Maghreb : les Guignols tunisiens font rire les Marocains

Avec ses marionnettes marocaines, les « Guignols du Maghreb », émission diffusée par la chaîne privée tunisienne Nessma TV, connaît un succès inédit au Maroc.

La marionnette du Premier ministre marocain Abdelilah Benkirane. © Capture d’écran Nessma TV

La marionnette du Premier ministre marocain Abdelilah Benkirane. © Capture d’écran Nessma TV

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Publié le 4 octobre 2012 Lecture : 3 minutes.

Ils sont nombreux, de Tanger à Casablanca en passant par Rabat, à s’esclaffer régulièrement devant la marionette de leur Premier ministre Abdelilah Benkirane. À défaut d’avoir leur propre programme satirique, les Marocains se rabattent sur les « Guignols du Maghreb », diffusé sur la chaîne tunisienne Nessma TV.

Dans un pays où toutes les télévisions sont publiques, un telle émission n’existe pas au Maroc où de nombreux tabous demeurent. Pas question, par exemple, d’imaginer des marionnettes du roi Mohammed VI ou même d’autres membres de sa famille. Les « Guignols du Maghreb » n’ont pas encore franchi le pas. Mais en attendant, le programme tunisien, inspiré des Guignols français de Canal+, a jeté son dévolu sur le chef du gouvernement marocain, l’islamiste Abdelilah Benkirane. Fidèle à une réputation que beaucoup de Marocains lui reconnaissent, il y est présenté comme un personnage affable, au sens de l’humour aiguisé.

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« Sa marionnette, la voix et la manière de parler reflètent très bien la personnalité de M. Benkirane. Je vois régulièrement ces guignols quand je suis au bureau », avoue Mouad, un cadre bancaire de 39 ans à Rabat. « Un jour, nous aurons nos guignols nous aussi, mais il faudra du temps. En attendant, on profite de ce que font les Tunisiens sur nous », indique pour sa part une journaliste installée à Casablanca.

Dans l’un des épisodes de ce programme, la marionnette du président américain Barack Obama demande ainsi à celle de M. Benkirane de renforcer les mesures de sécurité pour protéger l’ambassadeur des États-Unis au Maroc. Réponse ironique du Premier ministre marocain, représenté en habits traditionnels : « Bien sûr, je vais vider tout Casablanca et il y restera tout seul. Je vais lui amener un grand couscous et, pour que vous soyez tranquille, votre ambassadeur pourra même passer la nuit chez moi ».

"Contagieux"

À la question « Qui a décidé de nommer un nouveau sélectionneur » de l’équipe nationale du Maroc après le départ du Belge Eric Gerets, la marionnette d’Abdelilah Benkirane joue sur la dérision, en allusion à la répartition des pouvoirs entre le gouvernement et le roi du Maroc. « J’ai contacté le ministre des Sports, qui a contacté le président de la Fédération de football… qui a contacté le cabinet royal », ironise-t-elle.

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Relayée par la plupart des sites d’information marocains, la marionnette de M. Benkirane suscite des débats passionnés parmi les internautes. « Je ne suis pas contre les Guignols, mais j’aurais aimé que ce soit des Marocains, de l’intérieur ou de l’extérieur, qui les animent et non les Tunisiens », écrit un internaute sur le site hespress.com, le plus lu du pays. « Même en Tunisie ils cernent bien nos problèmes. Chapeau », estime un autre sur le même site.

Ce type de programme peut être « contagieux » via les sites internet et les réseaux sociaux, souligne Abdelwahab Rami, de l’Institut de journalisme de Rabat. Selon lui, la personnalité du Premier ministre marocain et son sens de l’humour se prêtent au concept « Guignols ». Le « vrai » Benkirane « connaît du succès auprès des Marocains parce qu’il raconte souvent des blagues dans ses discours », note-t-il.

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« Je demande à Dieu que tous nos jours se passent en joie », a déclaré le Premier ministre lors d’une réunion électorale cette semaine. « Je dirai à ces artistes que si leurs intentions sont bonnes et qu’ils veulent juste faire rire les gens à travers ma personnalité, je n’ai pas de problème et je leur pardonne ».

Un autre programme de Guignols, plus acerbe, avait vu le jour en Tunisie après la chute de Ben Ali sur la chaîne Ettounissiya TV. Mais son patron, le producteur Sami Fehri, a été incarcéré fin août et l’émission s’est interrompue.

(Avec AFP)

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