Tunisie : manifestation violemment réprimée par la police à Tunis, levée de boucliers
Membres de l’Assemblée constituante bousculés, journalistes molestés, militants matraqués. La brutale répression policière qui s’est abattue le lundi 9 avril sur les manifestants de l’emblématique avenue Bourguiba à Tunis, a profondément marqué la société civile tunisienne.
« On est tous en ébullition, ce qui s’est passé est horrible et un point de non-retour a été franchi ». Sadoua Elleuch, une responsable du réseau Doustourna, un mouvement de la société civile, résume bien le sentiment de bon nombre de militants tunisiens après la brutale répression policière lundi 9 avril de manifestations interdites sur l’emblématique avenue Bourguiba à Tunis.
Lors de ces incidents, le leader du réseau Doustourna Jawar Ben Mbarek a été violemment interpellé, des membres de l’Assemblée constituante ont été bousculés, des journalistes molestés. « Voir des personnalités éminentes, des responsables de mouvements, traités de la sorte est inconcevable », s’indigne Sadoua Elleuch. « Les policiers ont été très très violents, j’ai eu l’impression de revivre des choses qu’on vivait sous Ben Ali », a déclaré pour sa part l’avocate Radhia Nasraoui. « Ce gouvernement ne trouve pas de solutions aux problèmes des Tunisiens, par contre, pour tabasser il n’a pas perdu la main », a-t-elle ajouté à l’AFP.
"Deux poids deux mesures"
Outre les violences policières, dont les photos et vidéos tournent en boucle sur internet, l’absence de réaction du gouvernement et des islamistes d’Ennadha a indigné nombre de manifestants. Ceux-ci dénoncent le « deux poids deux mesures » pratiqué selon eux par les autorités, qui répriment sur leur gauche mais « laissent agir en toute impunité » les salafistes.
Si le président Moncef Marzouki a pour sa part condamné une « violence inacceptable », il a renvoyé dos à dos manifestants et policiers.
Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Khaled Tarrouche, a paradoxalement invoqué la menace de troubles pour justifier l’interdiction de manifester. « On ne va pas laisser s’installer le chaos. Les gens ont la possibilité de manifester ailleurs que sur l’avenue Bourguiba » – interdite aux rassemblements depuis le 28 mars-, a-t-il dit. Selon lui, en tirant des lacrymogènes, les forces de l’ordre « voulaient éviter de pires affrontements ».
Quelles seront les répercussions de cette journée du 9 avril ? L’analyste Fayçal Chérif « ne crois pas que ce qui s’est passé aura un impact profond sur la base électorale d’Ennahdha ». Une analyse partagée par le sociologue Salem Labieh, pour qui « l’indignation reste pour le moment au niveau de l’élite politique et intellectuelle ». « Les incidents d’hier étaient limités et localisés, après si ça se reproduit en province ce sera une autre question ».
(Avec AFP)
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