L’Afrique du Sud commémore Marikana dans la division

L’Afrique du Sud commémore le premier anniversaire de la fusillade policière de Marikana sur fond de radicalisation syndicale et de crise profonde pour l’industrie minière.

Un an après, les femmes des victimes de la fusillade de Marikana manifestent contre la violence policière. DR

Un an après, les femmes des victimes de la fusillade de Marikana manifestent contre la violence policière. DR

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Publié le 16 août 2013 Lecture : 3 minutes.

Un an après la fusillade de Marikana – durant laquelle la police sud-africaine a ouvert le feu sur des mineurs en grève, faisant 34 morts et 78 blessés -, de nouvelles négociations salariales sont en cours entre syndicats et entreprises du secteur minier. Ces concertations sont marquées par le durcissement des revendications des ouvriers, la rivalité violente entre les syndicats sur fond de crise pour l’industrie minière.

Les conséquences économiques de Marikana

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Les grèves de l’an dernier ont eu un impact considérable sur la production industrielle et sur les relations syndicales en Afrique du Sud. Les pertes occasionnées dans l’industrie de l’or et du platine par les grèves de 2012 sont évaluées à 10 milliards de rands (environ 1 milliard de dollars) par les autorités sud-africaines. Le britannique Lonmin, exploitant de la mine de Marikana, a ainsi enregistré une perte nette de 410 millions de dollars pour l’année fiscale 2012. D’après les estimations de la Chambre des mines, chaque jour de grève généralisée dans les mines d’or occasionne 34 millions de dollars de production perdue et 900 000 dollars de recettes en moins pour l’État.

Or l’industrie minière sud-africaine, premier employeur privé du pays avec 500 000 salariés, traverse une crise profonde. En vingt ans, l’Afrique du Sud est passée du rang de premier producteur mondial d’or, avec 1 000 tonnes produites par an, au sixième rang aujourd’hui, avec seulement 156 tonnes produites l’an dernier. Le prix du platine a quant à lui baissé de 20% en deux ans. Signe des temps, Amplats, premier producteur mondial de platine, prévoit le licenciement de 6 000 employés et la fermeture de deux sites miniers jugés non-rentables.

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Les syndicats exigent des hausses salariales de 60 à 150%

C’est dans ce contexte délicat pour l’industrie minière que se déroulent les négociations salariales entre syndicats et industriels. Selon la Chambre des mines, les salaires dans l’industrie minière ont crû de 12,3% par an en moyenne depuis cinq ans. Fortes de ces chiffres, les entreprises minières ont proposé début août une revalorisation de 5,5% des salaires et des indemnités qui augmenteraient le salaire de base dans l’industrie à 9 095 rands par mois (soit 900 dollars). Il est aussi proposé aux salariés de percevoir une augmentation supplémentaire de 1% en fonction des performances de l’entreprise.

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Mais ces propositions sont bien en deçà des revendications des principaux syndicats de l’industrie. Le NUM (Syndicat des travailleurs miniers) demande une augmentation d’au moins 60%, tandis que l’Amcu (Association des travailleurs miniers et de la construction) exige une hausse de 150%. Son allié, le groupe politique Economic Freedom Fighters, fondé par Julius Malema, ex-leader de la branche jeunesse de l’ANC, le parti au pouvoir, souhaite porter le salaire d’entrée à 12 500 rands par mois.

Rivalités et violences syndicales

Ces revendications salariales sont rendues plus radicales encore par les rivalités entre NUM et Amcu. Minoritaire il y a un an, ce dernier, principale force derrière les grèves d’août 2012 à Marikana, est désormais le principal syndicat de l’industrie du platine. NUM, réputé proche de l’ANC, reste le premier syndicat de l’industrie minière, mais perd graduellement son emprise historique.

Daluvuyo Bongo, membre du NUM et Mawethu Steve, membre d’Amcu et témoin clé de l’enquête sur la fusillade de Marikana, ont été abattus à quelques semaines d’intervalle.

Les rivalités entre syndicats ont récemment pris une tournure plus violente. Nbongile Madolo, responsable du NUM a été assassinée lundi 12 août devant son domicile. En juin dernier, le corps d’un membre d’Amcu a été retrouvé, pieds et poings liés sur un site minier. Un mois plus tôt, Daluvuyo Bongo, membre du NUM et Mawethu Steve, membre d’Amcu et témoin clé de l’enquête sur la fusillade de Marikana, avaient été abattus à quelques semaines d’intervalle.

Les autorités sud-africaines ont réagi en créant cette semaine une commission de dialogue, le Mine Crime Combating Forum, afin de lutter contre la recrudescence de la violence entre syndicats… une initiative boudée par le syndicat minoritaire Solidarity. La branche régionale de l’ANC et le NUM ont pour leur part refusé de participer à une cérémonie commémorant les morts de Marikana, organisée par un groupe proche de l’Amcu.

Pendant ce temps-là, la grogne s’étend à d’autres secteurs. Le Numsa (National Union of Metalworkers of South Africa), le principal syndicat du secteur métallurgique, a appelé 30 000 ouvriers du secteur automobile à se mettre en grève illimitée dès lundi 19. Au cœur des revendications, la paye, jugée trop basse.

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