IIe guerre mondiale : le sang des Africains (2e partie)

Laurent Touchard travaille depuis de nombreuses années sur le terrorisme et l’histoire militaire. Il a collaboré à plusieurs ouvrages et certains de ses travaux sont utilisés par l’université Johns-Hopkins, aux États-Unis. Dans cette série en trois volets, il revient sur la participation des Africains aux combats de la seconde guerre mondiale. Deuxième partie : la guerre du désert, la reconquête de l’Éthiopie, Madagascar…

Les troupes coloniales françaises défilent sur les Champs-Élysées, à Paris, le 14 juillet 1939. © AFP/ARchives

Les troupes coloniales françaises défilent sur les Champs-Élysées, à Paris, le 14 juillet 1939. © AFP/ARchives

Publié le 24 mai 2013 Lecture : 3 minutes.

Mussolini s’est emparé de l’Éthiopie et s’efforce de conquérir la Grèce, Hitler règne désormais sur une grande partie de l’Europe, de la Pologne jusqu’aux pointes bretonnes. Pourtant, la guerre ne s’arrête pas. Côté français, schématiquement, deux camps s’affrontent : celui de Vichy sous l’autorité du maréchal Pétain, vainqueur de Verdun en 1916 devenu le chantre de la collaboration germano-française et le général De Gaulle, « champion » de la France Libre. Dans les faits, la situation est plus compliquée, mais ces deux camps s’imposent.

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Pour les deux protagonistes, les colonies sont un enjeu de taille, plus encore pour De Gaulle qui manque d’hommes et de moyens. D’où l’importance du ralliement du Tchad, le 26 août 1940, sous l’égide du gouverneur Félix Eboué, originaire de Guyane, suivi par celui du Cameroun, du Congo et de l’Oubangui-Chari (Centrafrique) les 27 et 28 août. La France Libre augmente ainsi ses effectifs de 17 500 combattants, dont 15 000 tirailleurs. Les Forces Françaises Libres disposent aussi de quelques éléments de l’Armée d’Afrique. Maghrébins et Subsahariens vont de nouveau démontrer leur vaillance : de la bataille de Koufra (colonne Leclerc) à la reconquête de l’Éthiopie (Brigade française d’Orient avec des tirailleurs « sénégalais » et un escadron de spahis marocains attachés à une unité indienne), des sables de Libye où l’armée française dame le pion durant plusieurs jours à l’Afrikakorps, à Bir Hakeim, jusqu’à la campagne de Tunisie qui voit la fin de la présence de l’Axe (Italie et Allemagne, plus le Japon dans le Pacifique, ainsi que les alliés mineurs de l’Allemagne, tels que la Hongrie, la Roumanie, ou du Japon comme le Siam) en Afrique…

Combats fratricides

Les opérations donnent parfois lieu à de tragiques combats fratricides, comme en Syrie, où les coloniaux qui se battent pour la France Libre affrontent ceux qui servent au nom de Vichy… Les forces de l’Axe comprennent également des Africains, à commencer par les auxiliaires éthiopiens et libyens des forces italiennes. Ces derniers forment deux divisions d’infanterie, des unités méharistes, ainsi qu’un corps paramilitaire de police. Les deux divisions libyennes disparaissent dans les premiers mois de la guerre du désert, se désagrégeant notamment lors des combats de décembre 1940/début 1941, face à des Britanniques pleins d’initiative, menant avec beaucoup d’habileté une offensive motorisée en Cyrénaïque, avec en fer de lance les quasi-invicibles chars Mathilda II. L’arrivée de Rommel quelques semaines plus tard changera la donne…

Le Commonwealth met lui aussi à contribution ses colonies et dominions pour affronter l’Axe : l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est fournissent chacune une brigade, expédiées en Éthiopie afin d’en chasser les Italiens. Par ailleurs, Orde Wingate, maître des opérations non-conventionnelles dans les rangs britanniques, organise une « bande », la Gideon Force, de 800 Éthiopiens et de 800 paramilitaires originaires du Soudan, dédiée à la guérilla.

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Si les Africains de l’Ouest atteignent Addis Abeba les premiers, ce sont les Sud-Africains qui les précèdent dans la capitale. Ils se voient ainsi relégués au second plan, sacrifiés pour des raisons davantage politiques que raciales. Jan Smuts, qui dirige l’Afrique du Sud est controversé dans son pays, il a arraché la décision de voir Pretoria s’engager au côté de l’Angleterre après l’invasion de la Pologne, alors que beaucoup de ses compatriotes préféraient la neutralité, voire une prise de position en faveur de l’Allemagne… Pour Churchill, Premier ministre britannique, mettre en avant l’armée sud-africaine était donc essentiel afin de renforcer l’autorité de Smuts. Quelques mois plus tard, les Sud-Africains débarquent avec d’autres unités du Commonwealth, à Madagascar où ils affrontent les coloniaux français, dans des combats parfois très durs. Si la campagne de Madagascar est aujourd’hui oubliée, l’île avait alors une importance stratégique : l’opération britannique anticipe une éventuelle prise de contrôle par les Japonais, qui auraient ainsi coupé la route Afrique-Inde, tout en menaçant le continent africain… Au total, Pretoria mobilise 334 000 hommes dont 211 000 Blancs qui seuls sont autorisés à combattre dans des unités de première ligne et à être déployés en Italie. Les Noirs, eux, servent dans des unités de soutien, affectés à des taches subalternes.

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>> Pour en savoir plus : consulter le blog "CONOPS" de Laurent Touchard

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