Moines de Tibéhirine : les ex-ministres Charette et Millon ont été entendus par le juge Trévidic
Deux anciens ministres français, Hervé de Charette et Charles Millon, ont témoigné en janvier devant le juge Marc Trévidic, en charge de l’enquête sur le meurtre des moines de Tibéhirine.
L’enquête sur l’assassinat des moines de Tibéhirine, en 1996 pendant la guerre civile algérienne, progresse pas à pas. Deux anciens ministres français, Charles Millon (Défense) et Hervé de Charrette (Affaires étrangères), ont été entendus par le juge chargé de l’enquête, Marc Trévidic. L’information d’abord donnée par Le Parisien a été confirmée à l’AFP, vendredi 20 avril, par des sources proches du dossier.
Le quotidien avait levé le voile sur l’audition de Millon, réalisée en janvier par le juge Trévidic. L’ancien ministre du gouvernement d’Alain Juppé a assuré qu’il n’était « au courant de rien » : « J’ai complètement ignoré le dossier… Nous n’avons jamais eu de suivi particulier de ce dossier avant l’enlèvement des moines, ni pendant, ni après », a-t-il déclaré, selon le procès-verbal.
Passé devant le même juge le 11 avril, l’ancien chef de la diplomatie, Hervé de Charrette, a quant à lui confirmé la mise en place d’une cellule au Quai d’Orsay suite à l’enlèvement des moines, tout en affirmant qu’il ne l’avait présidée qu’une seule fois. Autre information, l’évocation de l’intervention d’un émissaire du GIA (groupe islamique armé) le 30 avril 1996, soit le jour même de la découverte de têtes décapitées des moines.
"Bavure"
Charles Millon avait déjà dû se justifier sur son rôle éventuel dans l’affaire des moines de Tibéhirine. C’était 13 ans après les faits, en 2009, lorsque l’ancien attaché militaire de l’ambassade de France à Alger, le général François Buchwalter, avait assuré avoir informé les autorités françaises de ce qu’il avait appelé « une bavure » de l’armée algérienne – alors que les premiers éléments de l’enquête privilégiaient la piste du GIA (Groupe islamique armé).
L’ex-officier avait confié au juge qu’il avait contacté notamment l’ambassadeur et le chef d’état-major des armées pour leur faire part de son constat. En réponse, Millon avait déclaré dans la presse qu’il ignorait tout de cette correspondance. « Je ne connais pas le général Buchwalter (…) S’il a fait un rapport, il n’est jamais remonté jusqu’à moi. (…) On ne m’a jamais parlé d’une « bavure » de l’armée algérienne », s’était-il alors justifié.
"Arrêt de mort"
Interrogé fin mars, Jean-Charles Marchiani, ancien bras droit de Charles Pasqua, a confirmé avoir été chargé d’une mission auprès du GIA par Jacques Chirac, à l’époque président de la République. Selon l’ancien préfet du Var, il s’agissait de négocier une rançon pour la libération des moines, enlevés dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 de leur monastère situé près de Médéa. Le Premier ministre de l’époque, Alain Juppé, qui n’avait pas été informé de cette mission, y avait mis fin, signant ainsi – selon le témoignage de Jean-Charles Marchiani – « l’arrêt de mort des moines ».
Marc Trévidic et Nathalie Poux, les deux juges qui enquêtent sur l’affaire, ont adressé en début d’année une commission rogatoire internationale aux autorités algériennes. Ils demandent une autopsie des têtes des moines et souhaitent entendre les 22 témoins cités par des repentis du GIA.
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