Crise malienne : une intervention militaire calquée sur le modèle somalien ?
Au lendemain de la réunion du Conseil européen qui s’est tenue les 18 et 19 octobre à Bruxelles, les contours d’une intervention armée pour reconquérir le Nord-Mali se précisent. Comme en Somalie, la France souhaiterait européaniser la coopération avec Bamako, notamment par le biais d’une mission militaire d’instruction pour former les soldats maliens qui opéreront en première ligne, aux côtés de la future Micema – équivalent ouest-africain de l’Amisom.
« Gravement préoccupée par la crise politique, sécuritaire et humanitaire qui continue d’affecter le Mali », l’Union européenne (UE) semble vouloir recourir aux « recettes » qui ont contribué à contrecarrer les jihadistes en Somalie, à commencer par l’impérieuse nécessité de disposer de forces nationales efficientes, capables de constituer le fer de lance visible d’une action énergique.
Si un bon équipement s’avère important, c’est surtout le « regonflage » du moral des soldats et leur entraînement qui conditionneront la valeur de la nouvelle armée malienne. Tâches qu’évoquent les conclusions de la réunion du Conseil européen qui s’est tenu les 18 et 19 octobre à Bruxelles, parlant de la « planification d’une éventuelle mission militaire dans le cadre de la PSDC [Politique de sécurité et de défense commune, NDLR] en vue de contribuer à la réorganisation et à l’entraînement des forces de défense maliennes », avec pour corollaire leur coopération avec la future Mission de la Cedeao au Mali (Micema, qui devrait être sous mandat de l’Union africaine et de l’ONU).
Si aucune décision concrète n’a été prise lors de cette réunion, un diplomate français confie néanmoins que Paris voudrait une participation des pays de l’UE, via des instructeurs militaires. Une fois le principe d’une intervention entériné par le Conseil de sécurité de l’ONU, ces hommes formeraient, au Mali, entre quatre et six bataillons, regroupant 3 000 hommes prêts à entrer en action au début de 2013.
Restructuration
Un projet qui s’inspire clairement de la mission militaire européenne en Somalie, l’European union training mission Somalia (EUTM Somalia), déployée en 2010 pour venir en soutien à la mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom). Dans un document officiel, l’Europe avait identifié les forces de sécurité nationales somaliennes « comme une entité en besoin urgent d’un soutien pour sa restructuration ». Des mots qui rappellent singulièrement ceux qui figurent dans les conclusions du 19 octobre.
Certains formateurs s’interrogent néanmoins sur la validité réelle du concept de l’UE, qui n’a pas encore pris la décision de poursuivre ou non l’expérience, alors qu’elle aurait dû le faire cet été.
En décembre 2012, date de fin de la mission, c’est un total de 675 instructeurs et personnels civils européens qui auront ainsi formé plus de 3 000 soldats somaliens, pour l’essentiel sur le territoire ougandais, avant qu’ils n’affrontent, aux côtés des troupes de l’Amisom, les shebabs. Le nombre d’instructeurs affectés à ce programme permet d’entrevoir quels seraient les besoins humains d’un projet équivalent pour le Mali. Mais certains formateurs s’interrogent sur la validité réelle du concept de l’UE, qui n’a pas encore pris la décision de poursuivre ou non l’expérience, alors qu’elle aurait dû le faire cet été.
Forte présence sur zone
À l’initiative du projet pour le Mali, la France détacherait de nombreux éléments, ainsi que la Grande-Bretagne et l’Espagne, tandis que l’Italie et la Belgique pourraient également s’impliquer. En revanche, bien que disposé à soutenir une intervention, Berlin refuse de contribuer à une mission de formation, prudence encore plus prononcée en ce qui concerne la Pologne et les pays nordiques. Enfin, l’Europe fournirait le matériel nécessaire à l’équipement de ces bataillons, en particulier des moyens de transmissions et des véhicules.
En attendant la mise sur pied de ce programme, la perspective de sa création accentue davantage la pression sur les islamistes du Mali, avec un message en filigrane : il est encore temps pour les « modérés », de s’éloigner des groupes les plus belliqueux.
Quant aux instructeurs européens, même si officiellement ils ne devraient pas être engagés au combat, leur présence sur zone serait importante. Au cas où…
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