Tunisie – Wided Bouchamaoui : « Nous avons besoin des investisseurs arabes »
À la demande du patronat tunisien, le 15e congrès des hommes d’affaires et des investisseurs arabes se déroule les 14 et 15 mai à Tunis. Face à une situation économique dégradée, la présidente de l’Union Tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat (UTICA) milite pour le développement des relations commerciales avec les pays arabes. Un travail de longue haleine dont les résultats ne seront sans doute pas visibles avant plusieurs années.
Jeune Afrique : Seize mois après la révolution, organiser le 15ème congrès des hommes d’affaires et des investisseurs arabes à Tunis revêt-il une importance particulière ?
Wided Bouchamaoui : Certainement, nous avons vraiment besoin d’avoir plus d’investissements arabes en Tunisie. Avec la révolution, nous aspirons à plus de transparence et donc à plus de visibilité pour le pays. Pour l’essentiel, nous exportons vers les pays européens. Il est temps de nous ouvrir aux marchés arabes.
Comment faire pour attirer les investisseurs arabes ?
Nous bénéficions d’une position géographique extraordinaire, de très bonnes compétences et nous entretenons d’excellentes relations avec les pays maghrébins et africains. Mais cela ne suffit pas. Il faut simplifier les procédures commerciales. Je suis pour un marché commun arabe avec une liberté de circulation des personnes et des marchandises. Il faut supprimer l’obstacle des visas entre les pays arabes parce qu’ils dérangent énormément les hommes d’affaires.
Je suis pour un marché commun arabe avec une liberté de circulation des personnes et des marchandises
Que doit-faire le gouvernement tunisien ?
C’est pas uniquement le travail de notre gouvernement, mais celui de l’ensemble des pays arabes. Nous avons beaucoup de conventions bilatérales ou multilatérales mais malheureusement aucune n’est véritablement fonctionnelle. Il serait souhaitable que tous les pays arabes adoptent une même convention. C’est une réflexion partagée par la ligue arabe qui préconise l’adoption d’un marché commun pour 2020. Nous espérons que cela se fera beaucoup plus vite. La volonté économique existe, il faut maintenant la volonté politique.
Est-ce que la victoire d’Ennahdha a impulsé un retour des investisseurs arabes en Tunisie ?
La communauté des affaires travaille indépendamment de la couleur politique du pays. Il n’y a pas d’effet direct. L’essentiel pour les entreprises est de bénéficier d’un environnement stable et d’avoir de la visibilité. Rester tributaire des seuls marchés européens n’est pas souhaitable. La Tunisie a 800 000 chômeurs et un taux de croissance très faible, nous avons besoin des investisseurs arabes.
Rester tributaire des seuls marchés européens n’est pas souhaitable
Par le passé, la plus grande part des investissements arabes s’est concentrée sur le secteur immobilier, dont la valeur ajoutée est limitée.
Je note une certaine évolution dans leur perception. Les investisseurs arabes ne se concentrent plus seulement sur l’immobilier, mais aussi sur le secteur de l’agro-alimentaire. Là aussi grâce à son climat la Tunisie a une carte à jouer. Le secteur pétrolier et celui des services peuvent aussi les intéresser. Le gouvernement souhaite aussi faire la promotion de projets d’infrastructures, notamment dans les régions intérieures du pays.
Fin juin, l’UTICA renouvellera ses instances. À moins d’un mois de l’échéance, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Très sereine. Je n’ai pas encore pris la décision de me représenter. Mais au moment où le patronat marocain va élire une femme à sa tête, je suis très fière d’avoir montré la voie.
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Propos recueillis à Tunis par Julien Clémençot
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