Loïk Le Floch-Prigent au centre d’une affaire interne à la politique togolaise, selon son avocat

Auditionné par la justice togolaise, qui le suspecte de complicité dans une affaire d’escroquerie internationale, Loïk Le Floch-Prigent n’a fait aucune déclaration. Mais son avocat français, Me Klugman, évoque la piste de la politique intérieure au Togo pour expliquer les mésaventures de l’ancien PDG d’Elf. Explications.

Loïk Le Floch-Prigent a une nouvelle fois maille à partir avec la justice. © AFP

Loïk Le Floch-Prigent a une nouvelle fois maille à partir avec la justice. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 18 septembre 2012 Lecture : 3 minutes.

Loïk Le Floch Prigent a été entendu, lundi 17 septembre, par un juge du tribunal de Lomé, qui doit reprendre ses auditions mardi. L’ancien PDG d’Elf, déjà condamné en 2003 à cinq ans de prison dans l’affaire Elf pour des malversations financières, n’a fait aucune déclaration à son arrivé au palais. Il était escorté par trois gendarmes mais n’était pas menotté, selon les témoins.

Son avocat togolais, Me Rustico Lawson-Bankou, a affirmé que Le Floch-Prigent avait accepté de coopérer avec la justice du Togo et qu’il n’avait « pas subi de mauvais traitements ». Mais son avocat français, Me Patrick Klugman, craint quant à lui pour « l’intégrité physique de M. Le Floch-Prigent », qui va bientôt avoir 69 ans, et « doit subir une intervention médicale prévue le 26 septembre à Paris ».

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Le contenu des auditions en cours suscite de nombreuses questions. Sous le coup d’un mandat d’arrêt de la justice togolaise pour son implication présumée dans une escroquerie internationale, Le Floch-Prigent a été arrêté à Abidjan, vendredi 14 septembre au soir, alors qu’il s’apprêtait à monter dans un avion d’Air France. Puis transféré le lendemain au Togo sans autre forme de procès.

Transfèrement éclair

Première question : pourquoi une procédure aussi rapide, dénoncée par Me Klugman comme ne respectant pas les règles d’extradition ? Pour un magistrat ivoirien, il s’agirait en fait d’une « procédure de police à police, suivant la convention d’Interpol ». Problème : l’organisme policier international explique que ladite convention n’existe pas, et évoque plutôt un « échange bilatéral ».

L’hypothèse d’un règlement de l’affaire au plus haut niveau, c’est-à-dire entre chefs d’État ivoirien et togolais, est loin d’être illogique.

L’hypothèse d’un règlement de l’affaire au plus haut niveau, c’est-à-dire entre les chefs d’État ivoirien et togolais, est donc loin d’être illogique. D’autant que les relations de coopération judiciaire sont au beau fixe entre la Côte d’Ivoire et le Togo, depuis que ce dernier pays est devenu le seul à avoir exécuté un mandat d’arrêt international des autorités ivoiriennes visant un exilé pro-Gbagbo, à savoir l’ex-ministre de la Défense ivoirien, Moïse Lida Kouassi.

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Autre interrogation : quelle est la réalité des faits reprochés à Loïk Le Floch-prigent ? Officiellement, la justice togolaise souhaite connaître son rôle dans une affaire d’arnaque à la nigériane, qui aurait coûté 48 millions de dollars à un homme d’affaire émirati, Abbas El Youssef, et dans laquelle l’ancien ministre togolais, Pascal Bodjona, a été inculpé et écroué.

Règlements de compte

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Abbas El Youssef est en conflit avec un homme d’affaires togolais, Bertin Sow Agba. Il l’accuserait de l’avoir entraîné dans une escroquerie, qui paraît cependant assez peu vraisemblable selon les détails qui ont « fuité » vers la presse. On lui aurait fait miroiter une commission pour son aide dans le déblocage de fonds (275 millions de dollars) appartenant à des soi disant ayant droit de l’ancien président ivoirien Robert Gueï.

Par ailleurs, Abass Al Youssef serait propriétaire d’une entreprise pétrolière qui emploie Loïk Le Floch-Prigent comme conseiller. Mais selon une source judiciaire togolaise, il accuserait l’ancien PDG d’Elf d’être le « conseiller personnel de Bertin Sow Agba » et d’être « le chef d’orchestre dans cette affaire d’escroquerie ».

Quoi qu’il en soit, le règlement de compte économique entre deux hommes d’affaires pourrait se doubler d’un règlement de compte politique. Un avocat de M. Bodjona, Jil-Benoit Afangbedji, a avancé dimanche que son client avait été impliqué à cause de rumeurs sur sa candidature à la présidentielle en 2015. Et Me Klugman de lâcher: Loïk Le Floch-Prigent « est l’enjeu d’une affaire intérieure à la politique togolaise ».

(Avec AFP)

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