Sénégal : alerte au feu !

Au Sénégal, les feux de brousse ravagent chaque année des dizaines de milliers d’hectares, menaçant l’agriculture, l’élevage et la préservation de l’écosystème. Un plan d’action mêlant sensibilisation et technologie entend éloigner ce danger.

Les feux de brousse sont essentiellement d’origine humaine. © Olivier Barrière/IRD

Les feux de brousse sont essentiellement d’origine humaine. © Olivier Barrière/IRD

Publié le 18 mars 2013 Lecture : 3 minutes.

C’est un fléau récurrent qui revient chaque année au moment de la saison sèche, poussé par les vents. D’octobre à mai, plusieurs régions du Sénégal sont exposées aux feux de brousse, qui détruisent chaque année, en moyenne, quelque 200 000 hectares. Le préjudice, chiffré à 27 milliards de francs CFA par an (plus de 41 millions d’euros), est multiforme. La destruction en profondeur de la végétation et du tapis herbacé compromet la régénération des espèces et contraint le bétail à migrer vers de nouveaux pâturages. Les feux les plus étendus peuvent anéantir les récoltes, causer la mort du bétail, réduire en cendre des certaines d’espèces d’arbres tout en amenuisant dans des proportions inquiétantes le couvert boisé.

Et au-delà de ces dimensions locales, les feux de brousse dégagent des gaz à effet de serre qui contribuent fortement, in fine, au réchauffement climatique.nMinistre de l’Environnement et du Développement durable de Macky Sall, Haidar El Ali connaît bien le phénomène. L’Océanium, une structure dédiée à la préservation de l’environnement et à l’écotourisme basée à Dakar, que ce militant écologiste de la première heure a présidée, s’est mobilisée contre les feux de brousse depuis plusieurs années. Dans le cadre de l’opération « Chasseurs de feux », ses équipes sillonnent les pistes du Sénégal lors de la saison sèche pour éteindre les feux de brousse aux côtés des villageois.

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Brigades citoyennes

Le 6 mars, Haidar El Ali présentait le nouveau plan d’action élaboré par son ministère pour lutter contre ce phénomène. Premier volet du dispositif, la dotation des services déconcentrés en véhicules légers équipés de compresseurs à air et à eau. Neuf ont déjà été commandés. Répartis dans les principales zones à risque – le nord sahélien, le centre et le centre-est, le sud-est et la Casamance –, ils remplaceront les véhicules jusque-là disponibles, trop onéreux à entretenir.

Outre cette mesure, des brigades citoyennes de l’environnement seront créées au sein des populations locales et des divers services techniques déconcentrés, afin de développer la lutte passive et de multiplier les actions de prévention et de sensibilisation. À l’origine des feux de brousse, on trouve le plus souvent des négligences humaines : mauvaise maîtrise des feux domestiques, collecte du miel sauvage dans les arbres, incendies provoqués par les chasseurs pour faire sortir le gibier…

Satellite

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L’instauration de « bourses vertes » permettra en outre de fournir à ces brigades divers outils d’intervention peu onéreux : brouettes, balais à feu, coupe-coupes, râteaux… Selon le colonel Papa Walil Guèye, premier conseiller technique du ministre, « il s’agit non seulement de préserver la forêt mais aussi de promouvoir des pratiques permettant aux populations de tirer des recettes additionnelles de ces actions préventives ». Par exemple, en ayant recours à un usage maîtrisé de l’apiculture.

Le dernier volet du plan d’action porte sur l’élargissement d’un dispositif informatique préexistant qui permet désormais au ministre en personne et aux services centraux concernés, grâce au recueil de données satellitaires traitées par un logiciel dédié, de visualiser en temps réel le moindre départ de feu sur le territoire national. « Dès qu’un feu est détecté, le service des Eaux et forêts de la zone concernée est mis en branle pour intervenir rapidement et circonscrire les dégâts », se félicite Haidar El Ali. Un système dont l’évidente efficacité est aussi le talon d’Achille, dans la mesure où la détection commence dès qu’un feu atteint une superficie de 20m2, avec le risque de multiplier les fausses alertes au moindre défrichement agricole.

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Par Mehdi Ba, à Dakar

>> Pour aller plus loin : en février 2013, au terme de trois années de recherches menées essentiellement au Sénégal, une équipe de chercheurs en sciences de l’environnement publiait une étude (en anglais) sur les feux de brousse, sous l’égide du World Agroforestry Centre (Nairobi). Retrouvez la ici.
 

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