RDC : la Monusco va-t-elle vraiment traquer tous les groupes armés au Kivu ?
La Mission de l’ONU pour la stabilisation du Congo (Monusco) enclenchera-t-elle vraiment, le 1er août, la traque des groupes armés du Nord-Kivu, dont le Mouvement du 23-Mars (M23) ? Probablement pas. En tout cas, pas pour l’instant. L’ultimatum lancé il y a deux jours ne prévoit que la mise en place d’une « zone de sécurité » autour de la ville de Goma. Loin des positions tenues par les groupes armés de la région. Cartographie.
Au Nord-Kivu, la ligne rouge à ne pas franchir est désormais tracée. À partir du 1er août à 16 heures (heure locale), les éléments de la Mission de l’ONU pour la stabilisation du Congo (Monusco) considèrent comme une menace imminente pour les civils « toute personne ne faisant pas partie des forces de sécurité nationales et possédant une arme à feu, à Goma et dans les localités situées au Nord de la ville ». Autrement dit, une « zone de sécurité » est créée sur l’ « axe Goma – Sake [localité située à 20 km de la capitale du Nord-Kivu]» et aucune présence des groupes armés n’est plus tolérée sur la zone considérée.
Carte de la zone de sécurité de la Monusco
Seulement voilà, la « zone de sécurité » ne comprend pas les localités où s’activent les groupes armés et autres milices qui pullulent dans l’est de la RDC. « Ce n’est pas encore véritablement le début de l’opération de la brigade d’intervention internationale destinée à traquer et à neutraliser toutes les forces négatives de la région », confie un responsable de la Monusco. « L’ultimatum lancé par la mission onusienne pour appeler toute personne détenant une arme entre Goma et Saké à venir la déposer à son siège, ne constituait donc pas une déclaration de guerre contre le Mouvement du 23-Mars (M23) », principal groupe rebelle du Nord-Kivu, ajoute-t-il.
Depuis près de deux décennies, «une trentaine de groupes armés sont actifs au Nord-Kivu. Mais les porteurs illégaux d’armes ne sont pas vraiment présents dans la zone de sécurité établie par la Monusco dont les limites sont loin des positions contrôlées par le M23 » et les autres milices locales ou étrangères, souligne Fidel Bafilemba, analyste à l’ONG Enough projet.
Carte de localisation des groupes armés actifs dans le Nord-Kivu
(Cliquez sur les pictos pour plus d’informations)
Il s’agit en fait d’une « mesure préventive », reconnaît le général Dos Santos Cruz, commandant des troupes de la Monusco. Une façon pour les Casques bleus de mettre à l’abri « plus d’un million de civils [qui] vivent dans la région relativement étroite de Goma et Sake, ainsi que le long de la route qui relie ces deux localités où sont installés, entre autres, les camps des déplacés de Mugunga qui abritent provisoirement environ 70 000 personnes déplacées par le conflit », précise un communiqué de la mission onusienne.
Kinshasa applaudit, le M23 "non concerné"
À en croire la Monusco, la « zone de sécurité » permettra ainsi de « repousser hors de Goma » toutes les « menaces indirectes » des rebelles sur la ville. Si elle ne comprend pas, pour l’instant, les territoires contrôlés par les groupes armés, la Monusco n’exclut pas d’ « élargir ce périmètre de sécurité » ailleurs dans le Nord-Kivu.
Kinshasa se félicite de la décision de la Monusco. Une initiative qui «s’inscrit dans le droit fil des recommandations de la résolution 2098 du Conseil de sécurité [instituant la brigade d’intervention internationale dans l’est de la RDC, NDRL] » et qui pourra ainsi « mettre fin au calvaire » des Kivutiens, commente Lambert Mende, porte-parole du gouvernement congolais.
Du côté rebelle, on ne se sent pas directement visé. « Nous occupons aujourd’hui les mêmes positions que celles que nous ont reconnues les chefs d’État de la région, après notre retrait de la ville de Goma en novembre dernier », argue Amani Kabasha, le porte-parole du M23. « Nous ne pouvons pas imaginer que la Monusco nous attaque alors que nous sommes engagés dans les pourparlers avec le gouvernement congolais à Kampala, comme recommandé par la communauté internationale », renchérit-il.
Sur la ligne de front, une trêve s’observe depuis quelques jours, mais la tension reste vive dans les deux camps. En cas de reprise des hostilités, « la Monusco n’hésitera pas à s’engager davantage pour traquer et neutraliser définitivement le M23, responsable de plusieurs exactions contre les civils, indique une source proche de la mission onusienne sur place. La zone de sécurité n’est qu’une étape ». Une première.
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Par Trésor Kibangula
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