Pour le gouvernement israélien, l’Afrique du Sud reste « un régime d’apartheid »
La récente décision du gouvernement sud-africain de bannir les étiquettes « made in Israel » des produits provenant des Territoires occupés a déclenché la fureur de l’État hébreu. Le ministre israélien des Affaires étrangères est allé jusqu’à accuser l’Afrique du Sud de continuer à appliquer l’apartheid.
Venant d’Israël, l’accusation pourrait faire sourire. Elle est en réalité tragique. Jeudi, le ministre israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon, a accusé l’Afrique du Sud d’être un État appliquant toujours l’apartheid. Pour un des rares pays qui a soutenu le régime ségrégationniste sud-africain jusqu’en 1994, la charge est plutôt surprenante…
Tout est parti d’une décision prise la veille par le gouvernement sud-africain, dominé par l’ANC (Congrès national africain) depuis la fin de l’apartheid. Pendant de longues années, les responsables du parti de Nelson Mandela ont ouvertement soutenu la cause palestinienne. En 1994, la donne change. Propulsés au pouvoir, ils observent une prudente neutralité dans le conflit israélo-palestinien. Une ligne de conduite relativement bien tenue jusqu’à ces dernières semaines.
"L’apartheid sud-africain est dirigé contre Israël"
Pourtant, mercredi, l’Afrique du Sud a brusquement haussé le ton face à l’État hébreu. Pretoria a en effet décidé de bannir l’étiquette « made in Israël » sur les produits provenant des colonies israéliennes en Territoires occupés. Cette mesure symbolique, adoptée en conseil des ministres, était en gestation depuis le mois de mai.
Côté israélien, la réaction ne s’est pas fait attendre. Quelques heures après l’annonce du boycott sud-africain, Tel-Aviv a jugé cette mesure « discriminatoire » et « totalement inacceptable ». Le lendemain, le ministre israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon, va encore plus loin, selon Reuters. « Malheureusement il s’avère que le changement amorcé il y a quelques années en Afrique du Sud n’a pas apporté le moindre petit changement, ce pays reste un régime d’apartheid ». Et d’ajouter, avec culot : « En ce moment, l’apartheid sud-africain est dirigé contre Israël ». Le ministre, issu de la droite nationaliste israélienne, devait par ailleurs rapidement convoquer l’ambassadeur d’Afrique du Sud à Jérusalem.
Lente maturation
Pour justifier sa décision, le gouvernement sud-africain s’appuie sur une loi de protection du consommateur de 2008 qui impose « un étiquetage des biens et produits venant des Territoires occupés pour éviter que les consommateurs ne croient qu’ils viennent d’Israël ». « C’est conforme à la ligne de l’Afrique du Sud qui reconnaît les frontières de 1948 délimitées par l’ONU et ne reconnaît pas les Territoires occupés au-delà de ces frontières comme faisant partie de l’État d’Israël », précise-t-il.
La démarche sud-africaine n’est pas vraiment une surprise. La semaine dernière, le ministre délégué aux affaires étrangères, Ebrahim Ebrahim, avait ouvertement envisagé de suspendre les visites officielles en Israël, estimant que celles-ci « légitimaient l’occupation de la terre palestinienne par Israël ». En juillet, Marius Fransman, vice-ministre des affaires étrangères, avait déjà lâché un ballon d’essai. « Notre position politique sur la situation en Palestine est indubitablement marquée par notre propre histoire d’oppression et d’abus des droits de l’homme », avait-il déclaré. « Jusqu’à présent, la campagne de boycott a eu un effet économique négligeable, mais la voix d’un gouvernement comme le nôtre pourrait donner un coup de pouce symbolique ».
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