Côte d’Ivoire : Pokou, le premier long-métrage d’animation ouest-africain est né
C’est un événement de taille : « Pokou, Princesse ashanti », le premier film ouest-africain d’animation, qui plus est en 3D, sort en Côte d’Ivoire, samedi 5 juillet. Interview du réalisateur, un ancien collaborateur du journal satirique « Gbitch », Abel Kouamé.
Pokou, c’est l’histoire d’une princesse du 18e siècle qui assiste à la division du royaume ashanti. Préférant l’exil à l’affrontement, elle part avec une partie de la population vers le centre de l’actuelle Côte d’Ivoire. Abel Kouamé, le réalisateur de ce premier film ouest-africain d’animation en 3D, qui sort le 6 juillet à Abidjan, revient sur les origines de son projet.
Jeune Afrique : Pourquoi avoir choisi de raconter cette histoire ?
Abel Kouamé : Cette histoire est racontée dans les manuels scolaires, donc elle est connue des enfants. Nous avons voulu mettre l’accent sur ce qui n’est pas dans les livres, c’est à dire les intrigues qui auraient pu se dérouler dans ce royaume. On y a mis beaucoup d’humour, de magie, d’imaginaire.
À la base, je suis auteur de bande dessinée et, de 2008 à 2009, je dessinais déjà Abla Pokou, dans le journal satirique Gbich. Puis en 2009, je me suis lancé dans l’animation et j’ai pensé à transformer cette BD en film d’animation. À partir de 2011, nous avons accéléré les choses, nous avions une équipe aguerrie, prête à s’attaquer à un long-métrage.
La bande-annonce de Pokou, princesse ashanti :
Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans la réalisation de ce film ?
Le principal frein a été économique. Nous n’avons pas eu de financements, les deux ans de production ont été réalisés sur fonds propres. Mais nous avons cru en ce projet, convaincus qu’on pouvait créer un film intéressant. Et nous ne sommes pas trompés, car le rendu est là.
Sinon, nous avons dû adapter cette production à nos réalités. Nous sommes une petite équipe, dix personnes. En Côte d’Ivoire il existe très peu d’animateurs 3D (ceux qui créent les comportements, les volumes des personnages et des décors, NDLR), donc nous avons utilisé un style d’animation très simple, car l’objectif est de raconter cette histoire de manière à ce qu’elle soit comprise facilement.
À Abidjan, il n’ y a pas d’école spécialisée en animation, et donc à plus forte raison en animation 3D. Nous avons appris sur le tas. Après des études classiques aux beaux-arts, certains d’entre nous se sont auto-formés, via des tutoriels sur Internet. Puis nous avons peaufiné notre formation en France. De retour en Côte d’Ivoire, nous avons recruté des infographistes, que nous avons formés pour les besoins de ce film.
Que représente la sortie de Pokou ?
C’est une grande avancée car il n’y a jamais eu de production de ce genre en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’Ouest. Donc ça suscite beaucoup de curiosité, à la fois ici mais aussi à l’étranger. Cela suscite également de la fierté. Les gens se rendent compte que ce genre de production est réalisable en Côte d’Ivoire. Nous sommes satisfaits de l’engouement autour de ce film, cela nous donne envie de continuer dans cette lancée, surtout que nous avons déjà eu des pré-achats en Côte d’Ivoire et en Europe, pour des diffusions au cinéma, à la télévision et dans les festivals.
Quels sont les autres projets d’Afrika Toon, la société de production de Pokou ?
Outre une série de dessins animés pour la télévision ivoirienne, nous travaillons actuellement sur un autre long métrage, Soundiata Keïta. C’est un personnage très connu en Afrique de l’ouest, il est le fondateur de l’empire du Mali au 13e siècle. C’est l’histoire d’un prince infirme destiné à un grand avenir. Là encore, il y a aura beaucoup d’intrigues, autour de l’accession de ce prince au trône.
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Propos recueillis par Aurélie Fontaine, à Abidjan.
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