Élections au Kenya : un « geek » à la présidence ?

À l’heure de désigner le prochain chef de l’État, le Kenya prépare ses élections générales du 4 mars dans l’effervescence et dans la crainte de nouvelles violences. Mais au-delà des meetings qui ont animé le pays, la campagne a aussi mobilisé Internet. Réseaux sociaux, sites, débats en direct via YouTube… La Toile est devenu un passage obligé de la vie politique kényane.

La page YouTube consacrée à l’élection présidentielle kényane. © Capture d’écran

La page YouTube consacrée à l’élection présidentielle kényane. © Capture d’écran

MATHIEU-OLIVIER_2024

Publié le 22 février 2013 Lecture : 3 minutes.

Tous les candidats se sont pliés à l’exercice. Et les meilleurs dans ce domaine affichent des scores impressionnants pour une élection africaine. Sur Twitter, le Premier ministre Raila Odinga, l’ancienne ministre de la Justice, Martha Karua, avocate et militante des droits de l’homme, et le vice-Premier ministre Uhuru Kenyatta comptent respectivement 111 060, 122 198 et 101 348 abonnés. 

Sur Facebook, ils atteignent même des sommets. Hormis Raila Odinga (60 285), leur nombre de fans sur le réseau social de Mark Zuckerberg dépasse celui des twittos avec 237 396 personnes pour Martha Karua, la palme du candidat le plus « aimé » revenant à Uhuru Kenyatta et ses 383 179 fans.

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Couvertures Facebook des trois candidats les plus présents sur les réseaux sociaux (Capture d’écran du 19 février)

"Chacun de vous a le pouvoir de construire le Kenya"

L’objectif : atteindre les électeurs en les informant de leur actualité mais également séduire la diaspora dont les dons financiers alimentent les budgets de campagne. Toute la journée, les candidats postent et tweetent pour annoncer un meeting, ou pour relancer une collecte de fonds.

Martha Karua a ainsi investi la Toile afin d’attirer les dons avec un site internet et une initiative baptisée Simama Na Mama (« Donnez pour ma campagne ») et son hashtag #SinamaNaMama.

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Pluie de hashtags

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L’enjeu est de taille tant le Kenya se pose comme l’une des têtes de pont d’internet et des réseaux sociaux en Afrique. Alors que le pays espère créer 50 000 emplois d’ici 2017 dans le secteur des technologies de l’information et de la communication, la Commission kényane de la communication estime que douze millions de personnes auraient aujourd’hui accès à internet. Pour une population d’un peu plus de quarante millions d’habitants et, surtout, pour un corps électoral de 14,3 millions de citoyens officiellement inscrits sur les listes.

Si on estime à deux millions le nombre d’utilisateurs kényans sur Facebook, il est plus difficile de quantifier leur présence sur Twitter. Néanmoins, on ne compte plus les hashtags liés à la prochaine élection présidentielle : #KenyaDebates, #kenyadebate2013, #KEdebate13,  #Debate254, #KenyaDecides,  #Siasa2013, #Debate254… Point d’orgue de cet engouement pour les réseaux sociaux, le débat qui a opposé les huit candidats. Un véritable succès viral. Les thèmes abordés avaient ainsi été choisis en consultation avec les internautes, qui ont proposé près de 5 000 questions. L’événement a même éclipsé la démission du pape dans les sujets préférés des internautes kényans sur Twitter le jour du débat, en particulier à Nairobi.


©http://www.zerogeography.net

"Un moyen de contrôler le processus démocratique"

Les poids lourds d’Internet n’ont d’ailleurs pas manqué de surfer sur la vague. YouTube a en effet créé une chaîne spéciale consacrée à l’élection. Débats en direct, dont la seconde édition se tiendra le 23 février prochain, fil Twitter relié aux hashtags les plus utilisés, dernières informations en provenance des candidats… la plateforme vidéo a mis le paquet en s’appuyant sur ses expériences dans d’autres pays. Depuis avril 2011, le géant américain de l’internet a en effet expérimenté la couverture de plusieurs élections africaines.

« Nous avons travaillé sur le Nigeria, le Sénégal, le Cameroun et le Ghana », explique ainsi  Markham Nolan, éditeur chez Storyful, partenaire de Google, sur son blog, « et nous avions vu chacun de ses pays utiliser les vidéos amateurs comme un moyen de contrôler le processus démocratique ».

Un point de vue que partage Ory Okolloh, chargé des relations politiques chez Google pour l’Afrique subsaharienne :

« Nous encourageons les électeurs à voir qu’ils ne sont pas simplement des observateurs mais qu’ils doivent participer et s’engager dans le processus politique de façon démocratique, à travers des outils comme YouTube, Google Maps et Google Plus », confie-t-il.

Après les événements sanglants qui ont suivi les dernières élections au Kenya en 2008, le pays est sans doute le meilleur candidat à l’expérience.

« Les élections de 2013 au Kenya seront les plus suivies de l’histoire du pays et, pour la première fois, avec YouTube, nous pouvons attirer l’attention du monde entier, en temps réel », s’enthousiasme Markham Nolan.

Des millions de regards braqués sur le Kenya afin d’éviter que la situation, une nouvelle fois, ne dégénère au lendemain du scrutin.

Par Mathieu Olivier

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