Afrique du Sud – Marikana : les négociations toujours dans l’impasse avec Lonmin
L’accord conclu entre les syndicats de mineurs majoritaires à Marikana et Lonmin, l’exploitant de la mine de platine sud-africaine, a été rejeté par les mineurs grévistes ce 6 septembre. Le retour à la normale n’est toujours pas à l’horizon alors que les derniers mineurs en détention ont été libérés par la justice.
Trois semaines jour pour jour après l’intervention sanglante des forces de police sud-africaines dans la mine de Marikana, qui a causé la mort de 34 mineurs grévistes, aucune issue ne semble se dessiner dans le conflit salarial qui oppose les mineurs à Lonmin. Ce conflit a déjà causé la mort de 44 mineurs – dix victimes étaient déjà à déplorer en raison de violences intersyndicales survenues avant le massacre du 16 août – et plongé l’Afrique du sud en état de choc.
Tout avait commencé début août par la grève sauvage décrétée par 3 000 mineurs qui revendiquaient un triplement de leur salaire.
"Nous ne pouvons pas accepter de signer ça".
Dans la nuit de mercredi à jeudi, l’exploitant du site de platine Lonmin, les syndicats majoritaires et le ministère du Travail avaient convenu d’un accord qui envisageait la reprise du travail à une date non déterminée et l’ouverture de négociations salariales qui se baseraient sur les revendications des grévistes. Mais l’accord a été rejeté par les mineurs grévistes et les autres syndicats.
« Nous ne pouvons pas accepter de signer ça. Si on signe ce truc, les ouvriers doivent reprendre le travail. Mais ils ne vont pas reprendre le travail », a déclaré à l’AFP le représentant des grévistes non-syndiqués, Zolisa Bodlani.
Pour les grévistes et la petite formation AMCU, qui avait encouragé la grève sauvage début août, la reprise du travail reste conditionnée à une hausse du salaire. Pour Lonmin, au contraire, les négociations ne pourront s’ouvrir qu’une fois le travail repris.
Alors qu’avant la grève, le salaire des mineurs était, d’après leurs témoignages, de l’ordre de 4 000 rands (400 euros) mensuels, les mineurs exigent désormais un salaire de 12 500 rands (1 250 euros) pour reprendre le chemin des mines.
La démocratie sud-africaine est "un cauchemar".
Jeudi, la justice sud-africaine a remis en liberté les 104 derniers des mineurs arrêtés après le drame du 16 août au nom d’une loi anti-émeute désuète datant de l’apartheid. Sur les 270 mineurs initialement arrêtés, seuls les 5 qui sont toujours hospitalisés n’ont donc pas encore été libérés.
Alors que dans trois mois se tient un congrès décisif pour l’ANC (Congès national africain), le parti au pouvoir, qui a libéré l’Afrique du sud de l’apartheid et promis une vie meilleure pour tous, navigue en eaux troubles.
À ce titre, les propos tenus en début de semaine par l’archevêque Desmond Tutu, qui a dressé un état très critique de la société sud-africaine, sont très évocateurs : « Marikana ressemblait à un cauchemar, mais c’est ce que notre démocratie de 2012 est devenue ».
Pour le prix Nobel de la paix, les inégalités sont à l’origine de la violence sociale en Afrique du sud: « Il est difficile de croire que des gens empochent autant d’argent, ont autant de privilèges, tandis que la masse souffre dans des bidonvilles (…) c’est légal, mais est-ce moral?».
Le jeune tribun populiste Julius Malema a, pour sa part, essayé de tourner à son avantage le drame de Marikana pour ressortir de l’anonymat politique dans lequel il était plongé, depuis son expulsion de l’ANC en avril.
Cette crise a au moins le mérite de lever le voile sur la condition misérable inhérente à la plupart des mineurs sud-africaines, même dix-huit ans après la fin du régime raciste de l’apartheid. D’autant plus que la richesse du sous-sol (or, diamant, charbon, platine) de la « Rainbow Nation » reste la source principale de la prospérité du pays.
(Avec AFP)
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