Guinée : on se lève tous pour Dadis…
Après trois jours passés en Guinée pour les obsèques de sa mère, l’ex-chef putschiste Moussa Dadis Camara a quitté Nzérékoré le 15 avril pour regagner Ouagadougou via Montrovia et Rabat, où il sera reçu en audience par le roi Mohammed VI. Bilan du retour quasi triomphal de l’homme accusé d’être responsable des massacres du 28 septembre 2010.
Une petite larme a glissé le long de ses joues. Pas pour sa mère : dans la tradition soussou, il est interdit de pleurer quand une personne très âgée décède. Selon Caleb Kolié, son porte-parole, qui rapporte l’information, l’ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara s’est laissé submerger par l’émotion à son entrée dans Nzérékoré, abasourdi par le nombre de ses sympathisants, dont certains scandaient : « Dadis, président ».
Rentré dans sa région de Guinée forestière pour les obsèques de sa mère, ce 14 avril, l’homme fort de Guinée entre décembre 2008 et décembre 2009, en exil à Ouagadougou depuis janvier 2010, a en effet été accueilli par une foule si compacte que les services de sécurité ont dû évacuer les badauds dans les villages avoisinants. Tout ce que Nzérékoré compte d’autorités était également présent, du préfet au gouverneur, en passant par le maire. Et pas seulement : le gouvernement de Conakry a lui aussi fait montre d’une sollicitude inattendue à l’endroit de l’ex-putschiste en affrétant des avions. Le premier pour la dépouille et la famille, le deuxième pour la délégation gouvernementale conduite par le ministre délégué au Transport et comprenant notamment le chef d’état-major particulier du président de la République, ainsi que le ministre de la Communication. Des membres de l’opposition aussi étaient présents, dont Boubacar Barry, du Club des républicains (CDR), Moussa Diallo, et le représentant personnel de Cellou Dalein Diallo.
Massacres du 28 septembre
Un surprenant retour triomphal donc pour une personnalité controversée, épinglée pour sa responsabilité supposée dans les massacres du 28 septembre 2009 et dont les détracteurs avaient promis de se mobiliser pour l’empêcher de repartir sans s’être expliqué, en particulier s’il se présentait à Conakry. La Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) reproche à l’ancien dirigeant de n’avoir toujours pas répondu aux deux commissions rogatoires qui lui avait été envoyées à Ouagadougou à ce sujet. Lors d’un meeting dans l’enceinte du plus grand stade de Conakry, les bérets rouges avaient tiré à balles réelles sur les manifestants, tuant au moins 157 personnes et violant de nombreuses femmes. Un absent tout de même lors de ces obsèques, Toumba Diakité, l’ancien aide de camp de Dadis Camara, celui-là même qui avait voulu l’abattre d’une balle dans la tête fin 2009. Normal, mais une rumeur, vite démentie par l’entourage de Dadis Camara, avait récemment fait état d’un échange téléphonique entre les deux hommes, donnant à penser qu’ils pourraient se rencontrer.
À ceux qui croient qu’il est assigné à résidence au Burkina Faso, – ce qui n’est pas le cas -, Dadis Camara rétorque qu’il attend simplement que Conakry lui reconnaisse le statut d’ancien chef d’État et garantisse sa sécurité pour organiser son retour définitif. Il dit ne pas se sentir en sécurité en raison de la lutte contre les narcotrafiquants et contre la corruption qu’il avait engagée quand il était au pouvoir.
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