Mali : l’incertitude demeure autour de la mort d’Abou Zeid et de Mokhtar Belmokhtar
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a appelé « à la prudence » après les annonces par N’Djamena de la mort des chefs jihadistes Abou Zeid et Mokhtar Belmokhtar. De son côté, le chef d’état-major des armées, l’amiral, Edouard Guillaud, a estimé, lundi 4 mars, que la mort de Abou Zeid était « probable ». Samedi, deux soldats, un français et un tchadien, sont morts lors d’affrontements dans le massif des Ifoghas.
Mis à jour à 14h25.
Selon le chef d’état-major des armées, l’amiral Edouard Guillaud, la mort au Mali d’Abdelhamid Abou Zeid, un des principaux chefs d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) est « probable. (…) Mais ce n’est que probable, nous ne pouvons avoir de certitude pour l’instant, parce que nous n’avons pas récupéré le corps », a-t-il précisé, lundi 4 mars, sur la radio Europe 1.
Concernant Mokhtar Belmokhtar dit « le borgne », ancien haut responsable d’Aqmi récemment entré en dissidence, également donné pour mort par les Tchadiens, il a répondu : « Je suis d’une extrême prudence ». Y a-t-il d’autres chefs ? « Il y a en a au moins un, celui qu’on appelle l’émir du grand Sahara et d’autres qui sont les patrons de la logistique », a assuré l’amiral Guillaud.
Selon l’agence mauritanienne d’informations en ligne Sahara Médias (privée), un jihadiste d’Aqmi a reconnu lundi, sous couvert d’anonymat, qu’Abou Zeid avait été tué « par un bombardement aérien français dans les montagnes » des Ifoghas « et non par les Tchadiens » qui étaient « à plus de 80 km » lors du bombardement.
Ce jihadiste, qui aurait l’habitude d’écrire sur différents sites Internet, a en revanche démenti la mort de Mokhtar Belmokhtar « pour la simple raison qu’il se trouve dans la région de Gao (dans le nord du Mali, mais plus au sud du massif des Ifoghas) où il mène les combats contre l’ennemi. (…) Il est bien vivant, il n’a pas été tué par les Tchadiens », poursuit le jihadiste. Selon lui, Mokhtar Belmokhtar va publier « une déclaration dans un proche avenir pour démentir les allégations mensongères du président tchadien (Idriss Deby Itno) renégat ».
Dans une interview à la Dépêche du Midi, lundi, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, a quant à lui déclaré que la France n’était pas « en mesure de confirmer matériellement » la mort des deux chefs jihadistes. « Une rumeur répétée à l’envi ne fait pas une information, et le ministre de la Défense ne doit pas parler au conditionnel, a-t-il déclaré. J’en appelle à la prudence et à l’esprit de responsabilité à l’égard d’indications que nous ne sommes pas en mesure de confirmer matériellement à ce stade ».
"Le Tchad ne parle pas dans le vide"
Vendredi soir, le président tchadien Idriss Déby Itno avait déclaré qu’Abou Zeid avait été « abattu » par les soldats tchadiens. Et samedi, l’armée tchadienne a indiqué dans un communiqué que Mokhtar Belmokhtar avait été tué au cours d’un nouvel affrontement dans le nord-est du Mali, dans les régions de Gao et du massif des Ifoghas. Le ministre tchadien de la communication, Hassan Sylla, a affirmé dimanche que le Tchad « ne parle pas dans le vide. (…) Nous allons présenter prochainement des prisonniers, des lieutenants qui étaient avec eux (chefs islamistes), des armes », a-t-il déclaré.
Nous sommes en train de casser les reins d’Al Qaïda au Maghreb islamiste et ça, c’était l’objectif tel qu’il nous avait été fixé par le président de la République.
Édouard Guillaud, chef d’état-major des armées françaises
L’amiral Guillaud a également affirmé ne « pas savoir où se trouvent les otages », tout en ajoutant qu’ils ne sont pas à l’endroit où les forces militaires « frappent », jugeant « possible » qu’ils aient été déplacés, et « dispersés », « mais pas forcément dans un autre pays ».
Édouard Guillaud a assuré que les militaires français n’étaient pas « surpris » par la violence des combats dans la zone où a péri samedi un troisième soldat français. « Nous savons que nous avons affaire à des fanatiques », « des terroristes fanatisés, entraînés depuis des mois et même des années ». « Nous savions que ce serait la partie la plus dure de cette campagne ». Sur le terrain « nous découvrons littéralement une organisation industrielle du terrorisme », a-t-il poursuivi, citant « plus d’une cinquantaine de caches dans des maisons, des hangars ou des grottes », « plus d’une dizaine d’ateliers de fabrication y compris de bombes dans un des ateliers », « vingt bombes artisanales » fabriquées « simultanément ». « Nous sommes en train de casser les reins d’Al Qaïda au Maghreb islamiste et ça, c’était l’objectif tel qu’il nous avait été fixé par le président de la République », a poursuivi le chef d’état-major français.
"Combats à très courte distance"
Samedi, lors de l’« un des combats les plus violents » depuis le déclenchement des opérations, selon Jean-Yves Le Drian, deux soldats, un français et un tchadien, ont été tués. Un parachutiste français a été tué samedi soir, alors qu’il « montait à l’assaut d’une position ennemie », a annoncé dimanche le porte-parole de l’armée, le colonel Thierry Burkhard.
Selon l’état-major, qui évoque des combats « à très courte distance, parfois inférieure à 50 mètres », « au moins une quinzaine » de combattants islamistes ont été « neutralisés », c’est à dire tués ou blessés, samedi au cours de ces affrontements. « Nous avons face à nous un adversaire fanatisé qui défend fermement des positions sur lesquelles nous sommes obligés successivement de donner l’assaut pour les fouiller et les réduire », a indiqué le colonel Burkhard.
Par ailleurs, au moins 50 islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) ont été tués depuis vendredi dans d’autres combats avec des soldats maliens et français près de Gao, un ancien bastion islamiste dans le nord-est du pays, a-t-on appris de source militaire malienne.
(Avec AFP)
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