RDC : vague d’indignation après l’arrestation d’étudiants congolais à Jalandhar, en Inde

L’arrestation de 21 étudiants congolais dans le Penjab, État situé dans le nord de l’Inde, ne passe pas à Kinshasa. Certains Kinois ont essayé, le 19 juin, de s’en prendre aux commerces des Indiens et Pakistanais en signe de protestation. Les réseaux sociaux s’enflamment. La RDC appelle au calme, tout en exigeant la « libération sans condition » de ses ressortissants.

Tranfert des étudiants congolais devant la justice à Jalandhar, nord de l’Inde. © Capture d’écran/JA

Tranfert des étudiants congolais devant la justice à Jalandhar, nord de l’Inde. © Capture d’écran/JA

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Publié le 19 juin 2013 Lecture : 3 minutes.

De Jalandhar à Kinshasa, la tension monte. En l’absence du chef de la diplomatie congolaise, Raymond Tshibanda, qui se trouve en mission à l’étranger, c’est son adjoint, le vice-ministre Célestin Tunda qui s’est chargé, le 18 juin, de convoquer l’ambassadeur d’Inde en RDC pour lui remettre un « message de réprobation et de condamnation » du gouvernement congolais à l’attention des autorités indiennes après l’arrestation, trois jours plutôt, de 21 ressortissants congolais à Jalandhar, dans le nord de l’Inde.

« Nous avons été singulièrement scandalisés d’apprendre ce qui s’est passé dans le Penjab, en Inde. Des jeunes étudiants congolais ont été interpellés par la police indienne alors qu’ils voulaient avoir des explications après l’arrestation d’un de leurs camarades qui venait d’être tabassé par un groupe d’Indiens », explique Lambert Mende, le porte-parole du gouvernement congolais. « Nous avons ainsi exigé leur libération sans condition, la présentation de tous ces jeunes devant un médecin pour établir les voies de fait qu’ils disent avoir subies et l’ouverture d’une enquête pour établir les responsabilités », renchérit le ministre.

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Pas suffisant pour calmer les esprits à Kinshasa. Un groupe de kinois s’est attaqué, le 19 juin, aux commerces des Indiens et Pakistanais dans la capitale congolaise. « Tant que nos frères seront détenus illégalement chez eux [en Inde, NDRL], ils [les commerçants indiens] ne seront pas tranquilles chez nous », peste un habitant de la capitale congolaise en colère. La police a été rapidement déployée pour disperser les manifestants.

« Les Indiens qui travaillent en RDC n’ont rien à voir avec les incidents de Jalandhar », rappelle Lambert Mende qui condamne « toute attitude d’hostilité envers les Indiens et Pakistanais », appelant également la population congolaise au « calme ».

"Boycott" et sit-in

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Entretemps, des appels de « boycott des produits indiens » gagnent peu à peu les réseaux sociaux. Un hashtag pour relayer le message a été lancé sur Twitter et un événement Facebook projette d’organiser un sit-in devant l’ambassade d’Inde à Kinshasa. « Nous ne cautionnons pas les actes de violence contre les Indiens dans la capitale [Kinshasa, NDRL], nous appelons simplement à une manifestation pacifique, le 20 juin, devant la représentation indienne à Kinshasa pour dénoncer une arrestation de masse et une justice à deux vitesses », argue Richard Kiyambu, un des initiateurs de l’opération.

Pour éviter tout dérapage et tirer les choses au clair, l’ambassadeur congolais basé à New Delhi a été dépêché dans le Penjab. Car sur place, les versions de l’incident diffèrent. Qu’est-ce qui a réellement entraîné cette arrestation en masse des étudiants congolais ? La police de Jalandhar parle d’un refus d’obtempérer à un contrôle d’identité devant un arrêt de bus où un habitant du quartier avait été victime, la veille, du vol de ses bagages. Au lieu de présenter leurs documents, les 21 étudiants congolais aux arrêts – qui se seraient d’abord fait passer pour des ressortissants de différents pays africains – auraient agressé les forces de l’ordre. Après leur audition, ils ont été placés en détention provisoire d’une durée de 14 jours, selon les sources policières indiennes.

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« Du mensonge pur et simple », rétorque, de son côté, Christophe Okito qui se présente comme le représentant des étudiants africains en Inde, joint au téléphone par Jeune Afrique. Selon lui, tout est parti d’une « provocation » d’un groupe d’Indiens. « À bord de leur voiture, ils ont failli marcher sur Eddy Kabangele – un étudiant congolais – qui traversait la route pour aller attendre le bus, raconte-t-il. Puis, sept Indiens sont descendus de la voiture et l’ont poursuivi et tabassé à l’aide de battes de cricket. Alertés, les autres Congolais et Africains du coin sont arrivés sur le lieu mais en retard : Eddy était déjà ensanglanté ». Et d’ajouter, dépité : « La police n’a arrêté que les Noirs ».

Christophe Okito dénonce ces « incidents aux relents racistes » qui sont devenus, depuis quelques temps, « le quotidien des étudiants africains en Inde ». Une situation qui n’est pas sans rappeler les tensions entre la police chinoise et la communauté africaine à Guangzhou, tout près de Shangaï en 2009, après la mort d’un Nigérian lors d’échauffourées avec les forces de l’ordre. « Ici, les Noirs, surtout les Nigérians, sont tous catalogués trafiquants de drogue et voleurs », confirme Trésor Biantuadi, un Congolais vivant depuis 2011 à Changsha.

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Par Trésor Kibangula

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