Profession de foi contre le régime RDPC de Paul Biya

Professeur Franklin Nyamsi, agrégé de philosophie dans l’Académie de Rouen, porte-parole du Collectif Diasporique Camerounais.  

Franklin Nyamsi © DR

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Publié le 21 mars 2013 Lecture : 3 minutes.

Ma profession de foi contre le régime RDPC du président Paul Biya

J’ai près de 41 ans en ce mois de février 2013 et ai consacré depuis mes dix-huit ans, presque toutes les heures extra-académiques et extra-familiales de ma vie à la dénonciation de la haine de la pensée et du mépris des libertés démocratiques à travers l’Afrique, notamment dans mon pays natal, le Cameroun. Je remercie Jeune Afrique de me donner dans les lignes qui suivent, l’occasion d’énoncer respectueusement et rigoureusement ma profession de foi contre le régime RDPC de M. Paul Biya, président de la république du Cameroun, incarnation vivante avec ses 32 ans au pouvoir, du refus de modernité infligé au peuple camerounais.

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J’ai grandi dans le terroir camerounais du Littoral, où la mémoire de la lutte indépendantiste  de l’Union pour les Populations du Cameroun (UPC) de Ruben Um Nyobé, Félix Moumié et Ernest Ouandié est encore très vive. Soldée par près d’un million de morts sous la double répression des armées coloniale française et subalterne camerounaise, cette dette de sang franco-camerounaise n’est pas encore réglée par un dialogue de justice et de vérité entre ses protagonistes. C’est donc sur le fond de la mémoire upéciste de résistance que j’ai appris à détester toutes les injustices qui ont marqué mon parcours de vie jusqu’ici. J’ai depuis lors pris à cœur de moderniser l’upécisme, de penser et de réaliser la nouvelle émergence citoyenne camerounaise à travers une lutte pour la démocratie qui se mette à l’abri des travers obscurantistes de l’anticolonialisme dogmatique et du cynisme ultralibéral.

La blessure originelle de ma vie de citoyen provient de mes années d’études sur le Campus de l’Université Nationale du Cameroun, à Yaoundé, entre 1990 et 1993. Pendant ces années-là, qui furent aussi celles du retour du Cameroun vers le multipartisme après 30 ans de règne féroce du parti unique UNC de M. Ahidjo et du RDPC de son successeur Paul Biya, nos revendications de franchises universitaires, de bibliothèques, de toilettes, de salles de cours viables, mais aussi nos revendications de pleine reconnaissance citoyenne furent durement réprimées par les milices et les forces de l’ordre au service de M. Biya, des centaines d’entre nos camarades étant d’ailleurs exclus de toutes les universités camerounaises et contraints à l’exil pour le soi-disant délit de revendication syndicale dans le cadre de ce qui se nommait alors le Parlement des Etudiants Camerounais, dont je fus un militant de base, puis l’un des cadres en exil en Afrique de l’Ouest dès 1995.

La blessure originelle de ma vie citoyenne, c’est aussi l’élection présidentielle multipartite  de 1992 au Cameroun, lors de laquelle à 20 ans, je votai pour le candidat le plus important de l’opposition démocratique, Ni John Fru Ndi, alors désigné par la coalition de l’Union pour le Changement. Au mépris du résultat des urnes et avec le soutien de ses relais français, le régime Biya s’autoproclama vainqueur et fit subir au peuple camerounais un long épisode répressif, tandis que l’opposition politique s’émiettait progressivement jusqu’à la léthargie et aux divisions manipulées qui la caractérisent actuellement. Intimidations, emprisonnements arbitraires, traque des opposants se poursuivent. Depuis lors, les élections de 1997, de 2002, de 2007, de 2011, organisées exclusivement par des commissions dominées par le RDPC (ONEL, ELECAM), avec en prime le tripatouillage et le non-respect de la constitution taillée sur mesure par M. Paul Biya en 1996, ont bouché toute perspective sérieuse d’une issue pacifique à la crise de légitimité caractéristique du régime camerounais actuel que la journaliste Fanny Pigeaud, dans son livre Au Cameroun de Paul Biya, caractérise si justement comme une mixture d’autoritarisme et d’immobilisme.

Comment oublier de parler ici des Camerounais – 39 selon le gouvernement – lâchement assassinés dans les rues du pays en février 2008, alors qu’ils manifestaient contre la vie chère, le tripatouillage constitutionnel, et l’absence de perspective fiable alors que  70% de la population a moins de 40 ans ? Peut-on s’accommoder d’un régime qui ne juge pas des soldats qui assassinent impunément des citoyens ?

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Avec près de la moitié de la population vivant en deçà du seuil de pauvreté, avec 70% des jeunes désirant s’exiler, une espérance de vie réduite à moins de 45 ans, une croissance pauvre, un pays plusieurs fois reconnu comme étant le plus corrompu au monde au classement de Transparency International, le Cameroun nous impose une tâche : reconstruire l’opposition politique et offrir une alternative démocratique au peuple Camerounais, avec toutes les bonnes volontés du monde.
Telle est ma profession de foi, pour aujourd’hui et demain, avec mes Camarades du Collectif Diasporique Camerounais et de l’Union des Populations du Cameroun.
 

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