Les trois maux de la présidentielle malienne

Tensions à Kidal, risques d’attaques terroristes, retards dans la distribution des cartes d’électeurs : à moins d’une semaine du premier tour de l’élection présidentielle malienne, le dimanche 28 juillet, plusieurs points noirs pourraient sérieusement entraver le bon déroulement du scrutin.

Une patrouille de l’armée malienne à Gao, le 8 février 2013. © AFP

Une patrouille de l’armée malienne à Gao, le 8 février 2013. © AFP

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Publié le 22 juillet 2013 Lecture : 4 minutes.

Dioncounda Traoré et Ban Ki Moon le répètent régulièrement : l’élection présidentielle malienne, dont le premier tour se tiendra dimanche prochain, ne sera pas parfaite. Mais pour le président malien de transition et le secrétaire général des Nations unies, il faudra aussi que, malgré d’éventuels défauts ou fraudes, les candidats acceptent les résultats.

À moins d’une semaine de cette élection censée remettre le Mali sur la voie de la paix et de la stabilité, les problèmes non résolus sont encore nombreux. Outre plusieurs difficultés très « concrètes » qui pourraient accroître l’absention, comme le fait que le scrutin se déroule en pleine période de ramadan et de saison des pluies, trois grandes interrogations entourent cette présidentielle.

  • La situation explosive à Kidal
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Malgré l’optimisme affiché par différents responsables maliens, la situation est encore loin d’être pacifiée à Kidal. À tel point que certains doutent désormais ouvertement que le scrutin puisse y avoir lieu dimanche prochain. La semaine dernière, des violences communautaires entre Noirs et Touaregs ont fait quatre morts, de nombreux blessés, et d’importants dégâts matériels dans la ville. Ce week-end, le bref enlèvement de cinq agents électoraux et d’un élu à Tessalit, au nord de Kidal, a fait un peu plus monter la tension dans la région.

Après plusieurs semaines de négociations difficiles, le gouvernement malien de transition et les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) étaient parvenus à un accord préliminaire de paix, signé le 18 juin à Ouagadougou. Le texte instaurait notamment le cantonnement des combattants du MNLA et le retour à Kidal de l’armée et de l’administration malienne. Là aussi, tout ne s’est passé comme prévu. Le gouverneur de la ville, le colonel Adama Kamissoko, a été contraint de faire demi-tour une première fois avant de revenir définitivement à son poste. Quant aux soldats de l’armée malienne, c’est peu dire qu’ils ont été bien accueillis par certains habitants…

Seul signe positif : des représentants du MNLA et d’un autre groupe touareg, le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), ont été reçus dimanche à Bamako par le président de transition Dioncounda Traoré. D’après un participant à la réunion, le dialogue a tourné autour des concepts de « paix » et de « réconciliation ».

  • La menace jihadiste

L’intervention militaire franco-africaine déclenchée en janvier a permis de mettre en déroute les groupes jihadistes alliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) qui occupaient le Nord du Mali. Les grandes villes de la région, comme Gao ou Tombouctou, ont été libérées. La plupart des bases arrières de ces groupes ont été démantelées. Ce fut notamment le cas du sanctuaire d’Aqmi dans le massif des Ifoghas, où les forces françaises et tchadiennes ont découvert un véritable arsenal de guerre. 

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À première vue durement touchés, les anciens maîtres du Nord-Mali n’en restent pas moins menaçants. Les plus fanatisés d’entre eux, qui ont décidé de poursuivre le jihad, se sont repliés dans l’immensité du Sahara. Une partie d’entre eux aurait notamment trouvé refuge dans le sud de la Libye, bénéficiant du chaos sécuritaire de l’après Kadhafi et d’alliances avec les tribus locales. Ce serait le cas du chef jihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar, responsable de la sanglante prise d’otages sur le site gazier de Tiguentourine, dans le sud de l’Algérie, en janvier dernier. Un temps donné pour mort par les Tchadiens, le terroriste algérien a montré qu’il était encore bien présent sur le front du jihad au mois de mai dernier, revendiquant l’organisation de deux attaques simultanées – et meurtrières – à Arlit et Agadez, dans le nord du Niger.

Au Nord-Mali, la menace d’attentats-suicides est aussi bien présente. Ces derniers mois, plusieurs kamikazes se sont fait exploser à Gao et Tombouctou, mais aussi à Kidal, visant généralement des postes de l’armée malienne. Pratiquement impossible à identifier, certains terroristes ont échappé aux services de sécurité en se fondant dans la population locale. Pour eux, comme pour d’éventuels commandos venus de plus loin, l’élection présidentielle est une occasion symbolique pour montrer qu’ils n’ont pas rendu les armes. Attentats, attaques kamikazes, assauts de bureaux de vote : de nombreux scénarios sont possibles et pris très au sérieux par les autorités maliennes et leurs alliés. Le jour J, un dispositif sécuritaire renforcé sera assuré autour des locaux électoraux par les forces maliennes et les casques bleus de la Mission intégrée des Nations unies pour le Mali (Minusma). 

  • La distribution des cartes électorales
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Autre interrogation non résolue de la présidentielle malienne : la distribution des cartes électorales Nina, sésame obligatoire pour tout citoyen souhaitant se rendre aux urnes. Il existe un risque important qu’une partie des 6 830 000 cartes ne soient pas distribuées à temps dans différentes régions du pays. Le 18 juillet, un document officiel des organisateurs de l’élection soulignait que « le taux de remise des cartes » était « d’environ 60% ».

La principale difficulté est le cas complexe des déplacés et réfugiés originaires du Nord-Mali. Depuis le début de la crise malienne, en janvier 2012, environ 350 000 personnes ont fui vers la partie sud du pays et 175 000 autres se sont réfugiées dans les pays voisins (Mauritanie, Burkina, Niger). Parmi elles figurent des milliers d’électeurs qui ont fait leur demande de carte Nina. Véritable défi logistique, l’acheminement des documents officiels vers ces citoyens au statut particulier a pris du retard. Pour le moment, aucun des responsables administratifs interrogés par Jeune Afrique n’était en mesure d’indiquer combien de cartes électorales avaient été distribuées aux déplacés et réfugiés. Signe de ce capharnaüm électoral, les fameuses cartes continueront à être distribuées jusqu’au samedi 27 juillet, veille du premier tour de la présidentielle. 

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Benjamin Roger 

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