Tunisie : l’interview de Slim Chiboub sur Ettounsiya TV, un non événement ?
Si le « buzz » à tout prix reste l’objectif de certains médias tunisiens, il est parfois totalement vide de sens. Ce fut le cas pour l’interview accordée à Ettounsiya depuis son exil au Qatar par l’homme d’affaire et gendre de Ben Ali, Slim Chiboub. Un entretien diffusé lundi 26 novembre.
Même si son patron est incarcéré pour avoir largement usé de l’influence que lui conférait sa proximité avec l’ancien pouvoir, et si le contenu de ses émissions est plus que discutable, la chaîne de télévision Ettounsiya sait faire parler d’elle. Une poursuite de l’audience à tout prix qui lui réussit d’autant plus qu’elle peut apparaître comme victime d’un pouvoir autoritaire.
Dernière affaire en date : l’interview de Slim Chiboub, époux de l’une des filles de l’ex-raïs de Ben Ali. D’abord censurée par un magistrat – ce qui a suscité une levée de boucliers contre cette atteinte à la liberté des médias – elle a finalement été autorisée.
Slim Chiboub va-t-il rentrer en Tunisie ?
« Je veux rentrer au pays dans les plus brefs délais. Donnez-moi un passeport et je rentrerai tout de suite. Je suis prêt à tout », a déclaré Slim Chiboub dans la partie enregistrée de l’interview diffusée lundi. Mais dans un second temps, interrogé en direct à l’antenne, il s’est montré moins catégorique. « Je suis prêt à donner mon argent si la justice me trouve coupable et même dans le cas contraire, dans l’intérêt du peuple, je suis prêt à le donner. La prison vaut mieux que d’être loin de son pays. Je pense n’avoir fait de mal à personne pour être emprisonné », a-t-il dit. (Avec AFP).
Avant sa diffusion, lundi 26 novembre au soir, la chaîne et Moez Ben Gharbia, présentateur de l’émission « 9 massaa » (« 9 heures du soir »), n’ont pas manqué de tirer parti de cet imbroglio, laissant entendre que le contenu de l’interview était est à même de déranger le pouvoir. Le débat a ainsi pris de l’ampleur, certains s’opposant à ce que des figures de l’ancien régime s’expriment, d’autres soutenant que tout le monde a droit à la parole. Mais au final, l’interview n’a tenu aucune de ses promesses.
Faussement agressive
Maladroite, faussement agressive, hésitante et vide de contenu, elle n’a apporté ni révélations sur la période trouble de la révolution tunisienne, ni éclairages sur le rôle de Slim Chiboub et les bénéfices qu’il a pu obtenir sous l’ancien régime grâce à son influence auprès de Ben Ali. Son petit mea culpa et ses excuses au peuple de Tunisie n’auront surpris personne tant ils avaient été annoncés. Ils ne justifiaient en tout cas ni la censure, ni le tapage médiatique qui a précédé la diffusion de l’interview.
Seul intérêt de près des trois heures d’antenne : la mise en évidence de l’absence d’une justice transitionnelle efficace. « Beaucoup de bruit pour rien ! résume un téléspectateur désabusé. Qu’on nous parle des enjeux, de la Constitution, des élections et de ce qui se trame aujourd’hui. Ce qui s’est passé hier, nous le savons depuis longtemps ! »
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Par Frida Dahmani, à Tunis
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