Mali : entre le gouvernement et les Touaregs, les négociations s’annoncent houleuses
Alors que l’armée malienne resserre son étau autour de Kidal, le gouvernement et les groupes armés touaregs se retrouvent vendredi 7 juin à Ouagadougou pour des négociations en vue de l’élection présidentielle de juillet. Les tractations pourraient durer tout le week-end.
Les pourparlers entre les autorités maliennes et les groupes armés touaregs, Mouvement de libération national de l’Azawad (MNLA) en tête, doivent débuter ce vendredi à 17 heures (locales et GMT) à Ouagadougou, au Burkina Faso.
Ces discussions débutent seulement deux jours après que l’armée a délogé les combattants du MNLA de la localité d’Anefis, à une centaine de kilomètres au sud de Kidal, ville occupée par les rebelles touaregs que Bamako entend aussi récupérer.
Médiateur dans la crise malienne au nom de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le président burkinabè Blaise Compaoré ouvrira les négociations en recevant les représentants du pouvoir malien et des mouvements touaregs.
La délégation de Bamako est conduite par l’ancien ministre Tiébilé Dramé, conseiller spécial du président par intérim Dioncounda Traoré pour le nord du Mali. Le MNLA et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad, autre organisation touarègue, feront bloc au sein d’une délégation conjointe, déjà sur place. Les tractations devraient se poursuivre jusqu’à lundi.
Offensive surprise de l’armée malienne
Pour la médiation et la communauté internationale, l’enjeu est de trouver un compromis pour permettre aussi à Kidal d’organiser la prochaine présidentielle prévue le 28 juillet, une élection réclamée avec insistance par les partenaires du Mali, notamment la France. Or le MNLA et les autres groupements touaregs ont jusqu’à présent refusé à l’armée et à l’administration maliennes d’entrer dans la ville, exigeant la sécurisation du scrutin par la future force de l’ONU attendue en juillet.
Les mouvements touaregs armés occupent Kidal, berceau de cette minorité, depuis la fin janvier 2012. Depuis l’intervention militaire franco-africaine qui a mis en fuite les groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda, environ 200 soldats français sont stationnés à l’aéroport de la ville.
Les groupes touaregs, qui furent un temps alliés aux jihadistes, ont opposé jeudi une fin de non-recevoir à la France en faisant savoir qu’ils ne déposeraient pas les armes « avant le règlement définitif du statut de l’Azawad », nom donné par ces autonomistes au Nord-Mali. Ils se réservent aussi « le droit de riposter aux agressions de l’armée malienne ». Si des diplomates proches des négociations se montraient optimistes ces derniers jours concernant un accord intérimaire sur Kidal, la situation sur le terrain a changé la donne cette semaine.
L’armée malienne a en effet créé la surprise en remontant en direction de Kidal. Après de violents affrontements, elle a chassé mercredi le MNLA de la localité d’Anefis. Selon les autorités maliennes, les récentes arrestations et expulsions de Kidal de membres des communautés noires par le MNLA ont précipité la décision de l’armée de reprendre l’offensive.
Crimes et exactions
Cependant, malgré des déclarations guerrières, les militaires se sont gardés de continuer sur Kidal. Le pouvoir malien, sous la pression de ses alliés extérieurs, a annoncé qu’il laissait sa chance au dialogue. Mais ce climat pesant s’est encore alourdi ce vendredi par de nouvelles informations sur des exactions commises par les deux camps.
Deux organisations internationales de défense des droits de l’Homme, Amnesty International et Human Rights Watch (HRW), ont effectivement dénoncé dans deux rapports distincts les crimes et exactions commis par l’armée et les groupes armés au Mali depuis janvier. « Le bilan des forces de sécurité maliennes en matière de droits de l’Homme est simplement terrible », a accusé Amnesty, évoquant notamment des cas de torture. De son côté, HRW souligne que les forces du MNLA ont arrêté dans la région de Kidal « une centaine de personnes, dont la plupart étaient des hommes à la peau plus sombre appartenant à des groupes ethniques non touareg ».
Si un accord intérimaire est trouvé sur Kidal, il faudra ensuite régler le problème de fond des relations entre l’État malien et sa région nord, irrédentiste depuis des décennies. Le dialogue s’annonce tendu : Bamako ne veut pas entendre parler d’autonomie mais de décentralisation, et le MNLA estime avoir déjà beaucoup fait en renonçant à sa revendication d’indépendance.
(Avec AFP)
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