Amadou Toumani Touré : « Je ne suis pas détenu par les mutins, je suis libre » au Mali
Le président malien Amadou Toumani Touré a accordé mercredi 28 mars sa première interview depuis le coup d’État militaire du 22 mars au Mali. Il explique qu’il va bien et n’est pas retenu par les mutins. Pour le reste, l’homme n’est pas très prolixe…
Dans sa première intervention depuis le coup d’État militaire qui l’a renversé, le 22 mars dernier, le président malien Amadou Toumani Touré commence par soutenir la position de la Cedeao, qui a tenu un sommet extraordinaire sur la crise malienne à Abidjan, le 27 mars. « Je souscris entièrement aux propositions faites par les chefs d’État [ouest-africains, NDLR] pour une sortie de crise dans notre pays. Cela s’entend par le retour à l’ordre institutionnel normal (…) et à éviter toute aventure. Cela passe aussi par la remise en place des institutions de la République qui ont été démocratiquement élues par le peuple souverain du Mali », confie-t-il sur RFI ce 28 mars.
ATT affirme ne pas se trouver en détention, même s’il tient à garder secret son lieu de résidence. « Je suis à l’intérieur du Mali, chez moi, au Mali. (…) Je ne suis pas détenu par les mutins. Je suis libre dans mon pays. » À la question de savoir comment il se porte, le président malien répond : « Oh, bien ! Je me porte très bien, la seule chose qui me manque, c’est un peu de force (…) Je me porte très bien, aussi bien que ma famille. » Et d’esquiver la question sur son entourage et les personnes qui assurent sa sécurité. Est-il ou non entouré de fidèles ? « Je ne pourrais pas vraiment le dire, dans tous les cas. Il y a toutefois quelques militaires que je garde pour moi-même », répond-il. On ne saurait être plus évasif…
Calme et détachement
En ce qui concerne la situation politique, ATT ne fait en tout cas montre d’aucune acrimonie envers les mutins putschistes, et parle avec un grand calme, presqu’un certain détachement. « (…) À deux mois de la fin de mon mandat, je reste disponible et c’est tout compréhensible, pour toute solution allant dans le sens de la paix et de la souveraineté de la démocratie malienne. C’est un exemple démocratique auquel avec tant d’autres Maliens, tant d’autres démocrates (…) j’ai contribué à la mise en place. Je veux parler de la démocratie. »
Une démocratie qui l’a fait chef d’État, une fonction dont il semble cependant ne plus vouloir assumer le statut. Pour preuve, quand on lui demande s’il se considère toujours comme le « président du Mali », il explique ne pas vouloir « rentrer dans cette polémique. Je me considère d’abord comme un citoyen malien, comme un démocrate. Je me considère également comme un homme qui agit pour son pays, nettement moins pour lui que pour son pays. »
Fidèle à son style, ATT préconise une solution à la crise à base de larges négociations, sans beaucoup plus de précision. « Je pense que le plus important aujourd’hui c’est, de manière consensuelle, avec l’ensemble de la classe politique du Mali, et l’ensemble des chefs d’État de la Cedeao, c’est de dégager une sortie de crise. Je pense qu’aujourd’hui le plus important ce n’est pas les hommes. C’est les institutions et c’est le Mali. »
Esquives et évitements
Serait-il toutefois disposé à laisser son siège sans condition, ou à le confier au président de l’Assemblée nationale, Dioncounda Traoré ? Là encore, la réponse est plutôt floue… « Je pense que la question n’a pas encore à être posée. Mais sachez qu’il y a vingt-deux ans je ne pensais pas pouvoir être élu dans mon pays. Vingt-deux ans après je suis encore là, face à cette crise. Vous savez que pour moi, c’est le Mali d’abord, et le Mali avant tout », répète-t-il.
Même évitement lorsqu’on lui demande si la nouvelle Constitution proposée par la junte est « recevable » – « ce n’est vraiment pas à moi de décider » – ou s’il est favorable à une intervention miliaire, comme le suggère la Cedeao – « je serais très mal à l’aise de répondre à des questions qui n’ont pas été posées ». Au final, outre les précisions sur sa santé, ATT n’aura véritablement répondu qu’à une seule question : a-t-il ordonné à sa garde présidentielle de ne pas combattre les putschistes pour éviter une effusion de sang ?
« Non, non, non : dans tous les cas de figures, d’aucune manière, je ne le souhaiterai jamais. Que des soldats de l’armée malienne tuent d’autres soldats de l’armée malienne… Non, pour moi, ce sont des soldats et officiers de l’armée. Vous imaginez que je n’aurais jamais souhaité d’affrontement entre les forces armées, uniquement pour protéger un homme. Ce n’est pas important. L’important aujourd’hui, c’est d’appeler à l’unité, à la cohésion pour faire face à tous ces défis que nous connaissons dans notre pays. »
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