Tunisie : l’échec de Hamadi Jebali

L’initiative de mise en place d’un gouvernement apolitique lancée par le chef de l’exécutif tunisien, Hamadi Jebali, a échoué. Mais la crise gouvernementale semble sur le point de se résoudre.

Hamadi Jebali à l’Assemblée nationale constit © AFP

Hamadi Jebali à l’Assemblée nationale constit © AFP

Publié le 19 février 2013 Lecture : 3 minutes.

Mis à jour à 11h26.

« L’initiative d’un gouvernement composé de membres n’appartenant pas à des partis politiques que j’ai soutenue, n’a pas recueilli un consensus », a déclaré Hamadi Jebali, lundi 18 février. le Premier ministre signifiait ainsi que les négociations entamées depuis le 6 février avec les principaux partis avaient tourné court.

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En Tunisie, nul ne s’en étonne : voila huit mois que toutes les tentatives de remaniement échouent, alors que parallèlement la situation du pays ne cesse de se dégrader. Pourtant, le chef du gouvernement lui même est monté au créneau en menaçant de démissionner. Une pression qui n’a pas fait plier la coalition gouvernementale tripartite ni, surtout, son propre parti, Ennahdha.

Mais selon des sources proches d’Ennahdha et du Premier ministre, l’apparent blocage politique serait sur le point de se dénouer avec la constitution d’un gouvernement restreint. Pour éviter une crise institutionnelle et la reprise des négociations à zéro, Hamadi Jebali resterait en place, d’autrant qu’il représente une figure consensuelle fédérant de nombreux courants politiques.

Le problème de la Justice

Les ministères des Affaires étrangères et de la Justice – qu’Ennahdha ne voulaient pas lâcher jusque là – pourraient être confiés à des personnallités indépendantes. Mais les analystes doutent que les islamistes cèdent le la Justice, trop de dossiers épineux, notamment de corruption, étant en cours d’instruction et l’indépendance de la magistrature restant un sujet brûlant dans l’actuelle phase de transition.

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Le ministère de l’Intérieur resterait quant à lui dans l’escarcelle d’Ennahdha, mais deux secrétaires d’État viendraient rééquilibrer la configuration. Le gouvernement en cours de constitution demandera à l’Assemblée nationale constituante de s’engager clairement sur des délais pour finaliser sa feuille de route. La direction de l’instance supérieure indépendante des élections (Isie) devrait être confiée à Kaïs Saïed, juriste constitutionnaliste connu pour son intégrité.

Machine à broyer

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En proposant un gouvernement restreint et totalement apolitique, Jebali reconnaissait l’incompétence de l’équipe en place et estimait qu’une sortie de crise était possible en déléguant la gestion des affaires courantes de l’État à des technocrates. Sortie de crise mais aussi sortie de la phase transitionnelle et préparation des élections : tels étaient les objectifs les objectifs du secrétaire général d’Ennahdha, dont la proposition aura été mise en échec par sa propre famille politique.

Rached Ghannouchi, à l’issue de la réunion du 18 février, a été on ne peut plus clair : « Il faut former un gouvernement restreint de compétences politiques et aller vers des élections ». De toute évidence, la machine islamiste broie toutes les initiatives quand elles n’émanent pas de ses mentors et le Premier ministre, contre lequel son propre parti a orchestré une levée de boucliers médiatiques et populaire, n’a pas réuni assez de voix pour obtenir un consensus. Mais Ennahdha n’a pas été la seule à faire blocage. Le Congrès pour la République (CPR) du président Moncef Marzouki a été du même avis.

L’enjeu est politique : seuls les partis élus le 23 octobre 2011 ont la légitimité pour diriger le pays, dit en substance le CPR. L’opposition, également désunie, n’a pas fait le poids non plus. Le Front populaire et Al-Aridha Al-Chaabia n’ont pas participé aux négociations. Ils mettaient de multiples conditions à l’acceptation de la proposition de Jebali. Qui a au moins eu le « mérite de réunir les partis autour d’une même table », selon ses propres paroles.

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Par Frida Dahmani, à Tunis

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