Côte d’Ivoire : les victimes de l’attaque de Duékoué tiennent les « Dioulas » pour responsables

Les victimes en majorité guérés d’une attaque commise vendredi 20 juillet dans le camp de réfugiés de Duékoué, accusent les Dioulas, originaires du nord de la Côte d’Ivoire, d’être à l’origine du drame.

Des personnes déplacées du camp de Niambly, près de Duékoué, le 22 juillet 2012. © AFP

Des personnes déplacées du camp de Niambly, près de Duékoué, le 22 juillet 2012. © AFP

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Publié le 23 juillet 2012 Lecture : 2 minutes.

Pour les déplacés de l’ethnie guéré, pas de doutes sur l’identité des « tueurs » qui ont attaqué, vendredi 20 juillet, leur camp de Duékoué, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. D’après eux, ce sont les « Dioulas », nom générique donné aux ethnies originaires du nord du pays.

Cendres encore fumantes, tentes déchiquetées, bâches déchirées : le camp de Nahibly, qui accueillait quelque 5 000 personnes à l’entrée de Duékoué, est en ruines. Vendredi, une foule venue de la ville a attaqué et incendié ce site gardé par des Casques bleus de l’Onuci, en représailles à la mort de quatre personnes dans un quartier dioula de Duékoué. Au moins neuf personnes ont été tuées lors du raid.

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Devant la mairie, une centaine de personnes, surtout des femmes et des enfants, se sont réfugiées après la flambée de violence. « Les Dioula sont rentrés, ils sont venus contre nous », raconte Dérothée Téhé, en tenant sa fillette dans les bras. « À Duékoué, ils ne veulent plus voir les Guérés », assure-t-elle.

Comme cette mère, la majorité des pensionnaires du camp étaient des autochtones guérés, qui entretiennent depuis longtemps des relations explosives avec les « Dioulas ». Ce contentieux historique, alimenté par des problèmes fonciers, a été aggravé par la crise postélectorale de 2010-2011 : les « Dioulas » sont considérés comme des partisans du président Alassane Ouattara, tandis que les Guérés sont vus comme favorables à l’ex-chef de l’État, Laurent Gbagbo.

Machettes, couteaux, haches… et FRCI

Les militaires ivoiriens des Forces républicaines (FRCI) sont aussi mis en cause. « Les FRCI ont tiré, ont tué des gens », tonne un déplacé, plein d’une colère froide. « Dites au président de la République que la population de Duékoué lui dit de changer l’armée de Côte d’Ivoire », lance de son côté Sebon Dakin, un lycéen de 21 ans. Pour lui, l’armée actuelle est surtout composée « de jeunes Dioulas ».

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Les FRCI comptent beaucoup d’ex-rebelles pro-Ouattara venus du Nord. Ils avaient été déjà mis en cause lors des tueries de Duékoué en mars 2011, qui avaient fait des centaines de morts. Le lycéen n’épargne pas non plus les soldats de la paix marocains : « devant l’Onuci, on nous tue, on brûle des gens ». « Les Marocains ont fui pour nous laisser », dénonce aussi Dérothée. « Machettes, couteaux, haches, c’était la mort », se souvient cette mère, encore choquée.

De son côté, Ndolamb Ngokwey, coordonnateur humanitaire des Nations unies en Côte d’Ivoire, défend l’Onuci : la dizaine de Casques bleus présents au camp ont été « débordés » par « plus d’un millier de personnes ». Il s’en remet aux résultats de l’enquête à venir.

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Quant à l’armée ivoirienne, elle a expliqué n’avoir pu contenir une « population en furie », malgré le déploiement en urgence de ses hommes. Son chef, le général Soumaïla Bakayoko, était sur les lieux dimanche. « Nous ne pouvons pas autoriser que des gens se fassent justice », jure-t-il, promettant de renforcer la présence des forces régulières et de limiter l’emprise des « dozos », chasseurs traditionnels redoutés devenus des forces supplétives des FRCI.

 

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