Tunisie : Ali Larayedh dénonce les « terroristes » d’Ansar al-Charia

Le Premier ministre tunisien, Ali Larayedh, a qualifié de « terroriste » le groupe salafiste jihadiste Ansar al-Charia, jugé responsable de violents heurts dimanche 19 mai à Tunis, après l’interdiction du congrès de ce mouvement à Kairouan. Les affrontements entre forces de l’ordre et islamistes radicaux ont fait un mort et une quinzaine de blessés.

La police lors de heurts avec des salafistes à Ettadhamen, à l’ouest de Tunis, le 19 mai. © AFP

La police lors de heurts avec des salafistes à Ettadhamen, à l’ouest de Tunis, le 19 mai. © AFP

BENJAMIN-ROGER-2024

Publié le 20 mai 2013 Lecture : 3 minutes.

Ali Larayedh ne mâche plus ses mots. Dimanche, le Premier ministre a pour la première fois qualifié Ansar al-Charia de groupe « terroriste ». Quelques heures plus tôt, des heurts meurtriers avaient éclaté dans un quartier de Tunis à la suite de l’interdiction du congrès du mouvement prévu à Kairouan.

« Ansar Al-Charia est une organisation illégale qui défie et provoque l’autorité de l’État », a déclaré Ali Larayedh à la télévision publique en marge d’un déplacement au Qatar. Ce groupe « est en relation et est impliqué dans le terrorisme », a ajouté ce haut responsable du parti islamiste Ennahdha qui dirige le gouvernement. Ali Larayedh, ancien ministre de l’Intérieur, est la bête noire des salafistes.

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Ansar al-Charia est considéré depuis longtemps comme proche d’Al-Qaïda, alors que la Tunisie connaît un essor des groupuscules jihadistes depuis la révolution de 2011. Il est notamment accusé par les autorités de l’attaque de l’ambassade américaine à Tunis en septembre 2012 (quatre morts parmi les assaillants).

Violences à Ettadhamen

Dimanche, le ministère de l’Intérieur a indiqué que les militants d’Ansar Al-Charia avaient déclenché de violents heurts dans les rues de la banlieue ouest de Tunis. « Quinze policiers ont été blessés, trois grièvement dont un en réanimation. Trois manifestants ont été blessés et un est mort », a déclaré le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Mohamed Ali Aroui dont le précédent bilan faisait état de 14 blessés. L’hôpital Mongi Slim a de son côté précisé que le manifestant, Moez Dahmani, né en 1986, avait été tué par balle.

Faute d’avoir pu tenir son congrès à Kairouan, à 150 km de Tunis, bouclée par un impressionnant dispositif de sécurité, Ansar Al-Charia a appelé ses partisans à se rassembler Cité Ettadhamen, un bastion salafiste à 15 km à l’ouest de la capitale. Des heurts ont éclaté dans ce quartier en début d’après-midi et se sont poursuivis dans la cité voisine d’Intikala, où les centaines de manifestants armés de pierres, d’armes blanches et de cocktails Molotov se sont réfugiés après avoir été repoussés par des tirs, des gaz lacrymogènes ainsi que l’avancée de blindés. Dans la soirée des heurts sporadiques avaient encore lieu mais la police semblait contrôler ces quartiers.

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Le gouvernement, dirigé par le parti islamiste Ennahdha, avait interdit le congrès d’Ansar al-Charia à Kairouan en estimant qu’il représentait une « menace ». Ainsi, son chef en fuite Abou Iyadh, un vétéran d’Al-Qaïda en Afghanistan, libéré de prison à la faveur de l’amnistie postrévolutionnaire, a menacé le gouvernement d’une « guerre » la semaine dernière, accusant Ennahdha de mener une politique anti-islam.

Soutien d’Aqmi

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Ennahdha a longtemps été accusé de laxisme face aux groupuscules jihadistes. Il a considérablement durci sa position depuis que 16 militaires et gendarmes ont été blessés entre fin avril et début mai par des mines posées par des groupes armés liés à Al-Qaïda dans le Jebel Chaambi, à la frontière avec l’Algérie.

À Kairouan, le calme régnait dans la soirée dimanche et le dispositif sécuritaire a été levé. En fin de matinée, de brefs heurts y avaient opposé un petit groupe de salafistes à des policiers, puis des manifestants, en majorité des jeunes ne semblant pas appartenir à la mouvance islamiste, ont affronté par moment les forces de l’ordre. Selon une source sécuritaire sur place, 70 militants salafistes ont été interpellés dans cette ville. Aucun chiffre précis n’a été donné concernant les arrestations à Tunis, le ministère de l’Intérieur avançant « quelques dizaines d’arrestations de bandits et de salafistes » dans toute la Tunisie. Selon son organisation et une source sécuritaire, le porte-parole d’Ansar Al-Charia, Seifeddine Raïs, a par ailleurs été arrêté dimanche.

Enfin, samedi soir, Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a exprimé son soutien à Ansar Al-Charia, tout en appelant les militants tunisiens à faire preuve « de sagesse et de patience ». « Ne vous laissez pas provoquer par le régime et sa barbarie pour commettre des actes imprudents qui pourraient affecter le soutien populaire dont vous bénéficiez », a ainsi déclaré Abou Yahia al-Shanqiti, membre du comité d’Al-Charia d’Aqmi.

Depuis la révolution, la Tunisie a vu se multiplier les violences salafistes. Le pays est aussi déstabilisé par une profonde crise politique et le développement de conflits sociaux dus à la misère. L’état d’urgence y est en vigueur depuis la chute de Ben Ali.

(Avec AFP)

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