France : une descendante d’esclaves dépose plainte contre l’État pour crime contre l’humanité

Une descendante d’esclaves a porté plainte, mardi 8 janvier, contre l’État français pour crime contre l’humanité perpétré à l’encontre de ses grands-parents, affranchis en 1837. Une première pour un descendant direct qui pourrait en appeler beaucoup d’autres. Interrogé par Le Figaro, le président du Conseil représentatif des associations noires (Cran), Louis-Georges Tin, qui soutient la plaignante, prédit une « pluie de procès ».

L’abolition de l’esclavage en France en 1794. © AFP

L’abolition de l’esclavage en France en 1794. © AFP

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Publié le 8 janvier 2013 Lecture : 2 minutes.

Elle s’appelle Rosita Destival. Cette Guadeloupéenne restera dans l’histoire comme la première descendante d’esclaves à porter plainte contre l’État français pour crimes contre l’humanité. Les victimes pour lesquelles elle demande réparation : ses arrière-arrière-grands-parents, ayant vécu dans la servitude, jusqu’en 1837, date de leur affranchissement, à 13 ans, selon elle.

Depuis 2001 et la loi Christiane Taubira, du nom de l’actuelle ministre de la Justice française, l’esclavage est en effet considéré comme un crime contre l’humanité. En 2005, plusieurs associations, dont le Mouvement international pour les réparations (MIR), avaient même déjà déposé une plainte devant le tribunal de Fort-de-France.

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Cette plainte risque de prendre une tournure politique en France. Le Cran, qui soutient Rosita Destival, espère en effet faire avancer le gouvernement sur une réforme de la Constitution. L’association va ainsi déposer une Question prioritaire de constitutionalité (QPC) afin de demander la modification du décret d’abolition de l’esclavage de 1848.

Des réparations financières… aux États-Unis

En 2005, aux États-Unis, la justice avait estimé que la banque JPMorgan Chase avait construit une partie de son capital sur l’esclavage. A ce titre, l’établissement financier avait été contraint de verser des bourses d’études aux jeunes de ghettos noirs de Chicago.

Il reste en effet toujours problématique puisque, s’il prévoit des réparations, celles-ci sont destinées aux anciens exploitants. « Ce sont les anciens exploitants qui ont demandé une réparation pour compenser le manque à gagner induit par l’abolition de l’esclavage ! On oublie souvent que l’ancienne colonie française d’Haïti a payer à la France une rançon jusqu’en 1825. Le pays s’est endetté jusqu’en 1946 pour l’honorer », explique ainsi le président du Conseil représentatif des associations noires (Cran), Louis-Georges Tin, au Figaro. Son association demande donc que le décret soit modifié en faveur de l’indemnisation des descendants d’esclaves.

"Morales" ou "financières" ?

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Toute la question porte, pour le gouvernement français, sur le mot même de « réparations ». Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, s’était ainsi déclaré « très ouvert » au principe et avait annoncé une réunion interministérielle sur le sujet, avant le 7 novembre. Celle-ci n’a pourtant pas eu lieu.

Le gouvernement semble n’être pas encore très fixé sur la question. Les réparations pourraient ainsi n’être que « morales », selon les mots de la ministre du Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, et ne pas aborder de questions financières. Ce qui risque fort de ne pas plaire au Cran, qui appelle les descendants d’esclaves à faire tomber sur l’État français une « pluie de procès ».

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Par Mathieu Olivier (@MathieuOlivier)

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