Maintien de la paix de l’ONU : face aux nouveaux défis, de nouveaux moyens

L’histoire du maintien de la paix est faite d’innovation et d’adaptation. Il y a encore deux décennies, le métier des Casques bleus semblait fort simple : surveillance de cessez-le-feu, souvent entre États en conflit, et facilitation de solutions politiques en cas de rupture d’accord.

Publié le 29 mai 2013 Lecture : 4 minutes.

Aujourd’hui, le maintien de la paix évolue sur des terrains beaucoup plus complexes. Les Casques bleus travaillent à ramener la paix dans des pays gravement touchés par des conflits plus souvent internes, et où les accords de paix sont souvent fragiles. Des acteurs non-étatiques, à l’instar d’organisations criminelles, posent des défis supplémentaires.

Pour faire face à ces défis, le maintien de la paix de l’ONU a développé une approche multidimensionnelle qui regroupe militaires, policiers et civils afin d’intervenir dans des domaines aussi variés que la protection des civils, des Droits de l’homme ou la promotion de l’État de droit…

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Alors même que nous nous préparons à relever de nouveaux défis – en République Démocratique du Congo (RDC), au Mali et éventuellement en Somalie ou en Syrie – le maintien de la paix devra faire face à deux vérités fondamentales :

Premièrement, le maintien de la paix ne peut pas se subsitituer à un accord politique. Ses interventions doivent se fonder sur un cadre politique clair.

En RDC par exemple, l’Accord cadre pour la paix, la sécurité et le développement signé par 11 pays est la plateforme indispensable aux efforts de la Mission de Stabilisation de l’ONU (Monusco) en vue de mettre un terme au cycle récurrent de violences. Au Mali, il reste beaucoup de chemin à parcourir en vue d’obtenir l’implication de tous les acteurs autour d’un projet de réconciliation, qui servira de cadre et de boussole politique au travail de la Minusma; notamment sur les terrains de la sécurité et de la protection des civils.

Deuxièmement, le maintien de la paix a besoin, plus que par le passé, de meilleurs moyens et d’outils modernes. Nous devons nous assurer de ce que nos opérations disposent de ressources nécessaires, afin de faciliter leur connaissances de terrains sensibles et qu’ils soient capables de répondre efficacement.

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Dans l’est de la RDC, où des groupes armés continuent de terroriser des millions de civils, nous déployons une brigade d’intervention et des véhicles aériens sans pilotes non armés qui nous permettrons d’observer les mouvements de groupes armés et de mieux protéger les civils. Ces outils offrent à nos missions un avantage tactique, une plus grande mobilité et un pouvoir de dissuasion nouveau.

Ces nouvelles approches suscitent cependant l’inquiétude de certains qui estiment que le maintien de la paix de l’ONU serait en train de se transformer en machine de guerre. Rien n’est moins vrai. Le mandat voté par le Conseil de sécurité est sans équivoque : l’usage de la force par nos Casques bleus en RDC est l’exception et non pas la règle pour le maintien de la paix.

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Les changements intervenus dans la nature des conflits imposent cependant des changements d’approches et d’outils au maintien de la paix des Nations Unies. De plus en plus, les Casques bleus opèrent dans des contextes à haut risque où la paix et la stabilité sont plus difficiles à atteindre. Reste que l’adaptation aux conflits du 21e siècle est pour nous une évolution, non pas une révolution.

Nos principes fondateurs – impartialité, consentement des parties – qui sont au coeur du maintien de la paix depuis les années 1950, démeurent. L’usage de la force ne s’impose à nous que lorsque nous sommes contraints à l’auto-défense et à défendre le mandat reçu du Conseil de sécurité. Nous devons cependant être prêts, si nécessaire, à réagir aux risques posés par des acteurs marginaux qui tentent de mettre en péril un processus de paix.

Au Mali, nous déployons une nouvelle mission dans un environemment volatile. Nos Casques bleus devront faire face à la menace d’engins explosifs improvisés et aux attaques suicide dans un contexte de guerre asymétrique. Il est à craindre qu’ils deviennent les cibles ou les victimes collatérales du conflit. La Minusma se déploie aux côtés des forces françaises chargées de mener des offensives et actions contre-terroristes.

En 2012, 111 Casques bleus ont perdu la vie au service des Nations Unies. Plusieurs sont tombés sur le théâtre d’opération. En avril, cinq Casques bleus ont été tués au Soudan du Sud lorsque le convoi de civils qu’ils escortaient a été attaqué. En juin dernier, sept autres sont morts en Côte d’Ivoire, également victimes d’une attaque armée. Au cours de l’année écoulée, d’autres ont été tués au Darfour, à Abyei ainsi qu’en RDC.

Alors que nous célébrons la Journée internationale des Casques bleus (ce 29 mai) pour honorer la mémoire de nos collègues disparus, nous rendons également hommage au partenariat unique qui est au fondement du maintien de la paix. Nous honorons ainsi tous ceux qui contribuent en termes de ressources, d’hommes et de matériel au maintien de la paix de l’ONU. C’est ce partenariat unique qui permet au maintien de la paix des Nations Unies de rester un outil efficace face aux conflits de notre temps. En dépit des défis, nouveaux et anciens, le maintien de la paix continue de remplir sa mission : assister les peuples et les communautés en conflits sur des théâtres où nul autre acteur ne peut ou ne veut se rendre. Comme par le passé, nous nous engageons solennellement à relever ce défi.

* L’auteur est Secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix.

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