Avec Maroc Télécom, Etisalat à deux doigts du podium

Pour le géant émirati Etisalat, le rachat de Maroc Télécom n’est plus qu’une formalité. Il passera ainsi de la cinquième à la troisième place des opérateurs continentaux, devant Airtel et Orange.

Le siège du groupe Etisalat, à Abou Dhabi. © Reuters

Le siège du groupe Etisalat, à Abou Dhabi. © Reuters

Publié le 26 août 2013 Lecture : 4 minutes.

C’est une affaire presque entendue. Sauf extraordinaire, d’ici à la fin de 2013, l’émirati Etisalat aura mis la main sur Maroc Télécom… et deviendra l’un des tout premiers groupes de téléphonie sur le continent. Dans le cadre d’un recentrage de ses activités, le français Vivendi, lourdement endetté, vend en effet les 53 % du capital de l’opérateur marocain qu’il détient. Et parmi les acheteurs qui s’étaient manifestés en 2012, seul Etisalat reste en piste après le retrait du qatari Ooredoo (ex-Qtel), du sud-africain MTN et du sud-coréen KT. Fin juillet, Vivendi et Etisalat ont ainsi annoncé être entrés en négociations exclusives.

L’offre d’Etisalat, à environ 8,25 euros par action (92,60 dirhams), valorise à 3,9 milliards d’euros la part de Vivendi. Le groupe français percevrait également 310 millions d’euros au titre du dividende 2012. Seule inconnue : l’obtention des autorisations réglementaires, que ce soit dans le royaume ou dans les autres pays où Maroc Télécom est aujourd’hui présent. Après le succès de son investissement en 2001 dans l’opérateur historique mauritanien Mauritel, le groupe d’Abdeslam Ahizoune a en effet acquis des participations majoritaires dans le burkinabè Onatel (2006), Gabon Télécom (2007) puis le malien Sotelma (2009).

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Réservoir

De son côté, Etisalat est loin de découvrir l’Afrique, qui représente actuellement 12 % des revenus du groupe et quelque 8 % de sa marge opérationnelle. Deux pays sont aujourd’hui les piliers du groupe émirati en Afrique : l’Égypte, avec ses 22,8 millions d’abonnés, représente plus de 60 % de ses revenus africains, et le Nigeria, avec 15,3 millions d’abonnés, offre des taux de croissance de plus de 30 % par an, que ce soit en nombre de clients ou en chiffre d’affaires. Sachant que le Nigeria est d’ores et déjà le plus gros marché de téléphonie mobile du continent avec plus de 90 millions d’abonnés en 2012, que la part de marché d’Etisalat s’y établit à 14 % et que le taux de pénétration n’y est encore que de 60 %, il s’agit d’un précieux réservoir de croissance que le groupe émirati compte bien exploiter. Le reste de ses abonnés africains (soit 12,4 millions de personnes) est réparti entre la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Togo, le Gabon, le Niger, la Centrafrique, la Tanzanie et le Soudan. Dans ces pays, c’est notamment à travers l’opérateur Atlantique Télécom et la marque Moov qu’Etisalat s’est installé, depuis le milieu des années 2000.

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Avec les 35 millions d’abonnés de Maroc Télécom, le groupe passerait d’un seul coup de 50 millions à 85 millions de clients en Afrique… et ferait un bond dans le classement des grands opérateurs continentaux. Actuellement cinquième, il prendrait la troisième place, derrière MTN et Vodafone, mais devant Airtel et Orange, selon le classement d’African Telecom News. La fusion générerait peu de destructions, car les deux opérateurs sont étonnamment complémentaires dans leur couverture du continent : le seul pays où ils sont actuellement en concurrence frontale est le Gabon.

D’un seul coup, le nombre de ses abonnés africains passera de 50 à 85 millions.

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« À Libreville, Etisalat devra probablement vendre l’un des deux opérateurs qu’il contrôlerait de fait, mais c’est anecdotique, estime un analyste. Cette acquisition reste une opportunité unique de se développer en Afrique, c’est-à-dire où réside la croissance des prochaines années. Etisalat, qui avait pourtant annoncé faire une pause dans les acquisitions, ne pouvait pas laisser passer cette occasion. » Le rachat de Maroc Télécom est donc essentiellement un moyen d’affirmer son implantation sur le continent, mais aussi de bénéficier du savoir-faire des équipes de l’opérateur marocain, qui pourraient se voir confier le management de l’ensemble des activités africaines du nouveau géant.

Roaming

Pour les utilisateurs des réseaux, en revanche, il n’est pas sûr qu’il faille attendre beaucoup de la fusion. Certes, les capacités d’investissement d’Etisalat sont considérables, et les autorités marocaines veulent s’assurer que le nouveau propriétaire du numéro un du marché renforce les infrastructures existantes. « Etisalat a une réputation de service excellente et bénéficie d’une situation financière très confortable, fait remarquer Petr Molik, directeur de l’analyse financière chez Mena Corp. Mais la phase d’intégration ne devrait pas provoquer de grands changements en termes de service ou de marketing, si ce n’est pour le roaming [connexion interpays]. » L’offre de tarifs avantageux pour les communications transnationales entre les différents pays du nouveau réseau est en effet un argument commercial simple à mettre en oeuvre et dont le groupe émirati est familier. Déjà, en 2010, Etisalat avait lancé le Moovpassport, qui permet aux usagers d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale de profiter de prix intéressants, et le Moov Hadj Roaming, pour ceux effectuant le pèlerinage à La Mecque.

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