Une Somalienne accuse des soldats de l’UA de l’avoir violée

Une jeune Somalienne a raconté, à la télévision somalienne, les violences sexuelles que des soldats de l’Union africaine et de l’armée somalienne lui ont infligées. Ces récentes déclarations risquent de ternir la réputation des forces de l’ordre du pays, censées défendre la population somalienne contre le groupe islamiste des Shebab.

Une dame marche à travers le camp de Maslah, en Somalie © AFP

Une dame marche à travers le camp de Maslah, en Somalie © AFP

Publié le 20 août 2013 Lecture : 3 minutes.

Enlevée, droguée et violée de façon répétée, une jeune mère somalienne a détaillé la brutalité des violences sexuelles dont elle accuse des soldats de l’Union africaine (UA) et de l’armée somalienne. "Les soldats m’ont violée (…) j’ai tenté de me défendre mais ils m’ont sévèrement frappée et je me suis évanouie", a raconté à la télévision somalienne, Somali Channel, cette jeune femme d’une vingtaine d’années.

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Après lui avoir bandé les yeux et l’avoir poussée de force dans une voiture, dans la rue de Mogadiscio, trois soldats de l’armée nationale somalienne ont livré la jeune femme à des soldats de la Force de l’Union africaine (Amisom), le jour de l’Aïd-el-Fitr, au camp militaire de Maslah, dans la banlieue nord de la capitale somalienne. Dans ce camp, où un contingent ougandais de l’Amisom est cantonné, la victime a été violée de façon répétée. Les soldats lui ont également injecté des drogues non identifiées.

"Il y avait d’autres femmes dans la pièce (…) l’une d’elles saignait abondamment", a-t-elle ajouté depuis un lit d’hôpital, précisant qu’elle était inconsciente la majeure partie du temps. La Somalienne ne sait pas réellement combien d’hommes l’ont violée avant de l’abandonner dans une rue.

L’Amisom, composée de près de 18 000 hommes, a affirmé prendre très au sérieux ces accusations et a ouvert, le 15 août, une enquête conjointe avec les autorités somaliennes, après la médiatisation de l’affaire. "Des mesures appropriées seront prises une fois les faits établis", a-t-elle assuré dans un communiqué, dont l’image risque d’être sérieusement ternie auprès de la population somalienne qu’elle est censée défendre face aux islamistes, régulièrement accusés de crimes de guerre et de violences contre les civils.

L’organisation islamiste des shebab s’est immédiatement emparée de cette affaire de viols répétés. "Les soldats somaliens enlèvent des filles et les violent, ils les partagent également avec les troupes de l’Amisom", a déclaré le porte-parole des islamistes somaliens, Ali Mohamed Rage, à l’AFP. "Ils sont les vestiges des (milices des) anciens chefs de guerre, ils tuent leurs compatriotes et violent nos filles et nos mères (…) les troupes de l’UA sont brutales", a-t-il expliqué.

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Le viol généralisé à Mogadiscio

L’ONU a récemment estimé que le viol était "généralisé" dans la capitale somalienne, particulièrement dans les camps où s’entassent de nombreux Somaliens déplacés par 20 ans de guerre civile et de chaos. Ces viols sont pour une grande part attribués à l’Armée nationale somalienne (SNA), agrégat hétéroclite d’anciens miliciens de tous bords, régulièrement accusée de violations des droits de l’homme.

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Au cours du seul premier semestre 2012, environ 800 cas de violences sexuelles ont été recensés, rien qu’à Mogadiscio, selon le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) qui décrit les auteurs comme des "hommes non identifiés, armés et vêtus d’uniformes militaires".

"La violence sexuelle en Somalie est l’un des défis les plus urgents et les plus graves dans le domaine des droits de l’homme auquel font face le gouvernement et la population de Somalie", a récemment estimé Nicholas Kay, représentant des Nations unies dans le pays, demandant une enquête "rapide et rigoureuse" concernant les accusations de viol contre les soldats de l’UA.

Selon Human Rights Watch, de nombreuses victimes de viol craignent trop de possibles représailles pour dénoncer leur agression. La justice somalienne est en effet parfois plus prompte à juger les victimes que les coupables. En février, une femme disant avoir été violée par des soldats somaliens, ainsi qu’un journaliste à qui elle s’était confiée, avaient été condamnés à de la prison ferme pour "outrages aux institutions", suscitant une réprobation internationale et l’embarras des autorités somaliennes. Leurs condamnations avaient été annulées lors de procédures d’appel.

Et si le Premier ministre somalien, Abdi Farah Shirdon, s’est dit "profondément préoccupé par ces accusations de viol (…) impliquant des membres de l’Amisom", sa ministre du Développement humain, Mariam Qasim, a minimisé l’ampleur des agressions et préféré dénoncer l’atteinte portée à la réputation de l’armée somalienne.

Mme Qasim a évoqué "une exagération importante et un gonflement" du nombre de violences et estimé "préférable" pour les femmes qui apparaissent dans les médias, pour dénoncer un viol, d’apparaître "abattues", car elles ont perdu leur "dignité".

(Avec AFP)
 

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