Les journalistes burkinabè protestent contre « l’immixtion » du pouvoir dans leur travail

Pour la première fois dans l’histoire du Burkina, les journalistes des médias publics ont manifesté devant leur ministère de tutelle pour dénoncer des pressions dans le traitement de l’information relative à l’opposition au président Blaise Compaoré. Le gouvernement dément toute volonté de manipulation.

Le président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, le 18 juin 2013 à Ouagadougou. © Ahmed Ouoba

Le président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, le 18 juin 2013 à Ouagadougou. © Ahmed Ouoba

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 16 juillet 2013 Lecture : 2 minutes.

C’est une première dans l’histoire du pays et peut-être le signe que la peur se dissipe. Mardi 15 juillet à Ouagadougou, ils étaient plusieurs centaines de journalistes des médias publics à lever la voix contre ce qu’ils considèrent comme des pratiques contraires à l’éthique de leur métier. Rassemblés en « sit-in » devant le ministère de la Communication (qui jouxte la télévision nationale) à l’appel du Syndicat autonome des travailleurs de l’information et de la culture (Synatic) et de l’Association des journalistes du Burkina Faso (AJB), rédacteurs, vidéastes et techniciens ont dénoncé « la censure des articles et des reportages dans les rédactions » et « l’ingérence [du pouvoir] dans [leur] travail ».

Selon les protestataires, ce sont surtout les informations concernant l’opposition au président Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 26 ans, qui font l’objet des pressions des autorités. Le secrétaire général du ministère de la Communication, Adama Barro, est en particulier accusé par le Synatic et l’AJB d’être intervenu « directement » pour « charcuter » un reportage de la télévision nationale sur une marche organisée par l’opposition, le 29 juin dans la capitale, pour protester contre le futur Sénat, suspecté d’avoir été créé pour faire réviser la Constitution dans le but de permettre à Compaoré de se représenter en 2015.

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"Je n’ai jamais donné d’instruction à personne"

« Je n’ai jamais donné d’instruction à personne », s’est défendu Adama Barro. « Nous opérons un suivi au niveau des médias publics en leur disant : "restez professionnels". On ne leur a pas demandé d’être des griots du pouvoir ou du gouvernement mais de ne pas être non plus les griots de l’opposition », a-t-il indiqué. Les manifestants lui ont remis une liste de doléances, dans laquelle ils exigent également de meilleures rémunérations. « Nous allons maintenir la mobilisation jusqu’à leur satisfaction concrète », a assuré Sidiki Dramé, responsable du Synatic, dénonçant la « censure et l’autocensure » dans les rédactions.

Quoi qu’il en soit, le mouvement de grogne a été suffisamment important pour provoquer une réaction énergique du gouvernement. « Sur le point relatif à l’immixtion des autorités du ministère [de la Communication, NDLR] dans le traitement de l’information, à aucun moment une telle démarche n’a été entreprise par mon département », a déclaré en conférence de presse le ministre concerné, Alain Édouard Traoré, également porte-parole de l’exécutif.

« Nulle part il ne s’est opéré une censure sur aucun élément de reportage, et l’accusation » est « gratuite et sans fondement », a-t-il ajouté, jugeant toutefois que sa responsabilité était de « veiller au respect de la ligne éditoriale, de l’éthique et de la déontologie. (…) Face au traitement des sujets sensibles, des orientations sont toujours données aux responsables des structures à tous les niveaux pour observer scrupuleusement le professionnalisme, notamment l’équilibre dans le traitement de l’information, et éviter les connivences en tous genres », a souligné le ministre.

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(Avec AFP)

 

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