Israël – Palestine : négociations un jour, colonisation toujours
Alors que la diplomatie américaine, sous la conduite de John Kerry, tente de relancer le processus de paix au Proche-Orient, le gouvernement israélien continue, de son côté, son bonhomme de chemin. À quelques heures des reprises des négociations, le ministre du logement, Uri Ariel, a ainsi annoncé la construction de milliers de logements supplémentaires en Cisjordanie.
"Nous allons construire des milliers de logements durant l’année qui vient en Judée-Samarie (Cisjordanie). Personne ne dictera là où nous pouvons construire". La déclaration de Uri Ariel, ministre du Logement israélien, dont les propos ont été diffusés par la radio publique, ne laissent place à aucune ambiguïté. Malgré la reprise imminente des négociations israélo-palestiniennes, sous la pression de la communauté internationale et en particulier des États-Unis et de leur émissaire John Kerry, l’État juif n’entend pas bouleverser sa politique de colonisation.
Uri Ariel, membre du Foyer juif, parti nationaliste religieux opposé à la création d’un État palestinien, a précisé que ces constructions auraient lieu dans des colonies isolées et pas seulement dans les blocs d’implantations où vivent la majorité des 360 000 colons installés en Cisjordanie.
Pression interne
Si l’annonce du ministère du Logement n’augure rien de bon pour les négociations à venir, elle n’a cependant rien de surprenante. Ces derniers jours, le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, avait déjà autorisé un coup d’accélérateur dans la colonisation, en approuvant la construction de 2 129 logements à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. Le chef du gouvernement tente ainsi, selon les médias israéliens, d’apaiser l’aile la plus dure de sa coalition, notamment le Foyer juif et les "Faucons" du Likoud, qui font pression pour poursuivre les constructions, afin d’empêcher tout retrait de Cisjordanie et toute concession sur le statut de Jérusalem-Est.
Ce faisant, il a cependant provoqué la colère des Palestiniens. "La colonisation menace de provoquer l’effondrement des négociations avant même qu’elles ne débutent", a notamment regretté, mardi 13 août, un haut responsable palestinien, Yasser Abed Rabbo. Le secrétaire d’État américain John Kerry, qui a répété que les colonies étaient "illégitimes", a de son côté affirmé que le président palestinien Mahmoud Abbas s’était de son côté engagé à poursuivre les négociations.
Le président de l’Autorité palestinienne avait pourtant, en 2010, claqué la porte des pourparlers dans des conditions particulières, à cause de la poursuite de la colonisation israélienne à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. Mahmoud Abbas demandait à l’époque au Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, de prolonger de trois mois le gel des constructions. Il avait, déjà, essuyé un refus catégorique, malgré la pression des États-Unis.
Espoir palestinien
Les négociations sont-elles pour autant perdues d’avance ? Pour le quotidien Le Monde, Mahmoud Abbas a obtenu des "garanties solides" de la part des Américains. Selon le quotidien, "quoi qu’il se passe actuellement dans les colonies", la Cisjordanie – dans ses frontières de 1967 (excepté les grands blocs de colonies juives) – et Jérusalem-Est reviendront au futur État palestinien.
Mardi 13 août, Israël a même procédé, malgré l’opposition de membres du Likoud et de familles de victimes israéliennes, à la libération de 26 prisonniers, accueillis par des scènes de liesse dans les territoires palestiniens. Ceux-ci, pour la plupart arrêtés avant 1994, font partie des 104 détenus qui doivent être relâchés au cours des neuf mois de pourparlers de paix prévus.
Une promesse et quelques détenus relâchés d’un côté. Quelques milliers de logements prévus et une politique de colonisation qui se poursuit, de l’autre. Si Mahmoud Abbas continue d’y croire et que les négociations n’ont pas capotées, les concessions israéliennes semblent bien maigres.
Par Mathieu Olivier
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