Tunisie : la filière aéronautique reste confiante

En Tunisie, malgré un contexte social et politique tendu, les industriels du secteur aéronautique continuent de saluer les atouts du pays et se disent prêts à reprendre leurs investissements si la situation s’améliore.

L’effectif d’Aerolia, de 650 salariés, n’a presque pas bougé depuis un an. © Nicolas Fauqué

L’effectif d’Aerolia, de 650 salariés, n’a presque pas bougé depuis un an. © Nicolas Fauqué

Julien_Clemencot

Publié le 10 septembre 2013 Lecture : 3 minutes.

Depuis l’assassinat du député Mohamed Brahmi fin juillet, Christian Cornille, PDG d’Aerolia, observe le climat tunisien avec une certaine inquiétude. Pour preuve, la filiale du groupe Airbus a gelé ses projets d’investissement dans le pays. Après avoir consacré 30 millions d’euros à son implantation à El-Mghira, la direction met le pied sur le frein. L’embauche prévue d’une centaine de personnes est suspendue, et l’effectif, de 650 salariés, n’a presque pas augmenté depuis un an. Plus que les négociations entre le pouvoir et l’opposition, ce sont les attentes sociales nées de la révolution qui donnent des sueurs froides au patron. « Il y a des pays où les gens sont attentifs à la croissance. En Tunisie, la politique reste au coeur des préoccupations, au détriment des réalités économiques », regrette Christian Cornille.

« La Tunisie n’est pas un pays « low cost », mais « best cost ». On y retrouve la même qualité qu’en France ou aux États-Unis, ce qui a un prix. »

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Un constat partagé par Daniel Bourgeois, directeur général de Latelec, filiale du groupe Latécoère. Marquée par une grève importante en 2012, l’entreprise a réduit son effectif de 200 personnes, alors qu’elle devait initialement en recruter une centaine. Pour rassurer ses clients, Airbus et Dassault Aviation, Latelec a transféré une partie de sa production au Mexique.

Compétitivité

Pourtant, comme Christian Cornille, Daniel Bourgeois reste persuadé du potentiel industriel de la Tunisie : « Si la crise politique se dénoue et que le climat social s’apaise, nous reprendrons nos investissements. » À ses yeux, le pays reste très compétitif grâce à la qualité de son système éducatif et à l’absence de barrière linguistique pour les sociétés françaises – qui composent l’essentiel du secteur aéronautique. « Il est facile d’y opérer des transferts de technologies », confirme Christian Cornille. Et ce ne sont pas les augmentations de salaires, de 15 % en moyenne ces trois dernières années, qui vont décourager les industriels.

« La Tunisie reste attractive. Ce n’est pas un pays « low cost », mais « best cost ». On y trouve la même qualité qu’en France ou aux États-Unis, ce qui a un prix », juge Gaby Lopez, directeur général de Zodiac Aerospace Tunisie, le plus important employeur du secteur avec 2 400 salariés. Pour ce dirigeant, également président du Groupement des industries tunisiennes aéronautiques et spatiales (Gitas), la plupart des conflits sociaux se sont produits dans les entreprises qui n’appliquaient pas les conventions collectives. « Depuis la révolution, le contexte politique n’a pas pesé sur notre activité. C’est aussi le cas de la majorité des 41 sociétés du Gitas. En 2013, le nombre d’heures de production de Zodiac a même augmenté de 20 % », poursuit Gaby Lopez.

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Soutien des pouvoirs publics

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Tous les dirigeants interrogés indiquent en outre avoir conservé le soutien des pouvoirs publics, même si les islamistes d’Ennahdha n’ont pas toujours montré les compétences nécessaires en matière de politique industrielle. « Après l’attentisme du précédent gouvernement, la situation s’est améliorée avec l’arrivée de Medhi Jemaa au ministère de l’Industrie. Personne ne veut nous voir partir. D’autant qu’en plus des ouvriers nous embauchons des ingénieurs », indique un patron du secteur.

Depuis la révolution, seul Slicom, spécialisé dans les pièces de structures aéronautiques, a quitté la Tunisie dans le cadre de son rachat. Venir s’y installer est en revanche sans doute plus difficile. L’un des fournisseurs d’Aerolia a ainsi vu son projet tomber à l’eau, car sa banque jugeait le risque trop important. La dégradation de la note souveraine du pays par Standard & Poor’s, le 16 août, ne devrait pas améliorer la situation.

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