Libye : le chef des Toubous dénonce un « nettoyage ethnique » au sud du pays
Des affrontements tribaux ont fait quelque 70 morts à Sebha depuis le lundi 26 mars. Le chef d’une des tribus concernées, les Toubous, estime être victime d’un « nettoyage ethnique » et accuse les autorités libyennes de complicité.
Mise à jour le 29/03/12 à 10H15
Le sud libyen est-il le théâtre d’un « nettoyage ethnique » contre la tribu des Toubous ? C’est en tout cas ce qu’affirme leur chef Issa Abdelmajid Mansour, un ex-opposant au régime de Mouammar Kadhafi. Les Toubous, à la peau noire, qui vivent sur un territoire couvrant la Libye, le nord du Tchad et du Niger, sont impliqués depuis février dans des affrontements meurtriers avec des tribus locales du sud du pays, dont les Zwei à Koufra (sud-est), qui les accusent de compter dans leurs rangs des combattants étrangers, notamment tchadiens. Mais « aujourd’hui, le problème s’est transformé d’un conflit tribal en conflit racial », a affirmé Issa Abdelmajid Mansour mardi 27 mars, précisant que « les attaques ciblent toute personne à la peau noire ».
Les derniers affrontements qui ont débuté lundi 26 mars à Sebha ont fait 70 morts et 150 blessés, a annoncé mercredi le porte-parole du gouvernement, Nasser al-Manaa. Le chef des Toubous, Issa Abdelmajid Mansour, a fait état quant à lui de 40 morts parmi les membres de sa tribu. Les combats ont éclaté après que des tribus arabes ont accusé les Toubous d’avoir tué un des leurs.
Le CNT mis en cause
Dans l’incapacité d’étendre son autorité sur l’ensemble du territoire libyen, le Conseil national de transition (CNT) est directement mis en cause par Issa Abdelmajid Mansour. Il accuse les autorités libyenne de faire usage d’avions militaires et de chars pour bombarder des positions des Toubous au sud de la ville de Sebha, et soupçonne également des ex-rebelles de combattre sa tribu sous la bannière du CNT.
Abdelrahmane Seif al-Nasr, chef du Comité de sécurité de la région de Fezzane (sud), a confirmé à l’AFP que des avions avaient bombardé une colonne de véhicules se dirigeant vers Sebha depuis la région de Qatroun, pas loin des frontières nigériennes et tchadiennes, après que ces « avions de reconnaissance » aient essuyé des tirs de canons anti-aériens.
Le représentant de la ville de Sebha au Conseil national de transition a de son côté indiqué à la chaîne de télévision Libya Al-Hourra qu’il démissionnait de son poste pour dénoncer « la passivité » du gouvernement et son « incapacité à réagir ».
Face à une situation jugée « dramatique » par le colonel Mohamed Boussif, directeur de la sûreté nationale à Sebha, le chef des Toubous a annoncé « la réactivation du Front toubou pour le salut de la Libye (FTSL, mouvement d’opposition sous l’ancien régime) », dissout après la chute du régime en août. « S’il le faut, nous allons demander une intervention internationale et œuvrer pour un État comme le Soudan du Sud », a-t-il ajouté.
"Nous devons nous protéger"
« Il s’est avéré que le CNT et le régime de Kadhafi ne sont pas différents. Le CNT a un programme pour nous exterminer », estime Issa Abdelmajid Mansour, dont la tribu avait joué un rôle clé dans la rébellion contre Mouammar Kadhafi depuis le sud du pays. « Nous avions dit que l’unité de la Libye était au-dessus de toute considération. Mais maintenant nous devons nous protéger et protéger les autres minorités », a-t-il encore poursuivi.
« Le gouvernement n’acceptera pas une entité qui s’appelle la province des Toubous. La Libye est unifiée et celui qui a une opinion ou une idée, il n’a qu’à l’exposer pacifiquement », a réagi mercredi le porte-parole du gouvernement.
Un incident qui ne risque pas d’améliorer la situation dans le sud-libyen. Tout comme dans le reste du Sahel, victime collatérale de la chute de Mouammar Kadhafi.
(Avec AFP)
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