Égypte : des milliers de manifestants encerclent le palais présidentiel

Mardi 4 décembre, des dizaines de milliers de manifestants ont encerclé le palais présidentiel de Mohamed Morsi, dans la banlieue du Caire. L’Égypte est plus divisée que jamais depuis que le chef de l’État s’est arrogé des pouvoirs extraordinaires afin de faire passer en force un projet de Constitution très contesté.

Manifestants devant le palais présidentiel au Caire, le 4 décembre 2012. © Gianluigi Guercia/AFP

Manifestants devant le palais présidentiel au Caire, le 4 décembre 2012. © Gianluigi Guercia/AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 5 décembre 2012 Lecture : 3 minutes.

Comme ils l’avaient annoncé, plusieurs dizaine de milliers de manifestants ont convergé, mardi 4 décembre, vers le palais présidentiel situé à Héliopolis, dans la banlieue du Caire. Ils ont réussi à s’approcher du bâtiment après avoir coupé les barbelés qui le protégeaient, faisant battre en retraite la police anti-émeute qui les bombardait pourtant de gaz lacrymogène. Mais le président Morsi ne se trouvait pas sur les lieux.

« Il a quitté le palais d’Ittihadiya à l’heure prévue après la fin des rendez-vous officiels », a affirmé un responsable de sa sécurité. Le réseau d’information alternatif égyptien Rassd-RNN a cependant posté une vidéo postée sur Internet montrant un convoi sortant du palais sous la protection de la police anti-émeutes, alors que la foule en colère criait « lâche ! » « dégage ! » et « va-t’en ! ».

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Vers 01 heure 30 locale (23 heures 30 GMT), quelque 2 000 personnes se trouvaient toujours autour du palais, dont le mur d’enceinte était couvert de graffitis anti-Morsi. Plusieurs personnes ont même tenté d’escalader les murs du palais, et des tentes ont été dressées par ceux qui entendaient passer la nuit sur place.

Impunité

La contestation ne fait que s’étendre en Égypte depuis que, le 22 novembre, Mohamed Morsi a pris un décret étendant considérablement ses pouvoirs. Ses décisions ainsi que celles de la commission constitutionnelle ne peuvent notamment plus être mise en cause par la justice. Une impunité inacceptable pour de nombreux juges et pour l’opposition, d’autant que Morsi en a profité pour faire adopter à la hâte un projet de Constitution et convoquer un référendum pour le 15 décembre.

Le projet de Loi fondamentale est accusé de ne pas protéger certains droits fondamentaux, dont la liberté d’expression, et d’ouvrir la porte à une application plus stricte de la loi islamique.

Si le Conseil supérieur de la justice a décidé de déléguer des magistrats pour superviser le référendum (ce qui est obligatoire en Égypte), le Club des juges, un syndicat professionnel a appelé à boycotter le scrutin. « Nous ne pardonnerons pas » aux juges qui superviseront le vote, a menacé son président, Ahmed al-Zind. L’opposition accuse quant à elle le projet de Loi fondamentale de ne pas protéger certains droits fondamentaux, dont la liberté d’expression, et d’ouvrir la porte à une application plus stricte de la loi islamique.

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Et Morsi a beau essayé de rassurer ses concitoyens en affirmant son décret est « temporaire », les pays est désormais complètement divisé en deux, les manifestations contre lui et celles lui étant favorables se succédant un peu partout dans le pays. Pour protester, plusieurs quotidiens indépendants et d’opposition ont également décidé de ne pas paraître mardi.

Divisions

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« L’Égypte est un pays où toutes les religions devraient vivre ensemble. J’aime la loi de Dieu et la charia (loi islamique) mais je voterai contre la Constitution parce qu’elle a divisé les gens », a dit à l’AFP Bassam Ali Mohammed, qui enseigne la loi islamique. « Nous allons boycotter le scrutin. La nouvelle Constitution est comme l’ancienne, avec des changements mineurs. Elle ne garantit pas les droits des chrétiens », a estimé de son côté Mona Chokri, une manifestante de confession chrétienne.

Les États-Unis ont quant à eux appelé au calme. « Il y a beaucoup de tensions actuellement au Caire. Nous pressons simplement les manifestants d’exprimer leurs opinions de manière pacifique », a déclaré le porte-parole adjoint du département d’État, Mark Toner. Des opposants ont aussi manifesté à Alexandrie (nord) et dans les villes de Sohag et Minya (Centre).

À Minya, des manifestants ont déchiré une photo du président devant les locaux du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), la formation de M. Morsi, provoquant des heurts avec ses partisans selon des témoins. La police a fait usage de gaz lacrymogène et trois personnes ont été blessées, a indiqué à l’AFP un responsable de la sécurité. Des milliers de personnes manifestent également sur l’emblématique place Tahrir, dans le centre du Caire.

(Avec AFP)
 

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