Éric Lembembe, militant pour les droits des homosexuels, torturé et tué au Cameroun
Au Cameroun, l’homosexualité est passible de cinq ans de prison. Mais pour certains, se battre pour les droits des minorités sexuelles peut coûter encore plus cher. Lundi 15 juillet, Éric Lembembe, militant de la cause homosexuelle et journaliste, a été retrouvé mort à son domicile de Yaoundé. Il avait auparavant été torturé.
Le cou et les pieds brisés. Le visage et les mains brûlés par un fer à repasser. Lundi 15 juillet, le militant pour les droits des homosexuels au Cameroun, Éric Lembembe, a été retrouvé mort à son domicile de Yaoundé. Proche collaborateur de Human Rights Watch, qui a annoncé son décès, il était reconnu au Cameroun pour son combat en faveur des minorités sexuelles et présidait la Fondation camerounaise pour le Sida, organisation qui luttait contre le VIH et pour les droits LGBT.
« Nous condamnons cet acte terrible et encourageons les autorités camerounaises à diligenter rapidement une enquête et à poursuivre les responsables de sa mort », a aussitôt réagi Marie Harf, porte-parole du département d’État américain. Neela Ghoshal, chercheur sur les droits des minorités sexuelles à Human Rights Watch, a quant à elle souhaité que la police n’ait « pas de repos tant que les coupables de cet horrible crime ne seront pas face à la justice ». « Le président Biya doit sortir de son silence au sujet des violentes homophobes au Cameroun et condamner publiquement cette attaque », a-t-elle ajouté.
"Tu sauras ce que ça fait"
Le contexte camerounais n’incite pas à l’optimisme. Le 26 juin dernier, le siège de l’ONG Alternatives Cameroun, qui prodiguait des soins aux malades du sida, a été incendié, à Douala. Quelques jours plus tôt, dans la nuit du 16 au 17 juin 2013, c’est le cabinet de l’avocat Michel Togué qui avait été cambriolé, des personnes non identifiées ayant emporté avec elles son ordinateur portable et son passeport.
"L’intervention des pédés blancs ne les sauvera pas."
Régulièrement victime d’actes d’intimidation le menaçant de l’enlèvement de ses enfants et le qualifiant de « pédé », Me Togué a préféré envoyer sa famille hors du pays en 2012. « Choisis celui de tes enfants que nous allons transformer en pédé comme toi », a-t-il notamment reçu, « là, tu sauras ce que ça fait de les défendre. (…) Même l’intervention des pédés blancs ne les sauvera pas. » Tout comme sa consœur Alice Nkom, il a régulièrement déposé des plaintes auprès de la police. Toutes sont restées sans suite.
Si aucun suspect n’a été appréhendé dans chacune de ces affaires, la justice camerounaise s’est en revanche distinguée dans l’application de la loi contre l’homosexualité. En décembre dernier, elle a confirmé en appel la peine de 36 mois de prison infligée à Roger Mbédé, qui avait révélé son amour pour un autre en lui envoyant un simple SMS. Les autorités camerounaises savent, parfois, être intransigeantes.
Par Mathieu Olivier
Pour aller plus loin :
> Alice Nkom : "Qu’on ne vienne pas me dire que le respect des minorités sexuelles n’est pas africain" (Vidéo)
> Homosexualité : en Afrique, c’est souvent la case prison (carte interactive)
> Roger Mbédé : "Il n’y a toujours pas de place pour les homosexuels au Cameroun" (Interview)
> Cameroun : poursuites injustes pour homosexualité (vidéo Human Rights Watch)
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