de Damas et tué près de 1 300 personnes.

Cette attaque chimique présumée a suscité une vague de condamnations internationales. Réunis mercredi soir à huis clos, les membres du Conseil de sécurité (France, États-Unis, Royaume-Uni, Luxembourg et Corée du Sud) veulent "faire la lumière" sur les accusations d’utilisation d’armes chimiques près de Damas et "saluent la détermination" de l’ONU à enquêter, selon les termes de la présidente du Conseil, l’ambassadrice argentine Maria Cristina Perceval. Aucune déclaration formelle sur la question n’a toutefois été adoptée, la Russie et la Chine y étant opposées.

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De son côté, le régime de Bachar al-Assad a catégoriquement démenti avoir utilisé des armes chimiques près de Damas. Il a rapidement reçu le soutien de l’Iran, son principal allié régional, qui a rejeté jeudi les accusations de l’opposition.

De nombreux pays, ainsi que la Ligue arabe, ont demandé que les experts des Nations-unies, arrivés dimanche en Syrie pour enquêter sur l’usage éventuelle de telles armes dans le conflit, se rendent immédiatement sur les lieux. Les États-Unis ont également réclamé mercredi un "accès immédiat" de l’ONU sur le site de l’attaque, mais ont refusé de parler d’une "ligne rouge" qui aurait été franchie par Damas. Les accusations sur ce massacre présumé, photos de cadavres de jeunes enfants à l’appui, ont été proférées un an et un jour après que le président américain Barack Obama eut prévenu que le recours par le régime syrien à son stock d’armes chimiques constituerait une "ligne rouge".

Dépouilles d’enfants

Des vidéos diffusées par des militants montrent des enfants inanimés, étendus sur le sol, à côté de corps d’hommes qui ne portent aucune trace de sang. Sur l’une d’elles, du personnel soignant tente de mettre aux enfants des masques à oxygène pour les aider à respirer, alors que des médecins essaient de ranimer d’autres qui semblent inconscients. Une autre vidéo montre une fillette d’une dizaine d’années étendue sur une civière et répétant, les mains sur le visage et paniquée : "Je suis vivante, je suis vivante…"

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Un des chefs de l’opposition, George Sabra, a avancé devant la presse à Istanbul le chiffre de 1 300 morts dans plusieurs localités autour de Damas. Pour l’opposant syrien, ce carnage rend impossible toute solution politique. Selon lui, "le régime syrien se moque de l’ONU et des grandes puissances quand il frappe près de Damas avec des armes chimiques alors que la commission d’enquête internationale se trouve à quelque pas des victimes et des régions sinistrées". Il a en outre accusé la communauté internationale de complicité : "L’indécision américaine nous tue. Le silence de nos amis nous tue (…). L’indifférence des Arabes et des musulmans, l’hypocrisie du monde que nous croyions libre, nous tuent".

Le directeur de l’Organisation syrienne des droits de l’homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane, n’a pour sa part pas confirmé l’usage d’armes chimiques. Il a fait état d’au moins 136 morts, tout en assurant ce bilan risquait d’augmenter compte tenu de la violence du bombardement qui a continué dans la journée de mercredi. Selon l’OSDH, l’opération s’est concentrée sur Mouadamiya al-Cham, au sud-ouest de la capitale, que l’armée cherche à reprendre.

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L’armée continue à bombarder

Plusieurs experts se sont montrés prudents sur la présumée attaque chimique. Paula Vanninen, directrice de Verifin, l’Institut finnois pour la vérification de la convention des armes chimiques, a déclaré "n’être pas totalement convaincue" qu’il s’agisse d’une attaque au gaz innervant. "Les personnes qui aident les victimes ne portent pas de vêtements de protection ni de masques et si c’était le cas, elles auraient été contaminées et victimes des mêmes symptômes", a-t-elle relevé sur les vidéos. Pour Gwyn Winfield, directeur du magazine CBRNe Wold, spécialisée dans les armes chimiques, "il n’existe aucune information indiquant que les médecins ou des infirmières ont succombé, ce qui laisse à penser que ce n’est pas ce que nous considérons comme du gaz sarin militaire, mais pourrait être un gaz sarin dilué", a-t-il indiqué à l’AFP

Pour les autorités syriennes, ces accusations sont "nulles, non avenues et totalement infondées", selon un communiqué de l’armée lu par un officier à la télévision. Le ministère syrien des Affaires étrangères a quant à lui estimé que "ces mensonges (…) visent à faire dévier la commission d’enquête (de l’ONU, NDLR) de sa mission". La Russie, autre fidèle allié du régime Assad, a elle aussi accusé l’opposition d’avoir "planifié à l’avance une provocation".

L’accord entre Damas et l’ONU limite la mission d’enquête à Khan al-Assal (près d’Alep), Ataybé, près de Damas, et à Homs (centre). Mais selon un porte-parole de l’ONU à New York, les inspecteurs étaient mercredi "en discussion" avec les autorités syriennes à propos d’autres accusations, dont celles de mercredi.

Jeudi matin, les forces de Bachar al Assad ont repris le bombardement des faubourgs de Damas contrôlés par les rebelles. Des roquettes et des obus de mortier se sont abattus aux premières heures du jour sur Djobar et Zamalka, deux des quartiers où l’attaque au gaz neurotoxiques auraient fait entre 500 et 1300 morts la veille. Le quartier voisin de Kaboun, plus au Nord, et le camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, au Sud, étaient également la cible des bombardements.

(Avec AFP)

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