François Hollande en visite express à Addis-Abeba pour les 50 ans de l'(O)UA

Le chef de l’État français, François Hollande, sera présent demain, samedi 25 mai, aux cérémonies qui marquent le 50è anniversaire de la création de l’Organisation de l’unité africaine (OUA). C’est son quatrième déplacement sur le continent africain.

François Hollande lors de son discours devant l’Assemblée sénégalaise, à Dakar, en octobre 2012 © Reuters

François Hollande lors de son discours devant l’Assemblée sénégalaise, à Dakar, en octobre 2012 © Reuters

Publié le 24 mai 2013 Lecture : 4 minutes.

C’est une surprise et certainement le signe d’une confiance nouvelle dans les relations franco-africaines. François Hollande sera le seul chef d’État d’une ancienne puissance coloniale à être présent, demain, le 25 mai, aux célébrations du 50e anniversaire de la création de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, ancêtre de l’actuelle Union africaine). L’institution panafricaine a souvent, par le passé, affiché une rhétorique anticoloniale et déclaré son hostilité aux ingérences hexagonales en Afrique.

« L’UA nous fait une fleur pour nous remercier de notre action au Mali, explique un diplomate français. À l’origine, ses responsables ne souhaitaient pas voir de représentants des anciennes puissances coloniales. » À Addis-Abeba, le chef de l’État français viendra donc récolter les fruits de l’intervention militaire. D’autres lauriers du même type lui seront d’ailleurs tressés, le 5 juin, au siège de l’Unesco, à Paris, où il se verra remettre le prix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix, en présence d’Alassane Ouattara, le président ivoirien et de plusieurs autres chefs d’État africains.

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Accompagné de ses deux conseillers Afrique, Hélène Le Gal et Thomas Melonio, et de la ministre de la Francophonie, Yamina Benguigui, Hollande ne passera que sept heures dans la capitale éthiopienne. À 15h30, il se rendra au lycée franco-éthiopien d’Addis-Abeba pour une rencontre avec les lycéens et enchaînera avec une réception en l’honneur de la communauté française. Il rejoindra ensuite le Millenium Hall de l’UA pour les célébrations du cinquantenaire où il prononcera son discours aux alentours de 19 heures. Il aura ensuite un entretien en tête-à-tête avec le président en exercice de l’UA, le Premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn, qu’il a déjà reçu à Paris en avril dernier. Puis achèvera sa journée par un dîner avec les chefs d’État, avant de repartir dans la soirée.

Des nouvelles relations entre la France et l’Afrique ?

Dans son discours devant le collège de ses pairs africains, Hollande devrait insister sur la sécurité collective, l’intégration régionale, la coopération interafricaine et parler des nouvelles relations que la France souhaite instaurer avec ses partenaires du continent, dans la lignée de ses discours de Dakar et de Kinshasa. Au Sénégal et en RDC, il avait affirmé son attachement aux principes démocratiques et aux droits humains dans le respect de l’indépendance et l’identité des États. Une ligne de crête pas toujours facile à tenir. La France, devrait expliquer Hollande, se tiendra toujours aux côtés de l’Afrique dans un esprit d’égalité, d’ouverture et de coopération.

De Madagascar, à la Guinée en passant par la RDC et la Guinée-Bissau, Paris est, ces derniers temps, en phase avec les décisions de l’UA et des organisations régionales. Contrairement à l’intervention militaire orchestrée par son prédécesseur Nicolas Sarkozy en Libye, François Hollande a pris soin d’engager les troupes françaises au Mali à la demande du président par intérim, Dioncounda Traoré, et d’autres dirigeants de la sous-région, notamment Mahamadou Issoufou et Alassane Ouattara. Il  a, par ailleurs, toujours tenu informé et demandé l’avis de la présidente de la Commission de l’UA, Nkosazana Dlamnini-Zuma, et de celui qui était alors président en exercice, Thomas Boni Yayi.

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Une politique africaine dans l’urgence

« Comme François Mitterrand dans ses rapports au Tchad, avec lequel il souhaitait un désengagement pour des raisons idéologiques, Hollande a dû développer une politique africaine dans l’urgence, explique l’historien et  archiviste Jean-Pierre Bat, qui a publié récemment un ouvrage de 850 pages intitulé Le syndrome Foccart. Il est en train de faire l’apprentissage du pragmatisme africain versus la volonté de réforme. »

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Le président français, qui n’a pas de tropisme africain particulier au départ, tente de s’inscrire dans le droit de fil sa campagne électorale. Il y a une volonté de rupture, un changement de méthode qui privilégie les relations d’État à état. Celui qu’on a appelé le « président normal » est aussi obsédé par sa volonté de se démarquer du style de son prédécesseur.

Mais au fil des mois, Hollande a pris goût à l’Afrique et apprend. Ses collaborateurs estiment qu’il est devenu un fin connaisseur des différentes communautés ethniques du Nord-Mali. « Comme Sarkozy, Hollande a aussi constaté que, même s’il souhaitait normaliser ses relations avec le continent, ces dernières ne seraient jamais aussi normales que celles nouées avec les autres régions du monde », précisent les spécialistes du continent, Paul Melly et Vincent Darracq, dans leur récent ouvrage, A New Way to Engage ? French Policy in Africa from Sarkozy to Hollande (Chatham House, mai 2013). Ne serait-ce que parce que la politique africaine permet à la France de continuer à jouer un rôle de leader international et de maintenir son statut de puissance.

Au niveau économique, l’Afrique demeure très importante pour la France. Si elle ne représente que 3 % des exportations françaises, elle reste un important fournisseur d’hydrocarbures et de minerais. Les compagnies françaises sont aussi particulièrement bien implantées dans le domaine de la construction, (Bouygues et Eiffage), de la logistique portuaire et du rail (Bolloré), des télécoms (Bouygues, Orange..), des banques (Société générale, BNP, Crédit Lyonnais…), du transport aérien (Air France) et de l’agriculture (Compagnie fruitière de Marseille…). Pour faire face à la concurrence de plus en plus forte des pays émergents, Laurent Fabius met progressivement en place une diplomatie économique dynamique. Le chef de la diplomatie française a ouvert en avril dernier les portes de son ministère aux entreprises à l’occasion des Rencontres « Quai d’Orsay – Entreprises ».

L’Europe est en récession, l’Afrique est le continent du 21è siècle, comme l’a rappelé dernièrement le socialiste Pascal Lamy, du haut de sa tribune de l’OMC, qu’il s’apprête à quitter en juillet. Tout cela vaut bien, en décembre prochain, la tenue d’un sommet Afrique-France à Paris. Et un déplacement devant les patrons de l’Union africaine.

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