Grève générale après l’assassinat de Mohamed Brahmi en Tunisie
Le député de Sidi Bouzid et opposant de gauche, Mohamed Brahmi, a été abattu par des inconnus au sortir de son domicile, jeudi 25 juillet. La Tunisie est sous le choc. Une grève générale suivie de manifestations étaient attendues ce vendredi.
Six mois après l’assassinat de Chokri Belaïd, celui d’un autre opposant de gauche, Mohamed Brahmi (ci-dessous), ébranle le processus démocratique tunisien. Le député de Sidi Bouzid, du Mouvement du peuple (coalition du Front populaire), a été abattu de onze balles à bout portant devant son domicile dans la région de l’Ariana, près de Tunis, le 25 juillet, jour de la fête de la République dans le pays.
« Son corps a été criblé de balles devant son épouse et ses enfants », a déclaré à la radio, Mohsen Nabti, membre du bureau politique du Mouvement populaire. L’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), principale centrale syndicale, a appelé à une grève générale pour protester contre ce deuxième assassinat politique. En conséquence, la compagnie Tunisair et sa filiale Tunisiar Express ont annoncé l’annulation de tous les vols programmés vendredi.
Mohamed Brahmi, 58 ans, était très critique envers les islamistes. Le 7 juillet dernier, il avait même démissionné de son poste de secrétaire général du Mouvement populaire, parti qu’il a fondé, en déclarant que sa formation avait été infiltrée par les islamistes.
"J’accuse Ennahdha"
La famille de la victime et de nombreux militants, qui manifestaient jeudi soir devant le ministère de l’Intérieur et en province, notamment à Sidi Bouzid, région natale du député, ont d’ailleurs clairement pointé du doigt les islamistes au pouvoir d’être impliqués dans l’assassinat. « J’accuse Ennahdha », a notamment déclaré, en pleurs, Chhiba Brahmi, la sœur du défunt, sans avancer de preuves.
Le chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, a rejeté ces accusations, comme il avait rejeté celles concernant l’affaire Chokri Belaïd. Dans une déclaration à l’AFP, il a affirmé que les commanditaires voulaient mener le pays vers une « guerre civile » et « perturber la transition démocratique ». Même son de cloche du côté du président tunisien Moncef Marzouki qui, dans une allocution télévisée, a parlé d’une « deuxième catastrophe nationale » après la mort de Belaïd.
« Les responsables de ce drame veulent montrer que la Tunisie (…) peut basculer elle aussi (dans la violence), ils veulent démontrer que le Printemps arabe a échoué », a-t-il déclaré en référence à l’Égypte où des violences meurtrières ont lieu depuis le renversement par l’armée le 3 juillet du président islamiste.
Manifestations anti-islamistes
Pendant ce temps, la colère grondait dans la rue. « La Tunisie est libre, dégagez les Frères », ont scandé des manifestants à Tunis, en référence aux relations étroites entre Ennahdha et la confrérie des Frères musulmans en Égypte. « Ghannouchi assassin », « Ennahda doit tomber aujourd’hui », « l’Assemblée constituante doit être dissoute », ont-ils crié sur l’avenue Habib Bourguiba, dans le centre-ville aussitôt la nouvelle de l’assassinat connue.
Après une accalmie à l’heure de rupture du jeûne de ramadan, les manifestations ont repris dans la soirée et la police a tiré des gaz lacrymogènes quand ils ont voulu installé une tente pour un sit-in « jusqu’à la chute du pouvoir islamiste ». À Sidi Bouzid, les manifestants ont envahi le siège du gouvernorat et incendié des bureaux, selon un journaliste de l’AFP. Là aussi, la police a dispersé les manifestants à coup de bombes lacrymogènes. Dans la même région, à Menzel Bouzaïane, les manifestants ont saccagé les locaux du parti islamiste en criant « À bas les obscurantistes, Ennahdha et salafistes », en référence aux groupes islamistes radicaux.
Le chef du gouvernement Ali Larayedh a appelé les Tunisiens au calme, soulignant que l’assassinat ne devait « pas être exploité pour semer le trouble et inciter les Tunisiens à s’entretuer ». À l’étranger, la France, les États-Unis, la Suisse, l’Algérie et le Parlement européen ont dénoncé l’assassinat et la Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme Navi Pillay a demandé « une enquête rapide et transparente ».
(Avec AFP)
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