Élections malgaches : paysage médiatique verrouillé sur la Grande Île
Le Syndicat des journalistes malgaches, SJM, a envoyé une lettre aux représentants de la communauté internationale pour leur demander de soutenir la réouverture de 77 stations de radio et télévision fermées depuis 2009. À quelques semaines des élections prévues en juillet, les médias audiovisuels sont largement dominés par le pouvoir de transition.
Silence radio sur le 104.2 à Madagascar. Free FM fête ses deux ans d’existence ce 13 mai 2013, sans émettre. En janvier dernier, à quelques jours de la reprise prévue de son émission politique, la directrice de la station apprend dans un journal tenu par les proches du président de la transition Andry Rajoelina, qu’elle est condamnée à trois ans de prison ferme pour l’organisation d’une manifestation non autorisée. La décision est en appel. La radio, elle, est suspendue à titre conservatoire par les autorités.
En tout, le SJM (Syndicat des journalistes malgaches) recense 77 stations de radio et télévision fermées depuis le début de la crise politique en 2009. « C’est une violation flagrante de la feuille de route de sortie de crise, écrivent ses responsables dans une lettre adressée au représentants de la communauté internationale sur la Grande Île. Le SJM urge l’ensemble des partenaires à prendre les actions nécessaires pour contraindre les autorités de transition à procéder à leur réouverture ».
Du "juridisme exacerbé"
Car sans appui extérieur, la situation a peu de chances d’évoluer. Depuis quatre ans, aucune licence n’a été accordée, aucun appel d’offre n’a été lancé. Le ministère de la Communication qui régit le secteur de l’audiovisuel estime qu’un assainissement doit être mené avant toute (ré)ouverture. « Il y a encore trop d’irrégularités, des radios qui émettent alors qu’elles n’en ont pas le droit », se justifie Harry Laurent Rahajason, le ministre de la Communication.
De son côté, le SJM compte au moins 8 médias audiovisuels ayant déjà rempli les conditions nécessaires pour une autorisation définitive qu’ils n’ont jamais obtenue. « Tant que certains opérateurs ne se plient pas aux textes réglementaires, l’assainissement doit se poursuivre », ajoute le ministre.
Les autorités ont "fait le ménage"
Mais l’opération traine en longueur. Et les journalistes malgaches privés de chaines ou de fréquences, commencent à s’impatienter. « C’est du juridisme exacerbé, dénonce Rocco Rasoanaivo, le président du SJM. Les autorités s’abritent derrière le droit pour masquer une volonté de museler la presse indépendante ».
À bientôt deux mois du premier tour de l’élection présidentielle (le 24 juillet, NDLR), d’autres s’inquiètent du manque de pluralisme. « Sur 41 candidats en lice seule une poignée appartient ou est proche du pouvoir qui détient la plupart des médias audiovisuels, dénonce Lalatiana Rakotondrazafy, secrétaire général su SJM. Dans ces conditions, il est utopique de penser que des élections crédibles puissent se tenir ».
Dans son dernier communiqué sur la Grande Île, Reporters sans frontières rapportait « le ménage » fait « de manière discrétionnaire par le ministère de la Communication dans le paysage médiatique malgache. » Madagascar figure en 88e position dans le classement 2013 de la liberté de la presse dans le monde réalisé par l’organisation. Un recul de 4 places par rapport à 2012.
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