« Innocence of Muslims » : la justice égyptienne engage des poursuites contre sept coptes de la diaspora

Le procureur général d’Égypte a engagé des poursuites contre sept membres de la diaspora copte, tous soupçonnés d’avoir été impliqués dans la production et diffusion du film anti-islam « Innocence of Muslims ». Morris Sadek, qui a oeuvré à la promotion du film, fait partie des individus poursuivis. La communauté copte égyptienne craint désormais une nouvelle vague de violences à son encontre.

Morris Sadek protestant contre la construction d’une mosquée près de Ground Zero. © Capture d’écran YouTube

Morris Sadek protestant contre la construction d’une mosquée près de Ground Zero. © Capture d’écran YouTube

Publié le 18 septembre 2012 Lecture : 3 minutes.

Mardi 18 septembre, le procureur général d‘Égypte a annoncé qu’il lançait des poursuites à l’encontre de sept coptes égyptiens résidant aux États-Unis. Ils sont tous soupçonnés d’avoir participé à la production ou la distribution d’« Innocence of Muslims » (« L’Innocence des musulmans »), le film islamophobe qui a entraîné une importante vague de manifestations antiaméricaines et de violences dans le monde arabo-musulman.

La date d’un procès n’a pour l’heure pas été fixée. Les sept hommes poursuivis sont Morris Sadek, Nabil Bissada, Esmat Zaklama, Elia Bassily, Ihab Yaacoub, Jack Atallah et Adel Riad. Un communiqué du parquet précise qu’ils sont accusés d’insultes à la religion islamique, d’insultes au Prophète et d’incitation à la haine religieuse.

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Brûlot islamophobe

Selon l’accusation, les sept coptes auraient des liens avec le film « Innocence of Muslims », un brûlot islamophobe qui présente l’islam comme une religion violente, dépeint le prophète Mahomet comme un voyou aux pratiques déviantes (pédophilie, légèreté des mœurs, envies suicidaires…) et a offensé de nombreux musulmans.

Parmi les sept hommes poursuivis, seul le nom de Morris Sadek était jusqu’alors apparu dans les médias suite à l’indignation suscitée par le film dans le monde arabo-musulman. Le New-York Times décrit ce septuagénaire comme étant leader d’une association copte basée à Washington, la National Americain Coptic Assembly (« L’Assemblée nationale américaine copte »). Connu pour ses diatribes hostiles à l’islam, M. Sadek a été l’un des premiers à populariser « Innocence of Muslim », notamment en diffusant, au début de septembre, une version sous-titrée en arabe depuis sa page Facebook, rapporte le Los Angeles Times.

Après l’attaque de l’ambassade américaine à Benghazi, qui a causé le mort de l’ambassadeur Christoper Stevens ainsi que de trois autres fonctionnaires américains, M. Sadek s’est dit « désolé » lors d’un entretien téléphonique accordé à Reuters. Il a assuré que le soutien qu’il a apporté au film visait surtout à « mettre en lumière la discrimination que subissent les chrétiens » en Égypte. M. Sadek a dit ne pas considérer le film comme une offensive contre l’islam, précisant qu’en tant que dirigeant d’une association copte, c’est surtout la première partie du film – où des salafistes s’en prennent en toute impunité à des coptes égyptiens sous l’œil complice des forces de l’ordre – qui l’intéressait et qu’il tentait de promouvoir.

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Le nom de M. Sadek est ressorti lors de certains slogans hostiles scandés par des manifestants en Égypte, indique également Reuters. Celui de Nakoula Basseley Nakoula, présenté comme un copte originaire d’Égypte à l’origine du long métrage, n’apparaît en revanche pas sur la liste des sept individus poursuivis par la justice égyptienne.

Indignation en Égypte

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La diffusion sur YouTube d’un extrait de 14 minutes du film amateur, produit par une poignée de chrétiens extrémistes américains, a déclenché une vague de protestations anti-américaines dans une vingtaine de pays, dont l’Égypte.

Le 11 septembre, les forces de l’ordre égyptiennes ont été prises au dépourvu lorsque des manifestants ont attaqué l’ambassade des États-Unis au Caire, escaladant les murs et arrachant un drapeau américain pour hisser à sa place un drapeau islamiste noir. Suite à l’incident, le président américain Barack Obama a appelé son homologue égyptien Mohamed Morsi pour lui faire part de sa vive inquiétude. Le président égyptien, issu des Frères musulmans, a condamné les violences mais apporté son soutien aux manifestations pacifiques contre le film.

Dans les jours qui ont suivi, les forces de sécurité ont affronté les manifestants et les ont empêchés d’approcher l’ambassade, entraînant la mort d’un manifestant, vendredi 14 septembre.

Manifestation copte suite à l’incendie d’une église le 8 mars 2011.

© AFP

Les coptes en danger ?

La communauté copte redoute que l’implication d’extrémistes coptes dans la production et la diffusion du film ne menace la sécurité de la communauté, contre laquelle les attaques se sont multipliées ces dernières années.

Les autorités coptes ont pourtant condamné « Innocence of Muslims » et des associations coptes ont manifesté aux côtés des musulmans afin de leur témoigner leur solidarité. Les coptes affirment subir des discriminations au pays des pharaons. La loi égyptienne est plus souple pour la construction de mosquées que pour celle d’églises. De même, les coptes s’estiment relégués à des emplois de second rang, notamment dans l’administration. Ils représentent de 6 à 10% de la population égyptienne, estimée à 83 millions d’âmes.

La communauté chrétienne d’Égypte a surtout tendance à craindre pour sa sécurité depuis l’arrivée au pouvoir des Frères Musulmans et une éventuelle complaisance de l’armée vis-à-vis des attaques commises par des salafistes à leur encontre. Des violences interreligieuses ont fait 13 morts en mars 2011. Depuis, la situation semble apaisée, bien que la communauté reste sur le qui-vive.

(Avec AFP)

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