Tunisie : Ennahdha favorable à un « gouvernement d’union nationale »

Ennahdha, parti islamiste au pouvoir en Tunisie, a annoncé, mercredi 7 août, accepter la suspension de la Constituante et vouloir des pourparlers avec l’opposition. Une démarche d’ouverture qui intervient après une manifestation massive d’opposants et deux semaines d’une crise politique déclenchée par l’assassinat du député Mohamed Brahmi.

Le chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, à Carthage le 3 août 2013. © AFP

Le chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, à Carthage le 3 août 2013. © AFP

Publié le 8 août 2013 Lecture : 3 minutes.

On s’approche peut-être vers le dialogue en Tunisie. Le parti islamiste Ennahdha, au pouvoir dans le pays, a annoncé, le 7 août, son intention de suspendre la Constituante et d’entamer des discussions avec l’opposition politique. Il a affirmé se soumettait ainsi à la décision du président de l’Assemblée nationale constituante (ANC), Mustapha Ben Jaafar, de geler les travaux de la Constituante jusqu’à l’ouverture de négociations avec les opposants au gouvernement.

"En dépit de nos réserves (…) sur cette initiative, nous espérons qu’elle servira de catalyseur pour que les adversaires politiques s’assoient à la table du dialogue", a annoncé le chef du mouvement, Rached Ghannouchi.

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Le parti islamiste souhaite une "solution consensuelle en cette période sensible" et se dit favorable "à la formation d’un gouvernement d’union nationale comprenant toutes les forces politiques convaincues de la nécessité d’achever le processus démocratique".

Ennahdha fixe aussi un calendrier de reprise des travaux de l’ANC, exprimant le vœu que la Constitution et la loi électorale soient adoptées "avant fin septembre 2013 » et que des élections soient organisées "avant la fin de l’année".

UGTT, l’arbitre

Cette annonce intervient au lendemain d’une manifestation de dizaines de milliers de personnes réclamant la démission du gouvernement, jugé responsable de l’essor de la mouvance jihadiste accusée de l’assassinat de l’opposant Chokri Belaïd, le 6 février, et du député Mohamed Brahmi, le 25 juillet.

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La manifestation était organisée par une coalition hétéroclite d’opposition sans programme politique commun clair, allant de l’extrême gauche au centre droit et soutenue par les partenaires sociaux.

Pour l’heure, les opposants ont refusé l’idée d’un gouvernement d’union dirigée par Ennahdha et militent pour un cabinet de technocrates, mais il existe des désaccords. L’union générale tunisienne du travail (UGTT), la puissante centrale syndicale, et le patronat Utica ne veulent pas d’une dissolution de l’ANC.

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Jusqu’à présent, Ennahdha, arguant de sa légitimité issue de l’élection de la Constituante en octobre 2011, proposait une coalition élargie, un scrutin le 17 décembre, et évoquait un vague projet de référendum de sortie de crise, difficile à mettre en place faute de Constitution et de loi électorale, deux ans et demi après la révolution.

La position qu’adoptera l’UGTT, qui compte un demi-million de membres capables de paralyser le pays, devrait être déterminante. Mustapha Ben Jaafar a d’ailleurs fait du syndicat un arbitre en l’appelant à "réunir autour de la table du dialogue tous les partis". Le secrétaire général de l’UGTT, Houcine Abassi, a déclaré à la radio Express-FM, que son syndicat se réunirait "la semaine prochaine pour adopter les mesures nécessaires à l’intérêt du pays".

Vers une sortie de crise ?

De leur côté, plusieurs dirigeants de l’opposition ont jugé "positive" mais "insuffisante" la décision de suspendre l’ANC. Ils ont promis de poursuivre des actions quotidiennes de contestation.

À Washington, la porte-parole du département d’État, Jennifer Psaki, a plaidé pour le "dialogue" entre les Tunisiens et a "condamné le recours à la violence (…) qui n’a aucune place dans la transition démocratique de la Tunisie".

Des experts estiment que les deux camps en Tunisie devront revoir leurs positions. "La situation est grave mais elle bouge. Comme dans toutes les crises politiques, les deux camps arrivent avec des positions extrêmes antagonistes avant de trouver une solution (…). Ennahdha a déjà commencé à changer sa position", note le politologue Slaheddine Jourchi. D’autant qu’ "aucun parti, Ennahdha compris, ne peut ignorer la position de l’UGTT, qui est aussi celle de l’Utica. Ennahdha ne peut pas continuer sans considérer que les forces (économiques et sociales) du pays ne sont pas d’accord avec lui", souligne l’expert.

(Avec l’AFP)

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