Nord-Mali : d’après Le Drian, une intervention militaire pourrait avoir lieu dans « quelques semaines »
Le ministre français de la Défense Jean-Yves le Drian a assuré mardi 16 octobre qu’une intervention militaire africaine au Nord-Mali, « sanctuaire terroriste », pourrait avoir lieu dans « quelques semaines ».
Pour Paris, la marge de manoeuvre malienne est étroite. D’un côté, la France affiche la fermeté contre le terrorisme et soutient une intervention militaire au Nord-Mali. De l’autre, elle doit gérer le dossier des six otages toujours détenus au Sahel par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Après la diffusion d’une vidéo dans laquelle les jihadistes menacent la vie de ces otages, enlevés au Mali en novembre 2011, François Hollande a reçu leurs proches le 15 octobre.
Si l’espoir d’une libération a été souligné, Paris ne dévie toutefois pas de la « ligne » extrêmement ferme affichée depuis plusieurs mois. Et se refuse, du moins officiellement, à faire entrer la question des otages dans l’équation complexe d’une intervention militaire africaine au Nord-Mali, occupé depuis six mois par des groupes liés à Aqmi qui sèment la terreur au nom de la charia.
François Hollande a encore réitéré ce week-end à Kinshasa « la détermination » de la France et son soutien à une intervention africaine au Mali. Celle-ci pourrait avoir lieu « dans quelques semaines », a assuré mardi 16 octobre son ministre de la Défense, Jean-Yves le Drian.
Incompréhension
Quelques jours plus tôt, le président français avait insisté sur les « deux devoirs » de la France : « libérer nos otages et libérer le Mali des terroristes ».
« Il semble qu’il y a un changement de braquet. À l’époque Sarkozy, l’accent était mis sur les otages, et là on parle davantage intervention » militaire, note Pierre Boilley, historien et chercheur spécialisé sur le Sahel et le Sahara. Ce discours de fermeté a d’ailleurs entraîné des réponses d’Aqmi ou de ses affidés, qui depuis un mois « se sont rappelés au bon souvenir de l’État français » avec des messages menaçants ou la diffusion d’une vidéo d’otages, souligne M. Boilley.
Les otages « sont dans une bonne situation », a ainsi déclaré lundi soir à France 2 un homme présenté par la chaîne comme un porte-parole d’Aqmi qui a accusé les autorités française de « manquer de sérieux » dans les négociations en ne répondant pas à des « demandes pourtant légitimes et raisonnables ».
Les familles ont, elles, « du mal à comprendre ce qui se trame. Quel est l’objectif d’une mission militaire au Nord-Mali ? A-t-on l’intention d’éliminer les chefs d’Al-Qaïda ? Et dans ce cas, le gouvernement a-t-il prévu une mission simultanée pour sauver les otages ? », demande Pascal Lupart, président du comité de soutien des otages Philippe Verdon et Serge Lazarevic. « Je conçois, en tant que citoyen, le discours de fermeté. Mais les familles se demandent, elles : où cette fermeté va-t-elle nous mener ? », poursuit-il.
"Arrêter de payer"
« Il faut arrêter de payer. Je comprends que c’est difficile à admettre pour les familles, mais tout tourne autour de ça », martèle-t-il, rappelant que la Grande-Bretagne, un des rares pays à ne pas verser de rançon, « n’a plus d’otages » au Sahel. Londres a payé le prix fort avec un ressortissant, Edwin Dyer, exécuté en 2009 au Mali.
Paris paye-t-il ? « Il y a une vraie réflexion en cours, c’est une question de philosophie d’État », confiait récemment à l’AFP un haut responsable français.
Depuis 2003, les enlèvements au Sahel ont rapporté quelque 50 millions de dollars (environ 38 millions d’euros) aux preneurs d’otages, selon des sources proches du dossier malien. « Il faut absolument une approche internationale plus rigoureuse face à une affaire aussi grave », lance M. Loncle, en fustigeant « la faiblesse, pour ne pas dire la lâcheté de l’Union européenne sur ce sujet ».
Paris, « vaguement soutenu » par des Américains en campagne électorale et par les Britanniques, reste « complètement isolé » sur le dossier malien, estime M. Boilley, qui s’interroge sur les marges de manoeuvre de la France au Mali . M. Le Drian a réaffirmé le 15 ocotbre que la France soutiendrait logistiquement et matériellement l’intervention africaine mais a de nouveau exclu l’envoi de troupes au sol.
(Avec AFP)
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